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Les recommandations du Projet BEPS pourraient avoir d’énormes répercussions sur le commerce transfrontalier

Auteur(s) : Amanda Heale, Patrick Marley

9 décembre 2015

En novembre 2015, le premier ministre Trudeau et les autres leaders du G20 ont approuvé l’ensemble des mesures que l’OCDE a publiées dans le cadre de son projet sur l’érosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices (le « Projet BEPS »). Le Projet BEPS, plan ambitieux mené conjointement par l’OCDE et le G20 en vue d’améliorer le système fiscal international, a débouché cette année sur la publication de centaines de pages de recommandations qui, si elles sont adoptées, pourraient avoir d’énormes répercussions sur le commerce transfrontalier et la compétitivité des entreprises canadiennes.

Le rapport final sur le Projet BEPS de l’OCDE/du G20 (le « rapport final |) a été publié en 2015. Il constitue le point culminant du projet de l’OCDE, étalé sur de nombreuses années, visant à accroître la cohérence, la substance et la transparence du système fiscal international. Le projet a été élaboré à la demande du G20 pour répondre aux préoccupations croissantes du public au sujet de l’érosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices. De manière générale, le Projet BEPS se penche sur des stratégies de planification fiscale qui exploitent les différences entre les règles fiscales nationales et internationales pour transférer les bénéfices dans des territoires à faible imposition. Le Projet BEPS a reçu une attention encore jamais vue de la part des gouvernements et du secteur privé.

Le rapport final présente les recommandations de l’OCDE et le point de vue des pays participants sur la façon de régler l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices. Il a été approuvé par les ministres des Finances des pays du G20 lors de leur réunion du 8 octobre 2015, à Lima, au Pérou, et endossé par les leaders des pays du G20 lors de leur sommet du 16 novembre 2015 à Antalya, en Turquie.

Le rapport final représente le point de vue de 44 pays, qui comptent pour environ 90 % de l’économie mondiale. Par conséquent, si les recommandations contenues dans les rapports sont appliquées dans les conventions fiscales et les lois nationales, elles pourraient avoir d’importantes répercussions sur le commerce transfrontalier et l’investissement partout dans le monde. Le rapport final comprend des recommandations sur l’économie numérique, l’utilisation des dispositifs hybrides, l’élaboration de règles concernant les sociétés étrangères contrôlées, la limitation de la déductibilité des intérêts, la limitation de l’utilisation de mesures favorables aux brevets et de certaines autres pratiques fiscales dommageables, la prévention du chalandage fiscal abusif, la prévention de mesures visant à éviter artificiellement le statut d’établissement stable, l’harmonisation des prix de transfert à la création de valeur, l’évaluation et la surveillance des données relatives au BEPS, les règles de communication obligatoire de l’information, la documentation des prix de transfert et la déclaration pays par pays, l’efficacité des mécanismes de règlement des différends et l’élaboration d’un instrument multilatéral pour modifier les conventions fiscales bilatérales.

Au moment de rédiger le présent document, on ignorait toujours si le nouveau gouvernement fédéral cherchera à appliquer les diverses recommandations sur le Projet BEPS et, le cas échéant, dans quelle mesure il le fera.

La nature consensuelle du rapport final donne lieu, dans bien des cas, à des recommandations ambiguës. Combinées à un vaste accès à des données financières, ces règles feront inévitablement en sorte que bien des pays tenteront de percevoir des recettes fiscales supplémentaires auprès des sociétés, ce qui pourrait entraîner un accroissement des différends en matière de fiscalité internationale et des coûts liés à la conformité au Canada et ailleurs dans le monde. En évitant d’aborder des questions difficiles (comme la répartition des recettes fiscales entre le pays source et le pays de résidence), l’approche consensuelle présentée dans le rapport final masque possiblement d’importantes différences de vues entre les pays sur la question de savoir quels pays récolteront le plus de recettes fiscales à la suite de ces propositions.

Pour ce qui est du Canada, nous espérons que le nouveau gouvernement gardera à l’esprit la nécessité de s’assurer que les dispositions des conventions fiscales et les règles nationales protègent la compétitivité des entreprises canadiennes et favorisent les investissements au Canada.