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L’OCDE publie un rapport qui confirme que les accords hors procès représentent le principal mode de répression des affaires de corruption transnationale

Auteur(s) : Lawrence E. Ritchie, Stéphane Eljarrat, Malcolm Aboud, , Julien Hynes-Gagné

Le 27 mars 2019

Le 20 mars 2019 se tenait à Paris la septième édition du forum mondial sur l’intégrité et la lutte anticorruption de l’Organisation de coopération et de développement économiques (« OCDE »). Entre autres choses, l’OCDE y présentait et diffusait un rapport intitulé « La résolution des affaires de corruption transnationale au moyen d’accords hors procès » (le « Rapport »).

Le Rapport offre des statistiques révélatrices relatives à l’utilisation des mécanismes d’accord hors procès dans le cadre des actions répressives menées depuis l’entrée en vigueur de la Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales (la « Convention »). Le Rapport souligne entre autres que les accords hors procès sont devenus le principal mode de répression des infractions économiques graves, telles que l’infraction de corruption d’agents publics étrangers.

Ainsi, depuis l’entrée en vigueur de la Convention, 78 % des affaires de corruption transnationale (soit 695 sur 890) des pays étudiés ont mené à un mécanisme de résolution hors procès. Au Canada, le Rapport recense au moins trois cas de résolution hors procès ayant mené à des sanctions à l’égard de personnes morales en relation avec la corruption d’agents publics étrangers.

Le Rapport recense également les constats suivants : 

  • Le nombre d’accords hors procès multijuridictionnels est en hausse importante, vu la collaboration accrue des membres de l’OCDE;
  • Bien que la possibilité d’une sanction monétaire diminuée soit l’un des principaux attraits des accords hors procès :
    • la façon dont la sanction est diminuée en pratique varie énormément entre les pays membres de la Convention. Le Rapport recense plusieurs mécanismes, dont l’existence dans certains régimes d’une « sanction maximale » pouvant être obtenue dans le cadre d’un accord hors procès et l’existence dans d’autres régimes de mécanismes de réduction en pourcentage de la sanction. Le Rapport recense des sanctions variant à ce titre d’un franc suisse, jusqu’à 3,23 milliards de dollars U.S.;
    • le Rapport recense tout de même que les plus hautes sanctions monétaires ont été, et de loin, imposées dans le cadre d’accords hors procès – sachant que la plus haute sanction imposée dans le cadre d’un procès au fond s’établit à ce jour à environ 29 millions de dollars U.S. en dollars constants. Cet état de fait s’expliquerait entre autres par le fait que les accords hors procès peuvent permettre à des sociétés d’éviter certaines conséquences encore plus sévères, comme l’exclusion de contrats ou la cessation de leurs activités.
  • La mise sur pied en septembre 2018 par le Canada d’un régime d’accord de poursuite différée (désigné dans la législation canadienne comme un « accord de réparation ») (inspiré de régimes existant en Grande-Bretagne et aux États-Unis), va dans le même sens en permettant dans certaines circonstances aux personnes morales de rapporter et résoudre certains crimes économiques spécifiques (incluant la corruption) sans être condamnées. Le Rapport souligne que les accords hors procès ont eu l’effet de rééquilibrer les pouvoirs entre les autorités chargées de l'application de la loi et les entreprises délinquantes par un pouvoir de négociation élargi par rapport à celui que l’on retrouve dans le contexte d'un procès.

Le Rapport, publié 20 ans après l’entrée en vigueur de la Convention, montre que le défi auquel font face les pays de l’OCDE pour lutter contre la corruption transnationale demeure entier. À ce titre, le Rapport met en évidence que les accords hors procès (incluant entre autres le nouvel accord de réparation canadien) sont devenus un outil central à la répression des infractions économiques graves.

The English version of this article is available here.