Balado de reportage

Une conversation avec Dion Madsen Une conversation avec Dion Madsen

6 juin 2025 69 MIN DE LECTURE
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Hôte

Chima Ubani

Associé, Sociétés émergentes et à forte croissance, Montréal


Invité

Dion Madsen

Partenaire chez Amplitude


Chima Ubani : Je m’appelle Chima Ubani, chef du groupe Création de fonds de capital de risque d’Osler et associé du groupe Sociétés émergentes et à forte croissance d’Osler. J’ai le plaisir d’accueillir Dion Madsen d’Amplitude Ventures pour cette brève causerie aujourd’hui. Avec une carrière qui s’étend du capital de risque à l’innovation d’entreprise, Dion compte plus de 25 ans d’expérience de travail avec de jeunes entreprises innovantes et de développement d’entreprises révolutionnaires. En tant qu’associé directeur et cofondateur d’Amplitude Ventures, il a joué un rôle déterminant dans la création et la croissance de la plateforme Amplitude. Avant de fonder Amplitude, Dion a mis sur pied ou dirigé des activités d’investissement au Fonds Soins de santé de BDC Capital, au Corporate Venture Fund d’Unilever et à Physic Ventures, et a occupé de nombreuses autres fonctions au sein de l’écosystème de l’investissement et de l’innovation. Dernier point, et non le moindre, Dion est aussi l’un des membres fondateurs du C100 et profondément engagé dans la promotion de l’innovation canadienne. Dion, merci de vous joindre à nous aujourd’hui.

Dion Madsen : Chima, merci pour l’invitation et merci à vous et à votre équipe d’avoir été un partenaire d’un tel soutien lors de notre dernier tour de financement. Permettez-moi de vous parler un peu d’Amplitude Ventures. Nous avons créé Amplitude en 2018 avec l’idée que l’innovation canadienne était vraiment fantastique et de classe mondiale, mais qu’elle n’était pas soutenue par un partenaire financier qui capturait vraiment la pleine valeur d’innovation de ce qui se passait ici dans les grandes universités canadiennes, comme McGill, l’Université de Toronto et UBC. Nous avions le sentiment que certaines stratégies d’investissement déployées aux États-Unis, en Europe et en Asie qui permettaient de créer d’excellentes entreprises de classe mondiale, nous ne les retrouvions pas au Canada. Nous nous sommes demandé pourquoi. Ce n’est pas que nous manquions d’innovateurs ou d’entrepreneurs, c’est que nous manquions d’un partenaire de soutien faisant affaire à l’échelle de ces autres investisseurs en capital de risque et ayant la vision nécessaire pour prendre ces entreprises, les développer et les transformer en sociétés ouvertes et en entreprises qui obtiennent de très bons résultats ou passent à l’échelle commerciale.

C’est à partir de cette idée que nous avons créé Amplitude. Nous gérons actuellement environ 500 millions de dollars provenant des plus grands investisseurs institutionnels du Canada, y compris de grands fonds de pension, comme la Caisse de dépôt, et de grandes institutions financières, comme la Banque Royale du Canada. Nous fonctionnons à partir de quatre bureaux principaux, dont trois qui sont situés dans les grands centres d’innovation que sont Vancouver, Toronto et Montréal. Nous avons également une division de capital de risque et de création d’entreprises, que nous avons lancée conjointement avec notre deuxième fonds, ici à Montréal, appelé Pre-Amp. Nous investissons dans des entreprises de médecine de précision, principalement dans le domaine thérapeutique, mais nous faisons aussi quelques investissements dans les technologies médicales et d’autres domaines, tout en cherchant à faire évoluer les entreprises à l’échelle mondiale et à en faire des entités compétitives de classe mondiale.

Chima Ubani : Très bien. Merci pour cette présentation. Pour en venir à la première question, nous sommes en 2025, à une époque intéressante sur le plan économique, social et politique, une époque intéressante en général. Pouvez-vous nous dire en quelques mots comment Amplitude envisage la situation pour elle-même en tant qu’entreprise et pour les sociétés de son portefeuille en général?

Dion Madsen : Oui. Je ne sais pas si, au milieu de l’année dernière, quelqu’un aurait pu prédire la situation dans laquelle nous nous trouvons. Les choses évoluent donc rapidement, mais l’environnement est étrange en ce moment. C’est un environnement où – normalement lorsque vous faites des prédictions sur les résultats, vous regardez la distribution normale des choses. Vous vous dites : « Bon, voici les résultats les plus probables et voici les résultats les moins probables », et ils se situent à l’une ou l’autre extrémité de la queue de cette distribution normale. Et j’ai l’impression que nous sommes dans un environnement où les gens regardent la situation actuelle et attribuent une probabilité presque égale à tous les résultats, même les plus inhabituels, car il est vraiment difficile de comprendre, dans l’environnement actuel, à quoi va ressembler l’environnement réglementaire, à quoi va ressembler l’environnement de l’inflation, à quoi va ressembler l’environnement économique. Pour cette raison, je pense que les investisseurs se retirent vraiment. Ils considèrent tous ces risques externes et se disent : « Nous ne voulons pas exposer nos portefeuilles à des risques supplémentaires, nous allons donc nous tourner vers des zones de sécurité. » Nous constatons donc que beaucoup plus d’investisseurs se retirent et conservent leurs liquidités pour l’instant, en attendant de voir comment les choses vont se régler, ou qu’ils se tournent vers des actifs beaucoup plus matures. Et cela a vraiment eu un impact sur les entreprises en phase de démarrage où il y a beaucoup de risques d’exécution, de risques scientifiques ou de risques concurrentiels. Nous assistons donc à un environnement dans lequel, il me semble, les investisseurs sont devenus globalement réticents à l’égard du risque.

Chima Ubani : Oui, c’est vraiment quelque chose à surveiller et nous verrons comment les choses continuent d’évoluer. Vous avez brièvement mentionné Pre-Amp. Pouvez-vous nous en dire un peu plus? Qu’est-ce que Pre-Amp exactement? Que fait Pre-Amp?

Dion Madsen : Oui, nous avons constaté qu’il y avait une lacune sur le marché canadien. Nous concentrons environ 70 % de nos activités d’investissement au Canada et 30 % à l’étranger. Nous ne voyions tout simplement pas d’entreprises qui ressemblaient au type d’entreprises dans lesquelles nous voulions investir – soit que la technologie n’était pas assez large, soit que les équipes de direction n’étaient pas correctement constituées. Nous avions l’impression qu’il s’agissait là de lourdes tâches à accomplir pour essayer de résoudre les problèmes qui devaient être résolus pour que l’entreprise puisse réellement se développer. Et nous avons pensé – en regardant quelques autres sociétés de capital de risque aux États-Unis, comme ARCH, Flagship, Atlas, qui créaient beaucoup d’entreprises en interne – qu’il y avait peut-être une meilleure façon de procéder. Nous avions notre idée sur les besoins du marché, compte tenu de toutes les entreprises que nous voyons et de tous les flux de transactions que nous observons.

Nous nous sommes dit que nous pourrions peut-être créer nos propres entreprises de cette manière et les faire ressembler au type d’entreprises dans lesquelles nous voulions investir et que nous pourrions les lancer à une certaine échelle. Ainsi, lorsque nous avons constitué notre deuxième fonds, nous avons formé un syndicat de commandités complémentaires qui pouvaient vraiment contribuer à cette accélération et nous permettre de lancer ces entreprises d’une manière beaucoup plus riche et efficace. Ensuite, nous avons créé la bourse Amplitude, qui nous permet de faire venir chaque année six à huit titulaires de doctorat et doctorants pour travailler avec nous et étudier les possibilités d’avenir, par exemple l’avenir de la biologie, l’avenir des différentes technologies qui pourraient vraiment résoudre certains des problèmes actuels dans la mise au point des médicaments. Dans le cadre de ce processus, nous formulons un certain nombre d’hypothèses et nous les étudions de manière approfondie.

Nous avons ensuite quatre employés à temps plein qui travaillent à transformer ces hypothèses en idées commerciales vraiment riches et solides. Nous finissons par investir dans les meilleures d’entre elles, ce qui nous a permis de mettre au point deux méthodes de création d’entreprises. La première est notre méthode traditionnelle, qui consiste à créer à partir de rien des entreprises porteuses de possibilités infinies. Nous avons récemment lancé Stereo, une entreprise qui développe une technologie de plateforme dans le domaine des nanorécepteurs de cellules T, que nous pensons être de classe mondiale et à la fine pointe du progrès. Notre deuxième méthode est ce que nous appelons la voie accélérée de création d’entreprises, c’est-à-dire que nous trouvons des entrepreneurs et des innovateurs qui ont de l’expérience, et nous mettons à profit toute l’expérience et les talents à notre disposition pour étoffer ce type d’occasions et lancer ces entreprises avec une équipe de direction à part entière. Et à cet égard, les résultats que nous avons obtenus ont été pas mal bons. Nous bâtissons actuellement une entreprise dans le domaine des conjugués anticorps-médicaments de prochaine génération, avec Ali Tehrani, l’un de nos associés, qui fait vraiment avancer les choses. Nous avons donc recours à différentes méthodes pour lancer des entreprises, et c’est ainsi qu’environ la moitié de notre portefeuille est constituée d’entreprises que nous créons nous-mêmes, que nous lançons ou que nous bâtissons conjointement avec des entrepreneurs.

Chima Ubani : C’est formidable. Donc, grâce à Pre-Amp et à la bourse, je veux dire, en termes de création d’entreprises, vous avez clairement couvert tous les stades de début de croissance d’une entreprise, et même les suivants. Vous faites également des investissements plus traditionnels dans des entreprises établies, qui se trouvent peut-être à un stade de croissance plus avancé. Y a-t-il des investissements ou des thèmes particulièrement intéressants que vous souhaitez mettre de l’avant dans ce domaine au sein de votre portefeuille?

Dion Madsen : L’autre moitié de notre portefeuille permet de l’équilibrer, car la création d’entreprises est une opération lourde et nous ne pouvons pas le faire pour l’ensemble du portefeuille. Nous essayons donc de trouver des entreprises arrivées à maturité et nous utilisons le volet international de notre portefeuille à cette fin. Nous avons investi dans quelques entreprises arrivées à maturité qui nous donnent une véritable idée de ce qui se passe au niveau de la réglementation, de la concurrence et du financement, et qui nous permettent de disposer d’un véritable réseau afin d’apporter des talents à certaines de nos entreprises à un stade moins avancé. Une société dans laquelle nous avons investi très tôt au moyen du deuxième fonds, Evommune, était dotée d’une équipe de direction que nous connaissions depuis longtemps et dont les membres avaient été à la tête de deux sociétés distinctes. La première, Dermira, avait été rachetée par Eli Lilly, et son équipe de direction s’était séparée d’elle avec quelques actifs de Lilly.

L’autre société, Kadmon, avec laquelle nous avions une certaine expérience, avait été rachetée par Sanofi. Les dirigeants de Kadmon ont rejoint ceux de Dermira pour former Evommune, qui avait déjà levé des capitaux. Nous sommes entrés en jeu au moment de son tour de série B, et cette entité se porte plutôt bien dans le domaine de l’auto-immunité et a récemment levé un tour de financement de transformation. Nous pensions qu’elle pourrait avoir l’occasion de réaliser un PAPE cette année. Cependant, je pense qu’à mesure qu’elle progresse dans son projet, il y a de très bonnes chances qu’elle réussisse à mettre ses produits sur le marché et à remporter un succès incroyable. Cela montre que, dans notre esprit, l’innovation est vraiment importante, mais que le plus important est de trouver d’excellentes équipes de direction avec lesquelles travailler et qui sont vraiment capables de mener les choses à bien.

Chima Ubani : C’est vrai. Très bien dit. Cela a certainement été une très bonne démonstration de la philosophie d’investissement de bout en bout, des tout premiers aux derniers stades de croissance. Je veux dire, ce fut une excellente causerie, j’aime toujours vous retrouver et écouter ce que vous avez à dire. Je tiens à vous remercier d’avoir pris le temps de venir nous parler aujourd’hui.

Dion Madsen : C’est un plaisir.

Chima Ubani : Je vous souhaite, à vous et à l’équipe d’Amplitude, le meilleur pour 2025 et les années suivantes.

Dion Madsen : Très bien. Merci, Chima. Merci à vous et à votre équipe. Merci.


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