La saison des procurations de 2021 sous la loupe

10 Mai 2021 6 MIN DE LECTURE

les sociétés canadiennes trouvent petit à petit un nouvel équilibre entre leurs assemblées des actionnaires virtuelles, l’augmentation de la divulgation au chapitre des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance et la renaissance d’un sentiment d’activisme chez les actionnaires après une année de quasi-dormance.

Les réunions virtuelles sont désormais chose courante

Les mesures de confinement mises en œuvre au début de la saison des procurations de 2020 ont fait en sorte que de nombreux émetteurs se sont tournés rapidement vers des solutions de rechange virtuelles pour la tenue de leurs assemblées. Une mosaïque de modifications législatives, d’ordonnances gouvernementales et des tribunaux prêts à accorder des allégements pour faciliter les assemblées exclusivement virtuelles a permis de contourner certaines des limitations juridiques auxquelles faisaient face certains émetteurs. Cette année, les émetteurs ont pu bénéficier de cette expérience et d’un délai supplémentaire de planification pour que la saison des procurations puisse reprendre une cadence normale. Or, une fois de plus, elle l’a fait dans un environnement virtuel. Avant l’année dernière, seul un nombre limité d’assemblées virtuelles avaient lieu au Canada. Cette année, plus de 420 des 905 émetteurs canadiens ayant déposé des circulaires de sollicitation de procurations entre le début du mois de février et la fin du mois d’avril ont déclaré qu’ils tiendraient, cette année, une assemblée virtuelle alors que plusieurs autres prévoient de tenir leur assemblée par téléphone ou par webémission avec une possibilité limitée ou inexistante pour les investisseurs de voter virtuellement lors de l’assemblée. Certains actionnaires institutionnels continuent de critiquer les assemblées entièrement virtuelles, parce que, à leur avis, il est plus difficile de poser des questions importantes et d’obtenir des réponses à celles-ci pendant l’assemblée. De nombreux émetteurs ont réagi cette année en fournissant une meilleure méthode de divulgation lors de leur assemblée virtuelle, surtout en ce qui a trait au processus compliqué de nomination et d’inscription des mandataires dans le contexte d’une assemblée de ce type. D’autres émetteurs ont amélioré la capacité des investisseurs à poser des questions avant l’assemblée, sur des lignes de téléconférence pendant l’assemblée et, dans certains cas, en publiant après l’assemblée des questions d’intérêt général qui n’ont pas été traitées lors de l’assemblée et leurs réponses sur le site Web de l’entreprise. Les émetteurs dont les investisseurs sont situés dans diverses régions ont utilisé le format virtuel pour joindre un plus grand nombre d’entre eux. Pour cette raison et pour d’autres, il est probable que le format conservera son importance, même lorsque les restrictions actuelles en matière de tenue de grands rassemblements auront été assouplies ou supprimées.

Nouveau point de mire : les facteurs ESG

La divulgation relativement aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans les circulaires a augmenté considérablement cette année. Cette augmentation suit la tendance à long terme de demandes formulées par des investisseurs et d’autres parties prenantes pour une divulgation accrue, une plus grande attention accordée aux règlements et l’intérêt des administrateurs de communiquer de tels renseignements. L’intérêt des parties prenantes au chapitre des facteurs ESG se reflète dans la nature des propositions d’actionnaires reçues cette année par les émetteurs au Canada. À ce jour, plus de 65 propositions d’actionnaires ont été reçues par des émetteurs canadiens assujettis, dont 22 se rapportent à des questions sociales, y compris la diversité et la santé et la sécurité des employé(e)s, 13 sont axées sur l’environnement ou les changements climatiques, 9 abordent l’objet social de la société et une proposait des mesures ESG en ce qui a trait à la rémunération. Bon nombre des questions posées par les actionnaires lors d’assemblées annuelles, en particulier celles d’institutions financières canadiennes, ont porté sur l’environnement, y compris le financement d’entreprises liées à des industries associées à l’émission de quantités élevées de carbone. Conformément à cette tendance, un nombre croissant d’émetteurs annoncent volontairement leur engagement à atteindre la carboneutralité. De nouvelles règles de la SEC concernant la divulgation de mesures ou d’objectifs importants en matière de capital humain liés au développement, à l’attraction, à la sécurité, à l’engagement et à la rétention des employés ont également commencé à influencer les pratiques canadiennes en matière de divulgation. Corporations Canada a publié les résultats de son examen de la conformité aux nouvelles exigences fédérales en matière de divulgation concernant la représentation des femmes, des minorités visibles, des peuples autochtones et des personnes handicapées au sein des conseils et de la haute direction, soulignant la nécessité d’une meilleure conformité à l’égard de cette exigence, en plus de la nécessité d’améliorer la représentation des groupes actuellement sous-représentés dans les rôles de leadership.

Un activisme renouvelé

En 2020, l’activisme chez les actionnaires était faible en raison de l’incertitude économique et de l’opinion selon laquelle les ouvertures militantes seraient perçues comme étant opportunistes au milieu de la cohue pour gérer les changements extraordinaires résultant de la pandémie mondiale et de ses impacts. Toutefois, un sentiment croissant de confiance dans l’économie encourage une activité militante accrue chez les actionnaires mécontents. Des dissidents ont lancé des démarches de sollicitation publique pour remplacer des administrateurs et ils se sont opposés, jusqu’à présent cette saison, à des transactions proposées par cinq émetteurs assujettis. D’autres émetteurs ont négocié un règlement avec un activiste potentiel avant que ce dernier n’ait entamé une campagne de sollicitation. Reste à voir si cela représente un retour à la normale ou le début d’une nouvelle vague d’activité. La saison des procurations de 2021 s’est fort bien adaptée à la « nouvelle normalité » en s’appuyant sur la technologie, un nouveau sentiment d’urgence en matière d’ESG et le retour d’un activisme des actionnaires normal ou possiblement plus engagé.

Cet article a d’abord été publié dans le Communiqué Sous la lentille de l’Institut des administrateurs de sociétés.