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Placement au cours du marché dans le cadre du Régime d’information multinational (RIM)

Auteur(s) : Rob Lando, Jason Comerford

Le 30 avril 2018

Comment mobiliser facilement des capitaux sur une bourse américaine grâce au RIM

Un programme de placement au cours du marché est peut-être le bon moyen de réunir des capitaux propres rapidement et à peu de frais, en particulier pour les sociétés canadiennes inscrites à la cote d’une bourse américaine qui sont admissibles au régime 

Un placement au cours du marché est un mode de mobilisation de capitaux selon lequel un courtier vend les actions d’une société directement sur le marché par l’intermédiaire d’une bourse, au cours en vigueur.

Les placements au cours du marché sont devenus très répandus aux États-Unis. Ils offrent aux sociétés un moyen d’ajouter des capitaux propres dans leur bilan tout en ayant une incidence moins grande sur le cours qu’un appel public à l’épargne ou un placement privé classique. Les ventes de nouvelles actions sont échelonnées et imprévisibles de sorte que la dilution est modérée et que les investisseurs n’ont pas la possibilité de vendre à découvert en prévision d’une baisse du cours, contrairement à ce qui se passe dans le cas des autres types d’opérations de placement. En un sens, un placement au cours du marché présente une image inversée d’une offre publique de rachat dans le cours normal des activités ou d’un programme de rachat d’actions sur le marché. Les entreprises ont recours à une offre publique de rachat dans le cours normal des activités lorsqu’elles disposent d’un excédent de liquidités qu’elles veulent utiliser pour réduire la quantité d’actions en circulation sans procéder à une offre publique de rachat ou à une offre publique d’achat en bonne et due forme pour racheter leurs actions. En revanche, les entreprises peuvent recourir à un placement au cours du marché pour vendre peu à peu des actions sur le marché lorsqu’elles ont besoin de liquidités supplémentaires et souhaitent réunir des capitaux propres en vendant de nouvelles actions. Une fois qu’un programme de placement au cours du marché a été mis sur pied, l’entreprise peut s’en prévaloir dans un court délai, sans que la direction y consacre beaucoup de temps et d’effort puisque l’opération ne nécessite ni présentations ni rencontres individuelles avec des investisseurs. De plus, le coût associé à la mobilisation de capitaux additionnels dans le cadre d’un placement au cours du marché est, règle générale, bien inférieur à celui d’un placement de titres classique, car les commissions versées aux courtiers participants sont en général beaucoup plus abordables.

Aux États-Unis, une entreprise qui souhaite procéder à un placement au cours du marché fera affaire avec un ou plusieurs courtiers en valeurs mobilières pour créer un programme assujetti à une convention de placement, selon laquelle les courtiers conviendront de vendre des actions sur le marché pour le compte de l’entreprise, à titre de mandataires (sans prise de risque) ou de contrepartistes (les courtiers achetant eux-mêmes les actions dans un premier temps, et les revendant ultérieurement sur le marché). Les actions mises en vente sur le marché doivent être inscrites en vertu de la loi américaine sur l’émission de valeurs mobilières de 1933 (Securities Act), ce qui signifie que la société doit avoir déposé une déclaration d’inscription préalable portant sur les ventes périodiques de ses actions, ou produire un nouveau prospectus. Les sociétés américaines qui sont des émetteurs établis bien connus, qui ont toujours suivi les règles de déclaration et qui disposent d’un flottant de plus de 700 millions de dollars américains peuvent déposer une déclaration d’inscription préalable dont la prise d’effet est automatique. Les autres entreprises qui répondent aux critères d’admissibilité pour déposer une déclaration d’inscription préalable peuvent également mettre sur pied un placement au cours du marché, mais elles doivent subir le processus d’examen de la Securities and Exchange Commission (SEC) pour faire approuver la déclaration d’inscription qu’elles déposent en vertu de la loi de 1933. Une fois que la déclaration d’inscription préalable a été mise en place, la société produira un supplément de prospectus décrivant le programme de placement au cours du marché. La société pourra alors demander aux courtiers participants d’activer à leur gré les ventes sur le marché.

Les programmes de placement au cours du marché gagnent aussi en popularité au Canada, mais comportent davantage d’aspects complexes. Une société canadienne qui veut vendre des actions à la Bourse de Toronto, sur une autre place boursière ou dans un autre marché au Canada doit déjà avoir déposé un prospectus préalable de base portant sur les ventes périodiques de ses actions auprès des organismes de réglementation des valeurs mobilières canadiens, ou déposer un nouveau prospectus. En vertu des règles canadiennes sur le dépôt de prospectus préalables de base, le prix de souscription d’un titre mis en vente aux termes d’un prospectus préalable de base doit généralement être indiqué dans le supplément de ce prospectus, ce qui n’est pas possible dans un programme de placement au cours du marché parce qu’une fois le programme activé, les actions sont vendues sur le marché aux cours en vigueur, qui sont variables. Les règles canadiennes comportent cependant une exemption relative aux programmes de placement au cours du marché : une société peut vendre jusqu’à 10 % de la valeur marchande globale de ses titres en circulation dans le cadre d’un programme de placement au cours du marché, cette valeur étant mesurée à la fin du mois qui précède le début du programme. Malgré cette exemption, les sociétés canadiennes qui veulent se prévaloir d’un programme de placement au cours du marché au Canada doivent présenter aux organismes de réglementation des valeurs mobilières canadiens une demande de dispense de l’obligation de remettre une copie du prospectus préalable de base et du supplément de prospectus à chaque acheteur d’actions dans le cadre du programme de placement au cours du marché, car il est impossible de répondre à cette exigence type dans ce contexte. Les entreprises doivent également obtenir la dispense de l’obligation de divulguer aux acheteurs les droits et les recours réglementaires qu’ils auraient si le prospectus contenait de fausses déclarations, et les droits de retrait réglementaires qui permettent habituellement aux acheteurs de titres aux termes d’un prospectus de se retirer de la convention d’achat jusqu’à deux jours après la réception d’un prospectus. Les organismes de réglementation canadiens sont généralement disposés à accorder toutes ces exemptions, mais les formalités de demande exigent du temps et occasionnent des frais. De plus, il est d’usage que les organismes de réglementation canadiens imposent une condition selon laquelle les ventes de titres aux termes d’un placement au cours du marché au Canada ne représentent pas plus de 25 % du volume quotidien d’opérations de la société. Les organismes de réglementation demandent également aux sociétés de préparer et de déposer des rapports mensuels spéciaux portant sur ses ventes de titres dans le cadre du programme de placement au cours du marché.

Le RIM offre aux entreprises canadiennes qui sont déjà inscrites à la cote d’une bourse américaine ou qui songent à le faire la possibilité d’utiliser les règles canadiennes applicables aux prospectus préalables de base pour créer un programme de placement au cours du marché en vue de la vente d’actions sur une bourse américaine, sans recours à une dispense réglementaire au Canada et sans obligation de subir un examen de la SEC. Une fois inscrite à la cote d’une bourse américaine, toute société canadienne pourra se prévaloir du RIM pour créer un programme de placement au cours du marché afin de vendre des actions sur cette place boursière, à la condition d’avoir produit des rapports au Canada depuis au moins un an et de disposer d’un flottant d’au moins 75 millions de dollars américains pour ses titres de capitaux propres. L’entreprise peut procéder comme suit :

  • Déposer un prospectus préalable de base canadien pour rendre admissible la vente de ses titres de capitaux propres au Canada en application des règles canadiennes relatives aux prospectus préalables de base, sous réserve de la limite de 10 % de la valeur marchande globale de ses actions en circulation.
  • Produire une déclaration d’inscription correspondante au RIM pour inscrire ses titres en vertu de la loi de 1933.
  • Faire affaire avec un ou plusieurs courtiers en valeurs mobilières des États-Unis pour établir une convention de placement portant sur les ventes périodiques de titres au cours du marché à la Bourse de New York, à la bourse NASDAQ ou sur d’autres places boursières américaines ou dans d’autres marchés, comme elle le ferait dans le cadre d’un programme américain type de placement au cours du marché, et préparer et déposer un supplément de prospectus préalable de base décrivant le programme de placement au cours du marché.
  • Éviter d’avoir à présenter une demande de dispense aux organismes de réglementation canadiens concernant les exigences canadiennes liées aux prospectus ainsi qu’à la divulgation des droits d’action et des droits de retrait qui s’appliquent aux ventes de valeurs mobilières au Canada, si toutes les ventes dans le cadre du programme de placement au cours du marché sont conclues exclusivement aux États-Unis.
  • Activer le programme en vue de vendre des actions sur le marché américain, en tout temps et périodiquement, pendant la période de 25 mois au cours de laquelle le prospectus préalable de base sera valide et disponible en application des règles canadiennes sur les prospectus préalables de base.

Il est toutefois important de se rappeler que les ventes conclues dans le cadre d’un programme de placement au cours du marché n’en sont pas moins des ventes de titres inscrits, assujetties aux dispositions relatives à la responsabilité de la loi de 1933, et que les courtiers participants voudront observer toutes les procédures et les mesures de précaution qu’ils respecteraient ordinairement dans le cadre d’un placement de titres inscrits aux États-Unis. Les courtiers participants effectueront un contrôle diligent et s’attendront à recevoir des lettres d’accord présumé des auditeurs de la société, et des « opinions 10b-5 » (des lettres comportant l’expression d’une assurance de forme négative) de conseillers juridiques. En règle générale, si le programme est prolongé, le contrôle diligent sera mis à jour périodiquement. Même si la société vend des actions sur le marché dans le cadre d’un programme de placement au cours du marché, elle doit aussi tenir compte des implications de ce placement, par exemple son incidence potentielle sur la capacité des analystes de publier des recherches et les éventuelles restrictions imposées sur les achats de titres par la société ou des personnes affiliées.

La vente de titres par une société comporte toujours des coûts et des aspects complexes, mais le RIM offre une occasion intéressante aux sociétés canadiennes inscrites à la cote d’une bourse américaine d’établir un programme de placement au cours du marché en vue de la vente d’actions aux États-Unis, sans qu’elles soient tenues de demander aux organismes de réglementation canadiens les dispenses obligatoires pour effectuer un placement au cours du marché au Canada.