L’impératif de l’inclusion : en 2018, composer un meilleur conseil d’administration signifie constituer un conseil qui ressemble au Canada

30 Mai 2018 6 MIN DE LECTURE

Plus de

1 Canadien sur 5

1 in 5 Canadians

(7,7 millions de personnes)  fait partie des minorités visibles

et

1,7 million de personnes sont des Autochtones

(Recensement de 2016)

En octobre dernier, lorsque Statistique Canada a publié les résultats du recensement de 2016, nous avons appris que plus d’un Canadien sur cinq, ou 7,7 millions de personnes, font maintenant partie d’une minorité visible, et que 1,7 million de personnes de plus, ou 4,9 % de la population, sont des Autochtones.

Le même mois, au Royaume-Uni, le Parker Review Committee, dirigé par l’homme d’affaires britannique Sir John Parker, a fait paraître son rapport final sur la diversité ethnique au sein des conseils d’administration du Royaume-Uni. Ce rapport concluait que, même si les sociétés du Royaume-Uni ont réalisé de « grands progrès » sur le plan de la mixité, « il reste beaucoup à faire en matière de diversité ethnique et culturelle, en tant qu’impératif opérationnel ».

L’adoption du projet de loi C-25, qui modifie la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA), vient encore amplifier cette impulsion. Ainsi, tout comme la mixité, l’inclusion des minorités visibles et des Canadiens d’origine autochtone dans les conseils d’administration devient une priorité dans le cadre du recrutement d’administrateurs.

D’après les tendances récentes, l’inclusion est dorénavant le différenciateur fondamental recherché par les investisseurs et sur le marché, où la composition globale des conseils d’administration retient déjà beaucoup l’attention.

Nous examinons ici cette évolution plus en détail.

Nouvelles exigences de la loi en matière d’obligations d’informations

Au cours des dernières années, tout comme au Royaume-Uni, les sociétés du Canada ont de plus en plus insisté sur la mixité dans leurs politiques, leurs pratiques et leurs communications. Le catalyseur réglementaire a été l’apport de modifications au Règlement 58-101 sur l’information concernant les pratiques en matière de gouvernance (le « Règlement 58-101 »), qui exige de communiquer la représentation des femmes aux conseils d’administration et à la haute direction de sociétés cotées à la Bourse de Toronto; ces modifications sont entrées en vigueur à la fin de 2014.

Et maintenant, avec l’adoption par le gouvernement fédéral du projet de loi C-25, les exigences de divulgation en matière de diversité pour toutes les sociétés assujetties à la LCSA et dont les titres sont cotés en bourse sont étendues de façon à englober tous les « groupes désignés », c’est-à-dire non seulement les femmes, mais aussi les membres des minorités visibles, les Autochtones et les personnes handicapées.

Le projet de loi adopte une approche selon le modèle « appliquer ou expliquer », pour la présentation de renseignements, ce qui est dans l’esprit des règlements existants sur les valeurs mobilières. Les conseils d’administration qui veulent pouvoir présenter une bonne information dans ce domaine (idéalement, au moyen d’une politique écrite à jour sur la diversité des conseils d’administration), devraient entreprendre leur planification à cet égard sans tarder. Il faut du temps pour trouver les candidats qui peuvent ajouter de la valeur et être en mesure de collaborer avec leurs confrères administrateurs; la plupart des entreprises devront prendre des mesures pour agrandir le bassin de talents auquel elles puisent actuellement.

Le recrutement au sein d’un groupe plus vaste

Les recherches que nous avons effectuées en vue de rédiger le rapport Pratiques de divulgation en matière de diversité 2017 d’Osler, soit passer en revue les documents d’information déposés par toutes les sociétés inscrites à la cote de la TSX et assujetties au Règlement 58-101, n’ont pas permis de signaler une forte présente d’administrateurs issus de minorités visibles ou de nations autochtones canadiennes. De plus, ces groupes figurent rarement dans les tableaux de compétences utilisés par les conseils d’administration et les recruteurs aux fins de recrutement.

Pour bien des entreprises, donc, se conformer à l’orientation politique du projet de loi C-25 nécessitera un effort concerté. Toutefois, les conseils d’administration qui cherchent à réduire le risque de pensée de groupe et à mieux s’outiller pour prendre des décisions totalement éclairées et assurer une meilleure surveillance peuvent y voir une occasion à saisir. Ce sont là les résultats obtenus lorsque des gens ayant des cadres de référence différents se réunissent et qui posent des questions qui, autrement, n’auraient pas surgi.

La plupart des conseils d’administration devront donc, dans un premier temps, passer en revue leurs processus de recrutement et de nomination afin d’élargir la portée de leur recherche. Notre rapport de 2017 a mis en lumière quelques pratiques que des conseils d’administration novateurs ont adoptées pour accroître le nombre de femmes parmi les candidats aux postes d’administrateur, notamment :

  • fixer des critères de recrutement englobant les groupes ciblés;
  • instaurer des programmes de mentorat et de réseautage officiels;
  • appuyer des partenariats externes visant à promouvoir le changement;
  • augmenter la sensibilisation aux pratiques exemplaires.

Les conseils d’administration devraient maintenant envisager des pratiques semblables en vue d’augmenter le nombre de candidatures de membres de minorités visibles et d’Autochtones.

Tenir compte des impératifs opérationnels

22,3 %

 

des Canadiens

appartiennent à une minorité visible,

mais ceux-ci ne représentent que

4,5 %

 

des administrateurs des sociétés du FP500

(Conseil canadien pour la diversité administrative)

Le Parker Review, au Royaume-Uni, n’est peut-être pas assorti de mesures gouvernementales ou de lois, mais sa publication constitue un moment marquant.

Pour appuyer leur demande d’une plus grande diversité ethnique au sein des conseils d’administration du Royaume-Uni, ses auteurs notent les écarts prononcés entre le pourcentage de citoyens de couleur au Royaume-Uni (14 %) et leur représentation au sein des sociétés cotées au FTSE 100 (2 %). Au Canada, il existe un écart semblable en matière de minorités visibles, qui constituent jusqu’à 22,3 % de la population totale, alors qu’ils ne représentent que 4,5 % des administrateurs du FP500, selon les données de 2016 du Conseil canadien pour la diversité administrative.

En plus des avantages susmentionnés qu’offre un conseil d’administration plus inclusif, le rapport énumère plusieurs bénéfices externes des facteurs opérationnels clés qui s’appliquent également ici, plus particulièrement la possibilité de rehausser et de protéger la valeur de la marque, le repérage d’occasions, et la gestion et l’atténuation des risques liés à la chaîne d’approvisionnement.

Conclusion

De nos jours, on demande de plus en plus aux conseils d’administration de faire preuve de pensée audacieuse, liée à une plus grande prévoyance et à une plus grande prise de conscience. Après un démarrage lent, ils en sont venus à apprécier la valeur d’une plus grande représentation des femmes dans leurs rangs. Faire l’effort conscient d’élargir le bassin de talents afin d’y inclure les membres des minorités visibles et des nations autochtones canadiennes, ce qui refléterait davantage la population du pays, est une pratique aussi saine qu’appropriée.