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Droit des valeurs mobilières en 2015 : une évolution, et non une révolution

Auteur(s) : Douglas Bryce, Rob Lando

9 décembre 2015

L’année écoulée a été marquée par quelques développements importants en droit des valeurs mobilières au Canada, qui pourraient mener à des changements majeurs à la pratique du droit, comme le projet de réforme du régime des offres publiques d’achat au Canada. Mais en majeure partie, l’année 2015 en a été une d’évolution, comme dans le cas de l’instauration de plusieurs dispenses de prospectus et de l’imposition de règles plus strictes de protection des investisseurs qui sont des particuliers. Voici notre liste des événements les plus notables de l’année :

RCRMC – est-ce un pas vers un organisme national de réglementation des valeurs mobilières?

La volonté d’un certain nombre de provinces et du gouvernement fédéral de créer un régime de réglementation des valeurs mobilières commun (le régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux) s’est maintenue en 2015. Plus particulièrement, la version révisée de l’avant-projet de Loi sur les marchés des capitaux uniforme, le projet initial de règlement et les documents connexes ont été rendus publics aux fins de commentaires le 25 août 2015, et la période de commentaires s’est terminée le 23 décembre 2015. Il reste à découvrir le degré de priorité politique qui sera accordé à cette initiative par le gouvernement libéral fédéral nouvellement élu, étant donné que cette initiative avait auparavant reçu l’appui du gouvernement conservateur fédéral.

Nouveau régime relatif aux offres publiques d’achat : des obstacles plus importants pour les initiateurs

Après des années de débats entre les participants au marché concernant le rôle des tactiques défensives et l’utilisation des régimes de droits des actionnaires en particulier, les ACVM ont rendu publiques aux fins de commentaires, en mars 2015, les modifications projetées au régime des offres publiques d’achat. Ces modifications accorderaient à la cible d’une offre hostile une période de 120 jours pour y répondre, car l’offre devra demeurer ouverte pendant au moins 120 jours, à moins que le conseil d’administration de la société cible n’accepte une période plus courte (d’au moins 35 jours) ou à moins qu’elle ne conclue une autre opération. Les nouvelles règles exigeront également une prorogation automatique et obligatoire de l’offre pour une période de 10 jours, une fois que toutes les conditions auront été remplies ou abandonnées, y compris l’exigence de versement minimal. Toutes les offres seront assujetties à une condition de versement minimal de 50 % de la valeur des titres en circulation qui ne sont pas encore détenus par l’initiateur et ses alliés. Si le nouveau régime des offres publiques d’achat est adopté tel que proposé, ce sera probablement la fin des régimes de droits des actionnaires ou des audiences relatives aux « pilules empoisonnées » par les organismes de réglementation dans la plupart des cas, étant donné que l’on s’attend à ce que les régimes de droits fassent l’objet d’interdiction d’opérations décrétées par les organismes de réglementation des valeurs mobilières après ces offres de 120 jours, sauf en cas de circonstances inhabituelles. Pour plus de renseignements, veuillez consulter l’article intitulé : Le chant du cygne des audiences concernant les « pilules empoisonnées »?

Le financement participatif fait son entrée au Canada

Étant donné la croissance rapide du financement participatif comme moyen, pour les entreprises en démarrage, d’avoir accès à du capital, ce n’était qu’une question de temps avant que les organismes de réglementation des valeurs mobilières n’établissent un cadre juridique à cet égard. Les ACVM ont créé une dispense de prospectus en matière de financement participatif qui entrera en vigueur le 25 janvier 2016. Dans le cadre de ce régime, les émetteurs devront préparer une offre contenant tous les renseignements que les investisseurs doivent connaître à propos de leur entreprise; les investisseurs se verront imposer une limite à chacun de leurs placements et des limites globales annuelles, qui varient en fonction de la situation de l’investisseur admissible; les investisseurs devront signer un formulaire de reconnaissance de risques prescrit par réglement, confirmant qu’ils connaissent les risques liés au placement; et les émetteurs devront continuer en permanence de mettre à la disposition des investisseurs des états financiers annuels et d’autres renseignements, même s’ils ne sont pas assujettis aux obligations d’information imposées aux sociétés ouvertes. Les titres ne pourront être vendus que par l’intermédiaire d’un « portail de financement » inscrit répondant aux exigences prescrites, et il sera interdit de faire de la publicité ou de la sollicitation générale à l’égard de ces titres.

Réforme du régime du marché dispensé aux fins de la mobilisation de capitaux

Un certain nombre d’autres révisions importantes apportées au régime de marché dispensé au Canada auront une forte incidence sur la façon dont se déroule le financement dispensé de prospectus à l’échelle du pays. Deux de ces initiatives traduisent en partie le contexte de financement restreint dans lequel évoluent certains petits émetteurs. La première est l’instauration d’une nouvelle dispense visant à permettre des émissions dispensées aux détenteurs de titres existants, et la deuxième est un régime de placement de droits révisé, visant à simplifier le processus de placement de droits et à faciliter le recours (relativement rare) à la dispense. Par ailleurs, en 2015, l’Ontario a procédé à une série de modifications destinées à harmoniser les dispenses de notice d’offre relatives aux membres de la famille, aux amis et aux associés avec celles d’autres territoires de compétence. Enfin, un certain nombre de modifications visant à accroître la protection des investisseurs dans le contexte des offres dispensées ont été présentées ou publiées sous forme de projet, notamment l’adoption d’un formulaire de reconnaissance des risques destiné aux investisseurs admissibles qui ne satisfont pas aux exigences financières relatives à leur actif et une nouvelle formule étendue de rapport sur les opérations dispensées.

Programme de dénonciation de la CVMO

La Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) a rendu public un projet de Programme de dénonciation qui serait le premier du genre au Canada. Bien qu’il soit calqué sur celui de la Securities and Exchange Commission des États-Unis, celui que propose la CVMO vise à éviter certains des aspects extrêmes du programme américain, lequel a donné lieu à 120 demandes de récompense en 2015 seulement, dont l’une attribuée à une seule personne s’est élevée à plus de 30 millions de dollars. Vous trouverez d’autres détails sur le projet de Programme de dénonciation de la CVMO dans l’article intitulé : Application de la loi en matière de valeurs mobilières : une victoire et de puissants outils pour les organismes de réglementation.

Infrastructure du vote par procuration – toujours sur une route longue et sinueuse

Les ACVM sont engagées dans l’examen de l’infrastructure du vote par procuration au Canada depuis août 2013, à la suite de diverses préoccupations exprimées par les participants au marché concernant l’intégrité et la fiabilité du réseau d’organisations, des systèmes, des règles juridiques et des pratiques du marché qui soutiennent la sollicitation, la collecte, l’envoi et la compilation des votes par procuration aux assemblées des actionnaires dans le contexte du régime canadien relatif à la propriété d’actions pour le compte de bénéficiaires. Le personnel des ACVM a publié, en janvier 2015, un rapport qui abordait les progrès réalisés à ce jour dans leur examen et qui précisait les prochaines étapes. Le rapport d’étape confirmait que les ACVM croient que le système en place est fragmenté et nécessite une modernisation et des améliorations. Il précisait également un certain nombre d’améliorations qui doivent être apportées au processus de rapprochement des votes. Nous prévoyons que ce processus d’examen se poursuivra en 2016 et au-delà. Au printemps 2015, les ACVM avaient également décidé de ne pas soumettre à une réglementation les firmes qui offrent des services-conseils en matière de procurations, telles qu’ISS et Glass Lewis, préférant publier des lignes directrices sur les meilleures pratiques que ce genre de firme devrait suivre.