L’ARC révise et élargit ses lignes directrices sur les règles de divulgation obligatoire

10 Nov 2023 11 MIN DE LECTURE

Le 2 novembre 2023, l’Agence du revenu du Canada (ARC) a révisé et élargi ses lignes directrices sur les règles canadiennes de divulgation obligatoire (les « lignes directrices »). Les lignes directrices mises à jour comprennent d’importantes révisions des positions déjà publiées et de nouvelles positions liées aux obligations de déclaration relatives aux opérations à déclarer, aux opérations à signaler et aux traitements fiscaux incertains à déclarer.

Opérations à déclarer

Droit à la confidentialité

Les lignes directrices stipulent déjà que les mesures de protection des secrets commerciaux qui ne sont pas liées à l’impôt ne donnent pas lieu à une obligation de déclaration. Les lignes directrices mises à jour stipulent également que les types d’ententes suivants ne respectent pas le marqueur de confidentialité et ne donnent pas lieu à une exigence de déclaration :

  • les ententes de confidentialité types qui ne contiennent pas de clause de confidentialité en lien avec des conseils fiscaux
  • les clauses commerciales types de confidentialité avec les clients dans les ententes types ou autres documents qui ne prévoient pas un avantage fiscal particulier ou un traitement fiscal

Les lignes directrices fournissent à titre d’exemple de la première de ces deux catégories une lettre d’intention qui comprend une clause de confidentialité. Étant donné que les lettres d’intention traitent habituellement d’un éventail de questions, l’exclusion pour les « ententes de confidentialité types » comprend apparemment des clauses de confidentialité types pour des contrats portant sur une variété de questions et pas uniquement sur des obligations de confidentialité. Cette catégorie semble donc s’appliquer de façon générale à de nombreuses clauses de confidentialité types qui ne précisent pas que les conseils fiscaux doivent demeurer confidentiels.

Dans la deuxième catégorie, où le contrat est conclu avec un « client », comme le client d’un conseiller, le marqueur de droit à la confidentialité ne sera pas respecté tant que les clauses confidentialité ne prévoient pas un avantage fiscal particulier ou un traitement fiscal. En comparant les deux nouvelles catégories, il n’est pas clair a) pourquoi il y en a deux, l’une pour les « ententes de confidentialité » (qui, comme il a été mentionné, peuvent comprendre des clauses de confidentialité) et l’autre pour les « clauses de confidentialité avec les clients dans les ententes types ou autres documents »; b) la raison pour laquelle les deux catégories exigent la non-confidentialité d’un sujet différent, à savoir, les « conseils fiscaux » pour la première et « un avantage fiscal particulier ou un traitement fiscal » pour la seconde; c) s’il y a un chevauchement dans la portée des deux catégories. Les lignes directrices ne donnent pas plus de détails à cet égard et n’expliquent pas non plus comment déterminer si une clause ou une entente est « type ».

Protection contractuelle

Les lignes directrices révisées apportent quelques modifications au commentaire précédent sur l’exclusion légale de la protection contractuelle pour l’assurance responsabilité fiscale, les indemnités ou une autre protection faisant partie intégrante d’une entente entre personnes sans lien de dépendance concernant la vente de la totalité ou d’une partie d’une entreprise (l’exception pour fusions et acquisitions). Les changements comprennent les éléments suivants :

  • la protection contractuelle obtenue par un acquéreur dans le cadre d’une acquisition structurée afin d’obtenir une majoration en vertu de l’alinéa 88(1)d) de l’immobilisation non amortissable détenue par la société cible (auparavant applicable seulement lorsque l’acquéreur est une société publique, cette exception est maintenant étendue et pourrait éventuellement s’appliquer aux sociétés privées)
  • la protection contre la responsabilité prévue au paragraphe 116(5) à l’égard de la disposition concernant l’achat d’un bien canadien imposable d’un non-résident du Canada sans l’obtention d’un certificat de conformité en vertu de l’article 116 (auparavant applicable uniquement à l’assurance responsabilité fiscale, cette exception est désormais étendue à d’autres formes de protection contractuelle dans cette situation)
  • une nouvelle exemption pour les indemnités ou les engagements envers un acheteur ou une cible à l’égard des obligations fiscales de la partie III et d’autres conséquences fiscales survenant en raison de dividendes payés dans le cadre d’une réorganisation préalable à la vente
  • un nouvel exemple ajouté au sujet d’une fusion ou d’une acquisition effectuée par la fusion de deux sociétés sans lien de dépendance (y compris dans une situation d’opération d’éviction liée à une fusion régulière)

Les lignes directrices viennent ajouter à la liste des indemnités, assurances ou autres protections qui pourraient ne pas pouvoir bénéficier de l’exception pour fusions et acquisitions, mais que l’ARC ne traitera pas comme une protection contractuelle donnant lieu à une obligation de déclaration :

  • les clauses commerciales types d’indemnisation avec les clients dans les ententes types ou autres documents qui ne prévoient pas un avantage fiscal particulier ou un traitement fiscal
  • les clauses de représentations contractuelles et d’indemnités types relatives à l’omission de déduire ou de retenir les impôts de la partie XIII, dans une situation entre personnes sans lien de dépendance
  • d’autres types de clauses de rajustement de prix, comme la clause de redressements relative au fonds de roulement dans un contrat d’achat et de vente, qui ne sont pas axées sur l’impôt (auparavant, seules les clauses de rajustement de prix « standards » étaient exclues)
  • une exception générale pour une protection offerte dans un contexte commercial ou financier normal où des parties sans lien de dépendance traitent librement, prudemment et en toute connaissance de cause, lorsque la protection ne s’étend pas à un traitement fiscal relativement à une opération d’évitement. Les lignes directrices prévoyaient auparavant une exception pour certaines indemnités pour les fiduciaires de REER. L’exception pour les REER fait maintenant partie de l’un des trois exemples non exhaustifs de la nouvelle catégorie générale. Les deux autres exemples sont nouveaux :
  1. une indemnité fiscale dans les clauses de majoration de contrats de prêt ou les ententes de l’International Swaps and Derivatives Association (ISDA)
  2. une indemnité fiscale dans un contrat d’emploi et des ententes d’indemnisation de départ
  • l’« assurance de déclaration de revenus », un terme non défini qui pourrait faire référence à une assurance qui offre une protection générale contre les dépenses découlant d’une vérification ou d’un différend relatif à une déclaration de revenus et aux impôts supplémentaires imposés à la suite d’un ajustement défavorable des positions fiscales reflétées dans une déclaration de revenus. Les lignes directrices stipulent que cette assurance ne constitue pas une protection contractuelle dans la mesure où l’assurance couvre la déclaration de revenus d’un contribuable en général, et ne protège aucune opération particulière ou série d’opérations particulières conclues par un contribuable qui résulte d’une « planification fiscale abusive ». Dans ce qui semble être une explication des raisons pour lesquelles ce produit d’assurance ne serait pas à déclarer, les lignes directrices précisent qu’une telle assurance ne paierait pas ou ne rembourserait pas les contribuables pour l’impôt imposé en raison de positions fiscales contestées à l’égard de cette planification fiscale abusive et qu’elle serait assujettie à un montant maximum de couverture (ou de protection) qui ne couvrirait probablement qu’une partie peu importante des dépenses totales engagées par un contribuable à la suite d’une vérification à l’égard de la planification fiscale abusive.
  • la réassurance d’un risque lorsque l’assurance initiale n’est pas assujettie à une obligation de déclaration
  • une clause type d’un contrat de société de personnes prévoyant qu’en cas de vérification de l’un des associés, la société de personnes fournira l’aide raisonnable à cet associé afin de l’aider à résoudre une telle vérification, à moins que « l’objet de la clause vise à protéger une opération d’évitement en particulier ou une série d’opérations (y compris une opération d’évitement) »
  • dans le contexte d’une fusion de fonds communs de placement, où l’impôt est différé en vertu de l’article 132.2, et selon l’accord de fusion, le gestionnaire de fonds peut accepter d’indemniser le fiduciaire du fonds absorbé concernant toute obligation qui pourrait survenir en lien avec le fonds absorbé

Honoraires conditionnels

Le marqueur d’ententes d’honoraires conditionnels concerne les situations où un conseiller ou un promoteur a droit à des honoraires conditionnels qui sont fondés sur le montant d’un avantage fiscal découlant de l’opération, la réussite de l’obtention de l’avantage fiscal ou le nombre de personnes participant à l’opération. Les lignes directrices apportent un changement notable à cet égard. L’exclusion pour une entente relative aux frais de litige conditionnels conclue dans le cadre d’un appel d’une cotisation fiscale établie à l’égard d’un avantage fiscal découlant d’une opération ou d’une série d’opérations achevée s’applique maintenant de façon générale aux honoraires conditionnels pour toute l’aide professionnelle fournie dans le cadre de vérifications fiscales et de l’émission de cotisations (y compris les nouvelles cotisations), alors qu’elle ne concernait auparavant que les avocats.

Opérations à signaler

Les lignes directrices ajoutent de nouveaux renseignements sur les séries d’opérations qui comprennent des opérations effectuées avant et après la date d’entrée en vigueur de la désignation de l’opération à signaler. L’ARC explique que lorsqu’une personne effectue une série d’opérations qui chevauchent la date d’entrée en vigueur de la désignation d’une telle série (ou d’une série qui est sensiblement semblable), l’obligation de déclaration sera déclenchée par la première opération de la série conclue après la date de désignation.

Traitements fiscaux incertains à déclarer

Les lignes directrices prévoient maintenant que les obligations de déclaration relatives aux traitements fiscaux incertains à déclarer ne s’appliquent pas aux placements de portefeuille dans les sociétés en commandite de capital-investissement ou les sociétés de personnes cotées en bourse. La raison invoquée par l’ARC pour justifier cette exception est que la contribution de chaque investisseur à une telle société de personnes est habituellement modeste par rapport au montant global du capital investi. De plus, les investisseurs n’exercent généralement aucun contrôle sur les gestionnaires ou les commandités de ces sociétés de personnes et ont des difficultés pratiques à obtenir des renseignements pertinents.

Points à retenir

La volonté de l’ARC de réviser davantage ses lignes directrices sur les opérations à déclarer est la bienvenue, en particulier en ce qui concerne les ententes commerciales et d’investissement normales, comme les majorations dans les conventions de crédit ou les documents de l’ISDA, ou des clauses de confidentialité types dans diverses ententes commerciales. De plus, bien que certaines des limites de l’exception pour fusions et acquisitions ne soient pas définies, les lignes directrices introduisent d’autres types de protections fiscales offertes lors d’opérations de vente et d’achat dans la portée des opérations qui ne sont pas à déclarer.

Les lignes directrices laissent encore beaucoup de place au débat et au jugement dans l’application des règles de divulgation obligatoire. Bon nombre des exceptions ou des exemples d’opérations qui n’ont pas à être déclarées sont accompagnés d’un avertissement en mentionnant que l’exception pertinente de l’obligation de déclaration peut ne pas s’appliquer si certaines clauses ou ententes ne sont pas « types » ou s’il y a une « planification fiscale abusive ». De tels termes, qui ne sont pas définis et dont la portée n’est pas claire, jettent un certain doute sur la gamme de situations pour lesquelles le milieu des affaires peut se fier à ces directives.