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La Cour suprême de la Colombie-Britannique accorde le rejet sommaire d’une action collective sur le prix du carburant

Auteur(s) : Tommy Gelbman, Sean Sutherland et Andrew Duran

Le 14 mars 2022

Le 3 mars 2022, le juge Milman de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, dans l’affaire Pantusa c. Parkland Fuel Corporation, a rejeté sommairement une action collective proposée contre les cinq plus grands vendeurs en gros d’essence de la Colombie-Britannique. Le demandeur avait allégué un complot en common law, des infractions à la Loi sur la concurrence et une tarification déraisonnable de l’essence en gros en vertu de la Business Practices and Consumer Protection Act (BPCPA) qui, selon le demandeur, avait engendré des prix de détail de l’essence anormalement élevés pour les consommateurs de la Colombie-Britannique depuis 2015.

Le juge Milman a conclu qu’il n’y avait pas de question litigieuse, concluant que les allégations de complot n’étaient pas étayées, que la conduite alléguée ne constituait pas une pratique déloyale en vertu de la BPCPA et que la Cour n’avait aucun rôle à jouer dans la réglementation des prix de l’essence.

Contexte

Le 21 mai 2019, le Cabinet de la Colombie-Britannique a demandé à la British Columbia Utilities Commission (BCUC) d’enquêter sur les facteurs influençant les prix de l’essence et du diesel dans la province depuis 2015. Plus tard cette année-là, la BCUC a publié ses conclusions selon lesquelles, entre autres :

  • les cinq plus grands vendeurs en gros d’essence en Colombie-Britannique se fient au prix au comptant du Nord-Ouest du Pacifique comme prix de référence ;
  • l’essence provenant de Nord-Ouest du Pacifique représente les 3 à 5 % les plus chers du marché de gros de l’essence ; et
  • depuis 2015, la différence de prix de l’essence au détail en Colombie-Britannique par rapport aux marchés voisins (Ouest canadien et Seattle) a inexplicablement augmenté (la prétendue « différence inexpliquée »).

S’appuyant sur les conclusions de la BCUC, le représentant proposé du demandeur, M. Pantusa, a intenté une action collective putative, alléguant que les défendeurs (Parkland Fuel Corporation, Suncor Energy Inc., Imperial Oil Limited, Shell Canada et Husky Energy Inc.) avaient systématiquement surfacturé le prix de l’essence à leurs clients grossistes depuis 2015 en s’appuyant sur le prix au comptant du Nord-Ouest du Pacifique et en facturant une « différence inexpliquée », ce qui avait ensuite eu une incidence sur les prix de l’essence au détail. Le demandeur a allégué que ces deux pratiques enfreignaient les dispositions en matière d’iniquité de la BPCPA et a cherché à représenter un groupe composé de millions de Britanno-Colombiens qui avaient acheté de l’essence au détail pour un usage personnel, familial ou domestique depuis 2015. Le demandeur a également affirmé que les défendeurs, par le biais de divers comportements allégués, s’étaient engagés dans un complot de common law et avaient enfreint la loi fédérale sur la concurrence.

Les défendeurs ont demandé un rejet sommaire, et le juge Milman a accepté d’entendre la demande de rejet sommaire en même temps que la demande de certification.

La Cour a accordé un jugement sommaire

Le juge Milman a conclu qu’il n’y avait pas de question litigieuse et, par conséquent, a accordé un jugement sommaire. Il a ensuite conclu que, puisqu’il n’y avait pas d’autres demandes en cours, il n’y avait pas d’action collective proposée à certifier.

Ce faisant, le juge Milman a confirmé d’importantes limites à la doctrine de l’iniquité en vertu de la BPCPA, notamment :

  • Une opération effectuée par un consommateur n’est pas inadmissible simplement parce que les vendeurs dans un marché oligopolistique peuvent facturer plus qu’ils ne le feraient dans un marché plus concurrentiel. Une telle conclusion étendrait la doctrine de l’iniquité à des segments de l’économie qui ne sont pas parfaitement concurrentiels.
  • La fixation de prix de référence n’est pas une pratique intrinsèquement déraisonnable.
  • La Cour n’assumera pas le rôle d’organisme de réglementation des prix en vertu de la BPCPA. Ces questions relèvent de l’ordre public et doivent être examinées par le gouvernement.

Incidences

Cette décision est la dernière d’une série de décisions de la Colombie-Britannique rejetant des actions collectives proposées à un stade précoce (ou refusant la certification), soulignant l’utilité potentielle d’une demande de jugement sommaire tout au début d’une action collective putative.

En outre, la décision confirme plusieurs limites importantes à la doctrine de l’iniquité. La Cour n’utilisera pas volontiers la doctrine de l’iniquité pour deviner les décisions indépendantes en matière de prix prises par des entreprises averties. La doctrine de l’iniquité vise à protéger les individus contre les négociations déraisonnables, et non à réglementer les prix.