Un tribunal américain jette un pavé dans la mare de la réglementation des cryptomonnaies

7 Sep 2023 1 MIN DE LECTURE

Une question impérative dans le secteur des cryptomonnaies est de savoir quand exactement un jeton devient une valeur mobilière. Une décision récente d’un tribunal américain dans l’affaire Ripple de la SEC pourrait potentiellement avoir une incidence sur la façon dont nous répondons à cette question au Canada, en particulier en ce qui concerne le critère du « contrat de placement ». L’absence d’une approche adoptée à l’échelle mondiale pour la création et le placement des cryptoactifs continue de brouiller les pistes dans le domaine des actifs numériques en constante évolution. 

Dans la vidéo ci-dessous, Matt Burgoyne, associé d’Osler et cochef du groupe de pratique Actifs numériques et chaînes de blocs, passe en revue la décision de la Cour de district et ce qu’elle pourrait signifier pour les entreprises canadiennes.

MATTHEW BURGOYNE : Bonjour, je suis Matthew Burgoyne, cochef du groupe Actifs numériques et chaînes de blocs chez Osler à Calgary.

Une question impérative dans le secteur des cryptomonnaies est de savoir quand exactement un jeton devient une valeur mobilière. Cette question concerne les émetteurs de jetons canadiens, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, la SEC aux États-Unis et, bien sûr, Binance et Coinbase, deux sociétés qui ont été récemment poursuivies par la SEC au motif qu’elles s’étaient livrées, entre autres, à des placements non enregistrés de jetons de sécurité. La récente décision d’un tribunal américain dans l’affaire Ripple de la SEC pourrait potentiellement avoir une incidence sur la manière dont nous répondons à cette question, en particulier en ce qui concerne le critère du « contrat de placement ».

Le critère du contrat de placement est un outil crucial permettant de déterminer si la manière dont un jeton est vendu constitue un placement de titre. Au Canada, la Cour suprême a décidé dans l’affaire Pacific Coin qu’un contrat de placement est formé lorsque tous les éléments suivants sont réunis, à savoir lorsqu’il y a eu :

  1. investissement d’argent,
  2. dans une entreprise commune,
  3. dans l’espoir de toucher un profit, et
  4. grâce, notamment, au labeur de tiers.

Le 13 juillet 2023, le tribunal de district des États-Unis a rendu une décision historique. Elle a déclaré que le jeton XRP de Ripple Labs constituait une valeur mobilière lorsqu’il était vendu à des investisseurs institutionnels, relevant ainsi de la surveillance de la SEC. Toutefois, lorsqu’il est vendu au grand public sur une bourse numérique ou via un algorithme de négociation, le jeton n’est pas considéré comme une valeur mobilière.

Le tribunal a estimé que les faits entourant la vente du jeton sont essentiels pour comprendre si le jeton constitue un contrat de placement, étant donné que le jeton [TRADUCTION LIBRE] « n’est pas en soi un ‘contrat, un mécanisme ou une opération’ qui intègre les exigences d’un contrat de placement ».

Les acheteurs institutionnels auraient raisonnablement pu s’attendre à ce que Ripple affecte le produit à l’écosystème XRP, ce qui aurait probablement entraîné une augmentation de la valeur du jeton, selon le tribunal.

Toutefois, ceux et celles qui ont acheté les jetons sur les bourses de cryptomonnaies ne savaient pas nécessairement si leurs paiements pour le XRP allaient à Ripple ou à un autre vendeur, car les bourses de cryptomonnaies utilisaient des algorithmes de négociation qui mettaient en relation les acheteurs et les vendeurs dans le cadre de transactions aveugles. Par conséquent, il n’y aurait pas nécessairement eu d’espoir de toucher un profit grâce, notamment, au labeur de Ripple.

Qu’est-ce que cela signifie pour les Canadiens et les Canadiennes?

Le verdict rendu dans l’affaire Ripple donne matière à réflexion aux autorités de réglementation et aux acteurs du marché canadiens. Si des principes similaires étaient appliqués au Canada, certains jetons vendus au public sur des bourses numériques par l’intermédiaire d’algorithmes de négociation pourraient ne pas être considérés comme des valeurs mobilières. En revanche, s’ils sont vendus à des investisseurs institutionnels avec la promesse que le produit de la vente sera affecté au développement de l’écosystème des jetons, ils pourraient être considérés comme des valeurs mobilières. Cela pourrait ouvrir la voie à une approche plus nuancée de la classification des cryptoactifs.

L’absence d’une approche cohérente, adoptée à l’échelle mondiale, pour la création et le placement des cryptoactifs oblige les autorités de réglementation à adapter au cas par cas les réglementations relatives aux cryptoactifs au régime traditionnel des marchés financiers.

Voici ce qu’il faut retenir :

  1. Les distributeurs de jetons canadiens devraient être prudents et demander des conseils juridiques avant d’entreprendre toute activité de placement de jetons, même si le placement a lieu à l’étranger.
  2. Soyez prêt à vous défendre contre l’argument selon lequel votre projet consiste à distribuer un contrat de placement. S’il existe un groupe ou une personne identifiable dont les efforts sont essentiels à la réussite ou à l’échec du projet, il est préférable d’obtenir un avis juridique. Les autorités canadiennes en valeurs mobilières surveillent de près le secteur, et les pénalités et sanctions en cas de non-conformité peuvent être lourdes.

Le groupe Actifs numériques et chaînes de blocs d’Osler peut vous guider dans ce paysage réglementaire inédit. N’hésitez pas à communiquer avec nous si vous avez des questions sur les lois sur les valeurs mobilières et sur la façon dont elles peuvent se répercuter sur votre entreprise dans le domaine des actifs numériques en constante évolution.