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L’ISSB publie des ébauches de propositions de communication de l’information relative à la durabilité et au changement climatique afin de recueillir les commentaires du public

Auteur(s) : Andrew MacDougall, Jennifer Fairfax, Neal Ross, Justin Sherman, John M. Valley et Patrick G. Welsh

Le 24 mai 2022

Les deux premières propositions de normes relatives à la durabilité de l’International Sustainability Standards Board (ISSB) ont été publiées pour une période de consultation publique, dont la date limite est le 29 juillet 2022. En raison de l’influence mondiale croissante de l’ISSB, ses normes sont susceptibles d’influer sur les normes d’information établies en vertu des lois canadiennes sur les valeurs mobilières. La proposition de norme d’information relative au changement climatique de l’ISSB exigerait une information en quantité beaucoup plus importante que celle demandée dans les propositions actuelles des Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les ACVM).

Les normes proposées par l’ISSB et les récentes propositions de règles sur l’information relative au changement climatique

Le 31 mars 2022, l’ISSB a publié deux propositions de normes mondiales d’information financière sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance, ou ESG. La première norme énonce les obligations générales proposées pour la communication de l’information financière relative à la durabilité. La deuxième norme présente les obligations proposées pour la communication de l’information relative au changement climatique. La période de consultation publique de ces propositions, appelées des « exposés-sondages », est en cours jusqu’au 29 juillet 2022.

L’exposé-sondage sur la communication de l’information relative au changement climatique fait suite à l’adoption :

  • du Projet de Norme canadienne 51-107 [PDF] sur l’information liée aux questions climatiques (Projet de Norme 51-107) publié par les ACVM à la fin de 2021, qui imposerait des obligations d’information sur les questions climatiques aux émetteurs assujettis canadiens;
  • du projet de règlements [PDF] publié par la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis le 21 mars 2022, qui obligerait les émetteurs américains nationaux et les émetteurs privés étrangers à inclure de l’information détaillée sur les questions climatiques dans les documents déposés auprès de la SEC et qui est soumis à une consultation sur la possibilité d’appliquer ces obligations aux émetteurs canadiens utilisant le régime d’information multinational.

Chaque projet de norme a été élaboré indépendamment. Toutefois, s’ils sont tous fondés sur les recommandations bien reconnues du Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GIFCC), ils divergent considérablement sur le plan des détails que l’on s’attend à trouver dans l’information. Les exposés-sondages de l’ISSB exigeraient de l’information beaucoup plus détaillée que le Projet de Norme canadienne 51-107, mais ne sont pas aussi lourds que la proposition de la SEC.

Qu’est-ce que l’ISSB?

La création de l’ISSB a été annoncée le 3 novembre 2021 par l’International Financial Reporting Standards (IFRS) Foundation. L’IFRS Foundation est une organisation d’intérêt public à but non lucratif, créée pour définir un ensemble unique de normes comptables et d’information liées à la durabilité reconnues dans le monde entier. À titre d’exemple, le Conseil des normes comptables du Canada exige que les entreprises ayant une obligation d’information du public utilisent les Normes internationales d’information financière dans la préparation de tous les états financiers intermédiaires et annuels.

Les commentaires reçus par l’IFRS Foundation en réponse à un document de consultation sur l’information relative à la durabilité publié en septembre 2020 ont mis en évidence la demande croissante et urgente de normes mondiales d’information relative à la durabilité. En réponse à ces commentaires, les administrateurs de l’IFRS Foundation ont créé l’ISSB en lui donnant le mandat de créer un plan de base mondial complet de normes d’information relative au développement durable et au changement climatique afin de fournir aux investisseurs et aux autres participants des marchés financiers de l’information sur les risques et les occasions relatifs à la durabilité et au changement climatique auxquels sont confrontées les entreprises. L’ISSB a des bureaux à Francfort (Allemagne) et à Montréal (Canada), et des bureaux régionaux supplémentaires sont proposés à San Francisco (États-Unis), à Londres (Royaume-Uni), à Pékin (Chine) et à Tokyo (Japon).

L’ISSB a été approuvé et soutenu par l’Organisation internationale des commissions de valeurs, qui compte parmi ses membres les commissions des valeurs mobilières de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, de l’Ontario et du Québec. L’IFRS a annoncé qu’elle s’efforcera de regrouper l’ISSB avec la Value Reporting Foundation, une organisation internationale composée de l’ancien International Integrated Reporting Council et du Sustainability Accounting Standards Board. À ce titre, l’ISSB a été reconnu comme le nouveau leader mondial en matière d’information sur la durabilité et le changement climatique.

Quel est l’objectif de l’exposé-sondage de l’ISSB sur les obligations générales d’information financière relative à la durabilité?

Le premier exposé-sondage énonce les obligations d’information financière liée à la durabilité (l’exposé-sondage sur les obligations générales). Les propositions de l’exposé-sondage sur les obligations générales obligeraient une entité à fournir de l’information importante sur l’ensemble des principaux risques et des principales occasions liés à la durabilité auxquels elle est exposée. Cette information est destinée à aider les utilisateurs de l’information financière à usage général d’une entité à évaluer la valeur de l’entreprise. L’importance relative est appréciée par rapport au caractère indispensable de l’information pour évaluer précisément la valeur de l’entreprise.

Selon l’exposé-sondage sur les obligations générales, l’information financière d’une entité relative à la durabilité doit employer la même approche d’entité consolidée que celle utilisée pour l’information financière de l’entité au titre des normes comptables. Par exemple, si l’entité présentant l’information est un groupe, les états financiers consolidés couvrent la société mère et chacune de ses filiales. Cette approche vise à garantir que l’information financière liée à la durabilité d’une entité permet aux investisseurs et aux autres parties prenantes d’évaluer avec précision la valeur et le risque de l’entreprise sur l’ensemble de la chaîne de valeur et de la structure opérationnelle d’une organisation. En outre, l’information financière liée à la durabilité serait publiée dans le cadre de l’information financière à usage général d’une entité et, par conséquent, serait communiquée en même temps que ses états financiers généraux.

L’exposé-sondage sur les obligations générales définit les grands principes de la communication de l’information financière liée à la durabilité. Il peut être considéré comme une rampe de lancement pour des exigences plus précises à l’avenir, comme les obligations plus détaillées d’information sur le changement climatique, qui sont énoncées dans le deuxième exposé-sondage (l’exposé-sondage sur le changement climatique).

Qu’exige l’exposé-sondage de l’ISSB sur l’information relative au changement climatique?

Le président de l’ISSB a noté que les obligations d’information liées au changement climatique sont une réponse au dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (qui a appelé à des « réductions immédiates et importantes des émissions dans tous les secteurs » afin de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C) et constituent une priorité urgente de l’ISSB. L’exposé-sondage sur le changement climatique vise à garantir que les participants au marché ont accès à l’information importante relative aux conséquences financières du changement climatique. Le cadre de l’information est généralement conforme aux recommandations du GIFCC, les obligations d’information étant axées sur la gouvernance, la stratégie, la gestion des risques et les mesures et objectifs.

  • Gouvernance  : L’émetteur serait tenu de décrire les processus, les contrôles et les procédures de gouvernance employés pour surveiller et gérer les risques et les occasions liés au changement climatique. Les émetteurs sont tenus d’indiquer comment la responsabilité des questions climatiques est répartie entre le conseil d’administration, les comités du conseil et la direction. De plus, les émetteurs seraient tenus de divulguer la manière dont le conseil d’administration s’assure que les aptitudes et les compétences nécessaires existent pour superviser les risques et les occasions liés au changement climatique.
  • Stratégie : L’émetteur devrait communiquer sa stratégie pour faire face aux risques et aux occasions importants liés au changement climatique et la résilience de cette stratégie dans les scénarios de changement climatique. Les émetteurs seraient également tenus de divulguer la manière dont ils réagissent directement à ces risques et occasions, comme les modifications de leurs modèles d’entreprise, de leurs stratégies et de la répartition de leurs ressources, ainsi que le déploiement d’objectifs de réduction des émissions et les mesures de compensations carbone. Concrètement, l’exposé-sondage sur le changement climatique exigerait que les émetteurs réalisent une « analyse de scénario », décrivant la résilience de la stratégie de l’organisation, en prenant en considération différents scénarios de changement climatique, comme un scénario dans lequel un réchauffement de 2 °C est atteint.
  • Gestion des risques : L’exposé-sondage sur le changement climatique exigerait un résumé des processus par lesquels l’émetteur détermine, évalue et gère les risques et les occasions liés au changement climatique. Les émetteurs seraient tenus de décrire les risques et les occasions importants liés au changement climatique pour leurs modèles d’entreprise et leurs chaînes de valeur sur des horizons à court, à moyen et à long terme. Les émetteurs seraient également tenus de décrire leurs processus d’établissement, d’évaluation et de hiérarchisation des risques liés au changement climatique, ainsi que la manière dont ce processus est intégré à la procédure globale de gestion des risques de l’organisation.
  • Mesures et objectifs : L’exposé-sondage sur le changement climatique exigerait la divulgation des mesures employées par l’organisation pour évaluer les risques et les occasions liés au changement climatique, ainsi que la communication des mesures propres au secteur de l’émetteur, dérivées des normes du SASB. Conformément aux orientations du GIFCC, l’exposé-sondage sur le changement climatique exige l’utilisation du Protocole sur les gaz à effet de serre pour divulguer les émissions de gaz à effet de serre (GES) des champs d’application 1, 2 et 3. Contrairement au Projet de Norme 51-107, les émetteurs seraient tenus de déclarer les émissions du champ d’application 3 (qui couvrent les émissions de GES en amont et en aval), bien que l’entité puisse exclure certaines émissions de GES si elle explique pourquoi. Les émetteurs devraient également décrire les objectifs utilisés pour gérer les risques et les occasions liés au changement climatique, la comparaison de l’objectif aux objectifs créés dans le cadre du dernier accord international sur le changement climatique, et si l’objectif a été validé par un tiers, ainsi que les progrès réalisés sur chaque objectif.

En quoi les exposés-sondages de l’ISSB diffèrent-ils des autres propositions en ce qui concerne l’information sur le changement climatique?

Il y a deux différences principales :

  1. Contrairement au Projet de Norme 51-107, les exposés-sondages de l’ISSB exigeraient que les émetteurs réalisent une « analyse de scénario », décrivant la résilience de leur stratégie commerciale dans divers scénarios climatiques, y compris un scénario dans lequel le réchauffement de 2 °C est atteint.
  2. Les exposés-sondages de l’ISSB exigeraient également la divulgation de l’information sur les émissions de GES des champs d’application 1 et 2, alors que la Norme 51-107 permettrait aux émetteurs de choisir entre la divulgation ou l’explication des raisons pour lesquelles les données sur les émissions de GES ont été omises. La norme de l’ISSB n’autoriserait l’exclusion des émissions du champ d’application 3 que si la raison de cette omission est expliquée.

Bien que les exposés-sondages de l’ISSB exigent de l’information allant au-delà de celle qu’exige le Projet de Norme 51-107, ils sont moins normatifs que les projets de règles de la SEC à plusieurs égards. En particulier, les règles proposées par la SEC demandent des renseignements supplémentaires dans la déclaration des émissions de GES, comme un « rapport d’attestation sur les GES » pour les émissions des champs d’application 1 et 2, exigeant un aperçu des méthodologies utilisées pour faire le suivi des émissions et une attestation de l’exactitude des émissions déclarées.

Prochaines étapes pour les émetteurs

La création et le mandat de l’ISSB ont reçu un large soutien. Il est possible que les exposés-sondages incitent les ACVM à envisager d’autres révisions du Projet de Norme 51-107. De plus, si un nombre suffisant de pays appuient les versions définitives des normes de l’ISSB, les ACVM pourraient envisager d’adopter les normes d’information de l’ISSB pour les appliquer aux émetteurs canadiens.

Les émetteurs et les investisseurs sont encouragés à commenter les exposés-sondages de l’ISSB. La période de consultation publique est ouverte jusqu’au 29 juillet 2022. L’ISSB a ajouté des questions précises pour les répondants dans chaque exposé-sondage et a invité les répondants à commenter certaines questions ou toutes les questions. Les réponses peuvent être données par lettre de commentaires adressée à l’ISSB ou au moyen des sondages publiés par l’ISSB pour l’exposé-sondage sur les obligations générales et l’exposé-sondage sur le changement climatique.