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L’OCRCVM publie des Lignes directrices révisées sur les sanctions

Auteur(s) : Lawrence E. Ritchie, Lia Bruschetta, Henry Ngan

10 février 2015

Le 13 janvier 2015, l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) a publié des Lignes directrices révisées sur les sanctions et des Politiques du personnel connexes, qui entrent en vigueur le 2 février 2015. Ces deux documents avaient été publiés initialement pour commentaires le 6 novembre 2013.

Les Lignes directrices révisées sur les sanctions remplacent toutes les versions antérieures des Lignes directrices sur les sanctions disciplinaires des courtiers membres et des Lignes directrices sur les sanctions disciplinaires dans le cadre des Règles universelles d’intégrité des marchés (RUIM), et, avec les Politiques du personnel, elles fournissent aux parties intéressées un énoncé clair des principes généraux et des facteurs clés relatifs à la détermination des sanctions.  

Modifications pertinentes

Il est à noter que, dès l’entrée en vigueur de ces lignes directrices, il n’y aura plus de règles « inflexibles » d’établissement des amendes imposées aux membres qui ont contrevenu aux Règles des courtiers membres ou aux RUIM : les Lignes directrices révisées sur les sanctions ne comportent pas d’exigences minimales en matière d’amendes ni de fourchettes d’amendes prescrites, comme le faisaient les lignes directrices antérieures, car leur approche est fondée sur les principes. Selon l’OCRCVM, l’abandon de lignes directrices propres aux différentes contraventions à la réglementation permettra de dissiper l’idée fausse selon laquelle les décisions relatives aux sanctions sont basées sur des formules et prises au moyen d’une « liste de vérification », et renforcera le principe voulant que les sanctions appropriées soient déterminées au cas par cas.

De plus, la prise en compte de la coopération y a été expressément intégrée en tant que facteur pertinent dans le cadre de l’examen des allégations de contraventions possibles aux règles et d’enquêtes à leur égard Les Lignes directrices révisées sur les sanctions et les Politiques du personnel connexes présentent l’approche de l’OCRCVM dans la prise en compte de la coopération lorsqu’il s’agit de déterminer des sanctions. Même si l’organisme de réglementation établit clairement que les cas de conduite « fautive grave » méritent une sanction sévère, malgré la coopération d’un intimé, dans la majorité des cas, il semble que la coopération serait un facteur atténuant. Cela dit, l’OCRCVM a indiqué dans ses Politiques du personnel que, compte tenu de l’exigence générale voulant que les intimés offrent leur coopération dans le cadre des enquêtes de l’OCRCVM, seul un dossier établissant une assistance « proactive et exceptionnelle » sera considéré comme un facteur atténuant. Ainsi que nous l’énonçons au point 8, ci-dessous, l’OCRCVM a fourni des critères qui peuvent être pris en compte pour déterminer si une entreprise ou un particulier satisfait aux normes minimales de coopération.

Principes de détermination des sanctions

La Partie I des Lignes directrices révisées sur les sanctions énonce les principes applicables à l’imposition de sanctions dans toutes les procédures disciplinaires de l’OCRCVM :

  1. Les sanctions disciplinaires sont de nature préventive et doivent viser à protéger le public investisseur, à renforcer l’intégrité du marché et à améliorer les normes et pratiques professionnelles générales. Les sanctions doivent être suffisamment lourdes pour empêcher et décourager l’intimé d’avoir une conduite fautive à l’avenir (la dissuasion spécifique) et pour dissuader les autres d’avoir une conduite fautive similaire (la dissuasion générale). Les sanctions imposées doivent être proportionnées à la conduite examinée et similaires aux sanctions imposées aux intimés pour des contraventions similaires dans des circonstances similaires. Les sanctions doivent être réduites ou augmentées en fonction des facteurs atténuants ou aggravants pertinents. De plus, les Politiques du personnel de l’OCRCVM précisent que les mesures de mise en application de l’OCRCVM correspondent à sa mission de protection de l’intérêt public; ainsi, ce n’est que dans des circonstances exceptionnellement rares que la prise de mesures disciplinaires internes éliminerait la nécessité de prendre des mesures disciplinaires formelles.
  2. Les sanctions disciplinaires doivent être plus sévères dans le cas de l’intimé qui a des antécédents disciplinaires. Un antécédent disciplinaire relatif à une contravention similaire ou identique constitue une forte indication que les sanctions antérieures n’ont pas été suffisamment dissuasives, de sorte qu’il faut des sanctions plus fortes pour assurer la dissuasion spécifique.  
  3. Dans le cas de contraventions multiples, les sanctions totales ou cumulatives doivent correspondre de façon appropriée à la conduite fautive d’ensemble. Il peut être approprié de recourir à une approche globale lorsque l’imposition d’une sanction pour chaque contravention pourrait entraîner l’imposition à l’intimé de sanctions cumulatives excessives.  
  4. Les sanctions doivent faire en sorte que l’intimé ne tire pas d’avantage financier de sa conduite fautive. Les sanctions doivent comprendre la remise des avantages financiers obtenus, tels que les profits, commissions, honoraires, autres rémunérations ou autre avantage reçus par l’intimé, directement ou indirectement, par suite de sa conduite fautive.  
  5. Il faut envisager la suspension dans les cas suivants : il y a eu une ou plusieurs contraventions graves; les contraventions supposent une conduite fautive frauduleuse, délibérée ou téméraire; l’intimé a un schéma de conduite fautive, ou a des antécédents disciplinaires; ou encore, la conduite fautive en question a causé un certain préjudice aux investisseurs ou une certaine atteinte à l’intégrité du marché ou au secteur des valeurs mobilières dans son ensemble. De plus, les Politiques du personnel de l’OCRCVM précisent qu’en règle générale, l’OCRCVM ne demande pas de suspension d’une durée supérieure à cinq ans, à moins que la conduite fautive soit si grave qu’elle appelle une interdiction permanente. Autrement dit, toute conduite fautive justifiant une suspension d’une durée supérieure à cinq ans entraînera purement et simplement une interdiction permanente dans le secteur.
  6. Il faut envisager l’interdiction permanente dans les cas suivants : la conduite fautive comporte un élément d’activité criminelle ou quasi criminelle; il y a des motifs de croire qu’on ne peut faire confiance à l’intimé pour ce qui est d’agir avec honnêteté et loyauté; ou encore, les contraventions ont causé une atteinte considérable à l’intégrité du marché ou au secteur des valeurs mobilières. Par ailleurs, les Politiques du personnel de l’OCRCVM prévoient que dans les cas graves, une amende et la remise des avantages financiers doivent être envisagées, même si une interdiction permanente est imposée.
  7. L’incapacité de paiement n’est un facteur à prendre en compte en vue d’imposer des sanctions pécuniaires ou des frais appropriés que si l’intimé la soulève. Cependant, les difficultés financières ne devraient pas être considérées comme un facteur prédominant ou déterminant.
  8. Une assistance proactive et exceptionnelle fournie par l’intimé à l’OCRCVM dans le cours de son enquête est prise en considération dans la détermination des sanctions appropriées. Dans sesPolitiques du personnel, l’OCRCVM a précisé que la prise en compte de la coopération est appropriée dans les cas où cette coopération est proactive et exceptionnelle, rendant ainsi possible de mener à bien des enquêtes plus rapidement, en utilisant moins de ressources. Toutefois, le poids qui sera accordé à la coopération variera en fonction de la gravité des circonstances; dans certains cas, les objectifs généraux des sanctions exigent une sanction sévère, même si l’intimé a fourni une coopération proactive et exceptionnelle. Les Politiques du personnel de l’OCRCVM fournissent quelques exemples de facteurs qui peuvent être pris en compte lorsque l’organisme de réglementation évalue la coopération d’un intimé : le décèlement rapide et détaillé, par soi-même, d’une conduite fautive soupçonnée ou non découverte; des examens internes détaillés, dont les résultats sont aussitôt communiqués au personnel de l’OCRCVM; la mise à disposition d’éléments de preuve ou de témoignages de personnes non soumises à la compétence de l’OCRCVM; et le fait que la coopération a mené à une résolution rapide de l’affaire.
  9. Les sanctions correctives adaptées à la conduite fautive particulière peuvent être un outil utile pour sanctionner efficacement une conduite fautive. Reconnaissant qu’il n’existe pas d’approche « universelle », l’OCRCVM fournit quelques exemples de sanctions qui peuvent être imposées, dont le fait d’exiger du membre qu’il engage un consultant indépendant qualifié pour élaborer ou mettre en œuvre des procédures visant à améliorer la conformité future à la réglementation.

La Partie II des Lignes directrices révisées sur les sanctions illustre les principes énoncés en fournissant une liste non exhaustive de 21 facteurs clés à prendre en compte pour déterminer les sanctions appropriées.

Évaluation de l’incidence des Lignes directrices révisées sur les sanctions 

N’étant plus contraints d’appliquer des amendes minimales prescrites ou des fourchettes de sanctions, les formations disciplinaires et le personnel affecté aux règlements de l’OCRCVM bénéficient d’un pouvoir discrétionnaire accru en matière de sanctions. Tant les règlements négociés que les audiences disciplinaires de l’OCRCVM des mois à venir devront être examinés de près en vue de déterminer l’incidence de ces lignes directrices révisées dans des cas pratiques.

De plus, les Lignes directrices révisées et les Politiques du personnel connexes soulignent l’importance de la gestion anticipée du risque et de l’intervention stratégique en période de crise. La coopération « proactive et exceptionnelle », qui va au-delà de la pleine coopération dans le cadre d’enquêtes et au-delà du fait de fournir l’information requise dans les délais opportuns, nécessite une préparation soignée et des actions réfléchies, ce qui devrait inciter les firmes susceptibles de faire face à d’éventuelles sanctions réglementaires à recourir à des experts du secteur très tôt au cours du processus, pour faciliter les enquêtes, les examens internes ou les vérifications indépendantes de la conformité.