Passer au contenu

Plan Nord – Le nouveau régime de redevances minières du Québec

Auteur(s) : François Paradis, Hugo-Pierre Gagnon

9 mai 2013

Le 6 mai 2013, après une longue attente, le gouvernement du Québec a dévoilé son régime de redevances minières et d’impôt minier dans un document intitulé « Un nouveau régime d’impôt minier équitable pour tous », que vous pourrez lire en cliquant ici.

Le 13 mars dernier, après la publication par le gouvernement du Québec de son document de consultation initial, Osler avait déjà publié un communiqué sur le nouveau régime d’impôt minier et de redevances minières. Comme nous l’avions signalé à ce moment-là, le gouvernement proposait l’adoption d’un régime de redevances hybride comprenant une redevance de 5 % selon la valeur du minerai extrait (ad valorem) et une taxe supplémentaire sur les profits, laquelle pourrait être calculée sur la marge de profit d’une mine en fonction, selon le cas : (i) d’un taux augmentant avec la rentabilité de la mine (c.-à-d., taxation progressive) ou (ii) de l’imposition des « superprofits » selon un taux fixe de 30 %.

Après un processus de consultation qui s’est caractérisé par des critiques soutenues et une absence de consensus, le gouvernement du Québec a réduit les attentes dans les semaines précédant son annonce du 6 mai 2013, en laissant entendre que le nouveau régime serait le résultat d’un « compromis » entre les différents intervenants du secteur minier ayant des intérêts concurrents. Finalement, le nouveau régimemet effectivement en œuvre des redevances nettement plus élevées que le régime actuel, mais nettement moins que ce qui était prévu au départ.

Le nouveau régime

Tel qu’envisagé dans le document de consultation, le nouveau régime consistera en un régime hybride de redevances comportant une taxe minimale d’exploitation sur la valeur du minerai extrait et un impôt minier progressif calculé sur les profits tirés d’une mine. Les sociétés minières paieront soit l’impôt minier minimum, soit l’impôt progressif sur les profits miniers, selon le taux le plus élevé qui s’applique.

En ce qui concerne l’impôt minier minimum, toutes les sociétés minières qui font l’extraction de minerai au Québec devront verser une redevance à un taux fixé à 1 % de la valeur totale de la production à la tête du puits de chaque mine exploitée inférieure ou égale à 80 millions de dollars, calculée sur une base annuelle, taux qui augmente à 4 % pour chaque dollar au-delà du seuil de 80 millions de dollars. La valeur de la production à la tête du puits à l’égard d’une mine est déterminée en fonction de la valeur brute de la production annuelle de la mine, moins (i) les dépenses engagées pour les activités de concassage, de broyage, de tamisage, de traitement, de manutention, de transport et d’entreposage de la substance minérale provenant de la mine, y compris les activités de commercialisation, (ii) les dépenses générales et administratives qui se rapportent à ces activités, (iii) une allocation pour amortissement des biens utilisés dans les activités d’exploitation minière à partir du premier site d’accumulation de la substance minérale après sa sortie de la mine, et (iv) une allocation pour traitement.

En ce qui concerne l’impôt minier sur le profit, le gouvernement du Québec a opté pour une structure de taux progressifs qui aura la même assiette d’imposition que le régime actuel : le taux est calculé sur la marge bénéficiaire d’une mine sur la base d’un taux qui augmentera avec la rentabilité de cette dernière. Le taux effectif de cet impôt sur le profit minier commencera au taux actuel de 16 % pour les sociétés minières qui ont une marge bénéficiaire de 35 % ou moins, et il passera à 17,8 % pour les sociétés minières ayant une marge de 35 % à 50 %, et il pourrait atteindre 22,9 % pour les sociétés minières dont la marge bénéficiaire dépasse 50 %. La marge bénéficiaire sera calculée en fonction du bénéfice d’exploitation divisé par le total de la valeur brute de la production annuelle de l’ensemble des mines de l’exploitant. Par conséquent, plus la marge de profit d’une société minière sera élevée, plus l’impôt minier sera élevé.

L’impôt minier minimum payé par toutes les sociétés minières peut être reporté et appliqué à l’encontre de l’impôt minier sur le profit futur sous la forme d’un crédit d’impôt minier minimum non remboursable, ce qui réduit la charge fiscale pour les sociétés minières.Cependant, l’utilisation des montants reportés sera limitée annuellement de façon à ce que les entreprises paient toujours un montant d’impôt minier sur le profit équivalent à l’impôt minier minimum calculé pour cet exercice.

Le gouvernement du Québec estime que le total des recettes générées par ce nouveau régime de redevances s’élèvera à 370 millions de dollars en redevances minières en 2015, et entre 770 millions et 1,8 milliard de dollars au cours des 12 prochaines années, ce qui représenterait une augmentation d’environ 15 % à 30 % par rapport à l’ancien régime. Cela dit, les nouveaux taux de redevances minières sont inférieurs à ceux qui avaient été initialement proposés par le gouvernement du Québec dans sa plateforme électorale et dans son document de consultation.

Réforme de la Loi sur les mines du Québec

Le gouvernement du Québec a également annoncé que la Loi sur les mines du Québec sera modifiée pour mieux protéger l’environnement et améliorer la transparence des activités minières.

Par exemple, la garantie financière exigée des entreprises minières serait augmentée de 70 % à 100 % des coûts de restauration des sites miniers, et la délivrance d’un bail minier serait soumise à l’obtention des autorisations environnementales préalables en conformité avec les procédures prévues dans la Loi sur la qualité de l’environnement du Québec. Il est également proposé d’inclure un système de divulgation de l’information pour que chaque société minière soit tenue de rendre public le montantd’impôt minier et de redevances minières payé chaque année et de déclarer l’information concernant la quantité de minerai extrait.

Il a été rapporté dans la presse qu’un projet de loi modificatif serait déposé à l’Assemblée nationale avant la fin de la session en cours, mais qu’il ne serait pas adopté avant l’automne 2013 au plus tôt.

Mesures pour favoriser la transformation du minerai au Québec

Le gouvernement du Québec mettra également en œuvre des mesures visant à favoriser le développement des ressources minérales et la transformation du minerai au Québec par (i) le renforcement des incitatifs en faveur de la transformation de minerai au Québec, et (ii) la fourniture d’un soutien direct aux investissements dans la transformation en agissant sur leur financement et sur les tarifs d’électricité.

Le gouvernement du Québec augmentera l’allocation pour le traitement (i) de 3 % quand une société minière effectue uniquement des opérations de concentration (incluant les activités de fonte et d’affinage de l’or et de l’argent), l’allocation passant alors de 7 % à 10 %, et (ii) de 7 % quand une société minière effectue des activités de transformation au Québec (fonte, affinage, production de poudre métallique et de billettes), l’allocation passant alors de 13 % à 20 %. Le maximum de l’allocation pour traitement passera de 55 % à 75 % du bénéfice annuel d’une mine. Cette allocation pour le traitement permettra de réduire les profits miniers à des fins fiscales en accordant un rendement sur les actifs de traitement du minerai dans la province de Québec. Ces mesures viennent s’ajouter à deux mesures déjà en place : (i) un congé fiscal de dix ans pour les grands projets d’investissement, et (ii) un crédit d’impôt à l’investissement relatif au matériel de fabrication et de transformation.

D’autres mesures sont envisagées par le gouvernement du Québec pour promouvoir la transformation locale du minerai au Québec, telles  (i) l’acquisition de participations dans des projets prévoyant la transformation de minerai au Québec, par l’entremise du fonds Capital Mines Hydrocarbures, qui a été créé pour favoriser une plus grande transformation des ressources québécoises, et (ii) l’octroi de blocs d’électricité à taux préférentiel pour certains projets miniers.

Conclusion

Après plusieurs études, débats et consultations, le gouvernement a officiellement mis en place un régime de redevances plus élevées pour les sociétés minières actives au Québec, qui devront maintenant payer une redevance minimale. Il se déclare certain d’avoir trouvé le bon équilibre entre les intérêts en jeu des différents acteurs et estime avoir proposé un régime de redevances qui est équitable pour tous. Néanmoins, il est clair que tous les acteurs du marché n’en sont pas convaincus. Ce nouveau régime de redevances minières et d’impôt minier doit entrer en vigueur au début de 2014.

Il est intéressant de noter que le gouvernement du Québec a renouvelé son appui au développement du Nord du Québec le 7 mai 2013, le lendemain de l’annonce de son nouveau régime d’impôt minier, en dévoilant un plan d’investissements futurs dans le territoire situé au nord du 50e parallèle entre 2013 et 2018, s’élevant à un total de 870 millions de dollars, par le « Fonds du développement nordique », afin de financer l’infrastructure publique.

Si vous avez des questions ou souhaitez discuter du sujet abordé dans ce bulletin Actualités, n’hésitez pas à communiquer avec Ward Sellers, François Paradis ou Hugo-Pierre Gagnon.