Passer au contenu

Prêts transfrontaliers au Canada : ce que vous devez savoir

Auteur(s) : Joyce Bernasek et Malcolm Peck-McQueen

Le 2 mai 2022

Alors que la mondialisation des opérations commerciales et des services financiers continue de s’accélérer, malgré les restrictions imposées depuis le début de la pandémie de COVID-19, les prêts bilatéraux et syndiqués présentant des caractéristiques structurelles transfrontalières sont de plus en plus répandus. Comme l’a récemment indiqué la Banque des règlements internationaux, les créances transfrontalières des banques ont augmenté de 228 milliards de dollars américains au troisième trimestre de 2021, soit une hausse de 3 % par rapport à 2020[1]. Dans cet article, nous discutons de certaines questions canadiennes clés qui peuvent présenter un intérêt pour les prêteurs et les emprunteurs qui mènent des opérations de prêt ayant un lien avec le Canada (p. ex., un emprunteur canadien, des garants canadiens ou des garanties situées au Canada).

Aperçu des opérations sécurisées canadiennes

De nombreux prêteurs et emprunteurs étrangers connaissent le régime des opérations sécurisées énoncé à l’article 9 du Uniform Commercial Code (UCC) aux États-Unis. Dans chacune des neuf provinces de common law et dans chacun des trois territoires du Canada, les opérations sécurisées sont régies par une loi sur les sûretés mobilières (LSM) qui est largement semblable à l’UCC et qui s’en inspire. À l’instar des UCC adoptés par chaque État américain, les LSMP varient légèrement entre les provinces et les territoires, mais sont pour la plupart harmonisées entre les différents territoires. Les prêteurs et les emprunteurs étrangers constateront donc que la conclusion d’un prêt transfrontalier avec une partie prenante canadienne devrait être assez comparable à la conclusion d’une opération de prêt aux États-Unis, mais nécessitera la prise en compte, entre autres, des questions propres au Canada abordées ci-après.

Soulignons, cependant, que la nature bijuridique du système juridique canadien exige de s’intéresser en particulier à la province de Québec. Contrairement aux provinces et territoires de common law régis par une LSM, c’est le droit civil québécois, et en particulier le Code civil du Québec, qui régit les opérations sécurisées au Québec. Cet article ne vise pas à discuter du droit civil québécois de façon exhaustive, mais nous abordons ci-dessous certains éléments clés du droit québécois.

Questions liées à l’opposabilité des sûretés

Questions liées au conflit de lois

Les règles en matière de conflit de lois énoncées par les LSM n’ont pas été harmonisées avec la règle simple de l’UCC, qui impose que le droit applicable soit celui du lieu où se trouve « l’organisation enregistrée » du débiteur, selon laquelle un débiteur est réputé être situé dans son territoire de constitution et selon laquelle un état de financement UCC-1 ne doit être déposé que dans ledit territoire. La LSM prévoit plutôt que la validité, l’opposabilité et l’effet de l’opposabilité ou de l’inopposabilité des sûretés sur les biens (et des sûretés possessoires sur certains autres biens matériels grevés) sont régis par la loi du ressort où se trouve le bien grevé au moment où la sûreté le grève. En ce qui concerne les sûretés sur les biens immatériels et sur les biens qui sont de l’équipement ou des stocks et d’un type normalement utilisé dans plus d’un territoire, les règles de conflit des LSM désignent le lieu où se trouve le débiteur. Toutefois, les LSM n’ont pas toutes adopté la règle de l’UCC fixant le lieu où se trouve le débiteur (à savoir, un débiteur est réputé être situé dans son territoire de constitution). Alors que des provinces importantes sur le plan commercial comme l’Ontario et la Colombie-Britannique ont harmonisé leurs règles de détermination de l’emplacement du débiteur avec l’UCC au cours des dernières années, d’autres provinces comme l’Alberta et la Nouvelle-Écosse utilisent encore la règle du principal établissement ou du siège social pour déterminer l’emplacement d’un débiteur. Ces critères s’appliquent au cas par cas, car ces LSM ne contiennent pas de définitions de « principal établissement » ou de « siège social ».

C’est pourquoi les prêteurs doivent effectuer des vérifications diligentes relatives à la LSM et enregistrer les états de financement en application de la LSM dans toute province ou tout territoire où se trouve le bien matériel grevé d’un débiteur. Les prêteurs doivent également accorder une attention particulière aux diverses règles des LSM sur le lieu où se trouvent les débiteurs afin de s’assurer que tous les états de financement ont été enregistrés et que toutes les autres mesures d’opposabilité requises ont été prises dans les territoires concernés. Toutefois, lorsque la valeur de la garantie d’une partie à un prêt canadien dans un territoire donné est minime, les emprunteurs cherchent souvent à négocier des exemptions de certaines obligations liées à l’opposabilité en fonction de certains seuils (p. ex., qu’aucune opinion de l’avocat-conseil local sur l’opposabilité ne soit requise dans un territoire donné tant que la valeur de la garantie dans ce territoire n’a pas dépassé un seuil précis).

Opposabilité de la garantie en espèces

La garantie en espèces sous forme de comptes de dépôt est l’une des formes les plus répandues de garantie dans le cadre d’un prêt garanti. Toutefois, contrairement à l’UCC, les LSM ne prévoient pas de méthode pour rendre une sûreté opposable par maîtrise des comptes de dépôt. En vertu de la LSM, les comptes de dépôt ne constituent pas une catégorie distincte de garantie. Ils relèvent plutôt de l’une ou l’autre catégorie de « comptes » et de « biens immatériels », ou bien des deux[2]. Puisque les comptes de dépôt ne peuvent faire l’objet de sûretés possessoires, la seule méthode pour les rendre opposables en vertu de la LSM consiste à enregistrer un état de financement par rapport au débiteur/titulaire du compte. Cette pratique diffère grandement de celle de l’UCC, qui comporte généralement une convention de contrôle sur les comptes de dépôt (DACA) tripartite entre le débiteur/titulaire du compte, le prêteur et l’institution de dépôt, dans laquelle l’institution de dépôt accepte de se conformer aux instructions du prêteur.

Bien que les DACA ne soient pas exigées pour rendre opposables les sûretés en vertu de la LSM, des ententes de compte à accès restreint (BAA) substantiellement identiques aux DACA typiques des États-Unis sont couramment obtenues en ce qui concerne les comptes de dépôt canadiens afin de permettre au prêteur d’exercer un contrôle pratique (mais non juridique) sur ces comptes. La LSM n’imposant pas de BAA aux fins d’opposabilité, il se peut que les institutions de dépôt tierces au Canada soient moins susceptibles de conclure de telles ententes. Par conséquent, il est parfois recommandé aux emprunteurs de satisfaire à toute exigence imposant de présenter une BAA relative aux comptes de dépôt canadiens en faisant les efforts nécessaires sur le plan commercial. Cependant, notamment pour les prêts adossés à des actifs, où les comptes admissibles et les produits en espèces sont des éléments essentiels de la garantie, il est généralement nécessaire de présenter des BAA.

En 2015, le Québec a modifié son Code civil afin de faciliter l’opposabilité des sûretés sur les garanties en espèces d’une manière semblable à l’opposabilité par maîtrise en vertu de l’UCC. Des propositions visant à apporter des changements semblables à la LSM de l’Ontario ont été faites par le passé, mais le gouvernement de l’Ontario n’a pas encore entrepris de réformes de la LSM pour répondre à ces propositions.

Questions supplémentaires liées à la garantie

Garantie au Québec

Lorsqu’une transaction comporte une garantie située au Québec ou une partie à un prêt québécoise, la garantie sera généralement prise en vertu du droit civil du Québec. L’équivalent en droit civil d’une sûreté au sens de la LSM est une « hypothèque » au sens du Code civil du Québec. L’hypothèque est un droit réel sur un bien, meuble ou immeuble, affecté à l’exécution d’une obligation et est accordée en vertu d’un acte d’hypothèque, l’équivalent en droit civil d’un contrat de sûreté. L’hypothèque fonctionne comme une sûreté au sens de la LSM et confère au créancier le droit de suivre le bien en quelques mains qu’il soit et d’exercer des droits hypothécaires (p. ex., prendre le bien en paiement des obligations garanties ou le faire vendre sous contrôle de justice). Tout comme la LSM, le Code civil du Québec prévoit la publication des hypothèques (l’équivalent en droit civil de l’enregistrement d’un état de financement) au Registre des droits personnels et réels mobiliers du Québec (le RDPRM). Dans le cas où il y aurait plusieurs hypothèques, la priorité est généralement déterminée par la date et l’heure de la publication. Le Code civil du Québec prévoit le concept d’agent de garantie pour les prêts syndiqués au moyen de la nomination d’un « fondé de pouvoir » aux termes de la convention de prêt. Le fondé de pouvoir agit au nom des autres parties garanties en ce qui concerne l’hypothèque du Québec.

Toutefois, malgré les similitudes conceptuelles entre les hypothèques du Québec et les sûretés des LSM, il existe des différences pratiques dont les prêteurs et les emprunteurs doivent avoir connaissance. Premièrement, contrairement à un contrat de sûreté en vertu de la LSM, un acte d’hypothèque ne peut garantir des avances futures d’un montant indéterminé. Au contraire, l’hypothèque ne peut garantir qu’une somme déterminée en dollars canadiens. Puisque cette somme ne peut être modifiée, elle doit être suffisante pour garantir les obligations décrites dans l’acte d’hypothèque (c’est-à-dire, les obligations en capital, les intérêts, toute obligation de couverture garantie applicable, les frais et dépens). En pratique, les prêteurs font donc souvent preuve de prudence et stipulent une somme supérieure au capital des facilités, surtout si l’accord de prêt envisage des augmentations futures des facilités (p. ex., une disposition d’accordéon). La pratique du marché consiste à calculer le montant de l’hypothèque en ajoutant environ 20 % au montant total des facilités de crédit. Si les facilités ne sont pas libellées en CAD, le montant est généralement ajusté pour tenir compte des fluctuations monétaires (p. ex., pour les facilités en USD, 150 % en CAD du montant de la facilité en USD). Les emprunteurs qui n’ont jamais eu affaire à une garantie québécoise sont souvent, dans un premier temps, surpris de voir que le montant de l’hypothèque est supérieur aux facilités de crédit. Toutefois, ils n’ont pas à s’inquiéter : le créancier garanti, dans l’exercice de ses droits hypothécaires, ne peut faire valoir que le montant réel des obligations dues, quel que soit le montant indiqué dans l’acte d’hypothèque.

Lorsqu’un acte d’hypothèque est requis, les emprunteurs et les prêteurs devront connaître les exigences en matière de signature propres au Québec. Un acte d’hypothèque consenti en faveur d’un fondé de pouvoir (c’est-à-dire, un agent de garantie) doit être signé par le fondé de pouvoir et le concédant en personne devant un notaire québécois, à peine de nullité. Comme cela n’est pas pratique pour les signataires éventuellement situés dans d’autres territoires, le fondé de pouvoir et le concédant concerné autoriseront généralement leurs avocats-conseils québécois respectifs à signer l’acte d’hypothèque en leur nom. Dans le cas du fondé de pouvoir, l’autorisation peut prendre la forme d’une procuration limitée, et le concédant concerné inclura généralement cette autorisation dans ses résolutions standard approuvant l’ensemble de l’opération de prêt. Le notaire du Québec exigera cette preuve d’autorisation afin de procéder à la signature en personne.

Puisqu’un acte d’hypothèque ne peut pas être « publié » (c.-à-d. enregistré) en le déposant au RDPRM avant sa signature, si un acte d’hypothèque est une condition préalable à la conclusion d’un prêt, les résolutions d’autorisation applicables devront être adoptées suffisamment longtemps avant la conclusion pour que les avocats du Québec aient le temps d’organiser la signature devant le notaire du Québec et de déposer l’acte d’hypothèque au RDPRM[3]. Dans le cadre de financements d’acquisition où le conseil d’administration de préconclusion des parties au prêt accordant l’hypothèque sera remplacé à la conclusion de l’opération et où ce sera le conseil de post-conclusion qui autorisera la garantie, il est typique que l’acte d’hypothèque québécois soit plutôt un livrable de post-conclusion.

Garanties particulières en vertu de la Loi sur les banques

En plus des sûretés prévues par la législation provinciale sur les sûretés mobilières (les LSM), l’article 427 de la Loi sur les banques fédérale prévoit un régime spécial de prise de garanties par les banques canadiennes visées à l’annexe I et les filiales de banques étrangères visées à l’annexe II sur des actifs précis de certains types d’emprunteurs (y compris les fabricants et les agriculteurs). La garantie en vertu de la Loi sur les banques ne peut être donnée que par l’emprunteur, et non pas par un tiers (par exemple, un garant). Par conséquent, les recherches de garanties en vertu de la Loi sur les banques sont des recherches de privilèges standard dans le cadre des vérifications diligentes menées au Canada qui viennent s’ajouter aux recherches en vertu des LSM.

Lorsqu’il est possible de prendre une garantie en vertu de la Loi sur les banques, il convient de noter qu’il s’agit d’un processus distinct qui est pratiquement toujours entrepris en même temps que la prise d’une sûreté standard en vertu d’une LSM (c.-à-d., un accord de sûreté et des enregistrements en vertu d’une LSM).

La garantie prévue par la Loi sur les banques est accordée aux termes de formulaires prescrits, plutôt que d’un accord de garantie personnalisé. Les formulaires sont énoncés dans le Règlement sur l’enregistrement des garanties particulières des banques. Il s’agit des suivants :

  • Préavis
    • Le préavis est déposé auprès du bureau de la Banque du Canada situé dans la province où l’emprunteur a son établissement ou, s’il y en a plusieurs, son siège social.
    • L’enregistrement d’un préavis est valable pendant cinq ans, mais les banques doivent envoyer à la Banque du Canada des avis annuels énumérant tous les préavis dont l’expiration est prévue cette année-là et que la banque souhaite conserver au cours des périodes d’un an subséquentes.
  • Garantie particulière
    • Cession de biens créant la sûreté particulière en vertu de la Loi sur les banques.

La sûreté en vertu de la Loi sur les banques fonctionne comme un transfert de propriété de la garantie à la banque. Elle confère aux prêteurs faisant des prêts adossés à des actifs en particulier un avantage potentiel sur les propriétaires des emprunteurs, puisqu’un propriétaire ne pourra pas exercer ses droits de saisie sur ces garanties après le transfert de propriété. Toutefois, la jurisprudence a limité la valeur de la garantie en vertu de la Loi sur les banques à l’encontre d’autres créanciers garantis. Les prêteurs bancaires qui peuvent prendre une garantie en vertu de la Loi sur les banques prendront donc une garantie et la parferont en vertu à la fois de la Loi sur les banques et de la LSM.

Mise en gage des titres d’une SRI

Les sociétés à responsabilité illimitée (SRI)[4] sont une particularité des lois sur les sociétés par actions de certaines provinces[5]. Généralement constituées pour des raisons de structuration fiscale, les SRI présentent un risque pour les prêteurs qui prennent un gage sur leurs actions, car les actionnaires des SRI ont une responsabilité illimitée relativement aux obligations de la SRI. Un prêteur prenant une garantie d’un actionnaire d’une SRI voudra donc s’assurer que le gage ou la sûreté ne fait pas à lui seul du prêteur un actionnaire et que, dans une situation d’exécution, il ne deviendra pas un actionnaire sans action expresse de la part du prêteur. La prise d’une sûreté et la possession physique de certificats d’actions d’une SRI assortis d’un pouvoir de transfert d’actions ne devraient généralement pas avoir pour conséquence de transformer un prêteur en actionnaire. Toutefois, il est courant qu’un contrat de sûreté générale, un contrat de gage, un grèvement d’actions ou tout autre document de sûreté similaire attestant un grèvement d’actions de la SRI comprenne une clause visant la SRI qui limite la possibilité pour un prêteur d’obtenir des droits traditionnels des actionnaires (par exemple, l’inscription du prêteur en tant qu’actionnaire dans le registre des actionnaires de la SRI, les droits de vote ou le droit de recevoir des dividendes) sans action positive de la part du prêteur.

Divulgation en vertu de la Loi sur l’intérêt

Lorsque les intérêts d’un contrat de crédit sont payables à un taux pour une période de moins d’un an, l’article 4 de la Loi sur l’intérêt fédérale exige la divulgation expresse du taux d’intérêt annuel équivalent dans un contrat de crédit. Si une telle divulgation n’est pas incluse, il sera interdit au prêteur de facturer des intérêts supérieurs à 5 % par an. Cette question est particulièrement pertinente pour les prêteurs dont les facilités sont soumises à des taux flottants qui sont calculés sur une période de 360 ou 365 jours. Pour éviter les lourdes conséquences de l’omission de la divulgation en vertu de la Loi sur l’intérêt, on inclut souvent une clause relative au calcul du taux annuel équivalent stipulant que le taux annuel équivalent de tout taux calculé sur la base d’une période inférieure à une année civile est égal à ce taux multiplié par le nombre réel de jours dans l’année civile applicable et divisé par la période applicable qui est inférieure à une année civile. En 2018, la Cour d’appel de l’Ontario a confirmé que cette formule, qui produit un taux annuel nominal plutôt qu’un taux annuel effectif, est suffisante pour fournir un taux « équivalent » aux fins de la Loi sur l’intérêt[6].

Fusions canadiennes c. fusions américaines

En particulier en ce qui concerne les financements d’acquisitions transfrontalières, les prêteurs et les emprunteurs étrangers doivent être conscients d’une caractéristique unique de la pratique canadienne en matière de fusions et acquisitions qui a des conséquences sur la documentation relative aux prêts canadiens. Alors qu’en vertu des lois américaines sur les sociétés, comme la General Corporation Law du Delaware, l’une des sociétés fusionnées survit après la fusion, le concept de « fusion » n’existe pas sous cette forme au Canada. Au contraire, les fusions de sociétés en vertu des lois canadiennes sur les sociétés par actions donnent lieu à la prorogation d’une nouvelle société fusionnée (Amalco) qui est une entité juridique distincte. [7] Dans la fameuse affaire R. c. Black & Decker Manufacturing Co, la Cour suprême du Canada a statué qu’une société fusionnée est semblable à « la rivière qui part du confluent de deux cours d’eau ». Pour protéger les créanciers des sociétés antérieures à la fusion, les lois provinciales sur les sociétés prévoient expressément que les biens de chaque société fusionnée continuent d’être la propriété d’Amalco et que cette dernière continue d’être responsable des obligations de chaque société fusionnée[8].

Cependant, du point de vue des documents relatifs au prêt, il est courant qu’une fusion de parties canadiennes à un prêt exige la présentation d’une partie ou de la totalité des éléments suivants :

  • un accord de confirmation/réaffirmation d’Amalco dans lequel Amalco confirme qu’elle est liée par les obligations (c’est-à-dire les emprunts, les garanties et/ou les sûretés) des sociétés antérieures à la fusion
  • les états de modification du financement à l’égard de tout enregistrement en vertu des LSM existant à l’encontre des sociétés fusionnées
  • tout avis juridique concernant Amalco
  • les nouveaux certificats de participation pris en gage et les pouvoirs de transfert au nom d’Amalco

Dans les cas de financement d’acquisition où des fusions post-clôture des parties canadiennes au prêt sont envisagées (comme la fusion d’une société d’acquisition à vocation spécifique avec la cible), ces livraisons seront généralement documentées comme des obligations post-clôture à l’intérieur d’une période donnée.

Questions relatives à l’application de la loi

Avis en vertu de l’article 244 : période d’attente de 10 jours

L’article 244 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) fédérale limite la capacité d’un créancier garanti à mettre à exécution sa garantie au Canada. En plus de l’exigence de la common law d’accorder au débiteur un délai raisonnable pour payer toute demande avant de mettre à exécution la garantie, établie dans la décision fondamentale de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Lister c. Dunlop,[9] l’article 244 prévoit un préavis minimum de 10 jours qu’un créancier garanti doive donner avant de mettre à exécution la garantie (y compris par la nomination d’un séquestre) sur la totalité ou la quasi-totalité des stocks, des débiteurs ou des autres biens d’une personne insolvable qui ont été acquis ou utilisés dans le cadre d’une entreprise exploitée par la personne insolvable[10]. La personne insolvable peut consentir à une exécution anticipée, mais seulement après avoir reçu l’avis prescrit. Si le créancier garanti craint que les actifs du débiteur soient menacés avant l’expiration de la période de préavis de 10 jours, il peut demander au tribunal de nommer un séquestre intérimaire en vertu de l’article 243 de la LFI.

Un séquestre nommé en vertu de la LFI est un séquestre « national » ayant compétence partout au Canada. Cependant, au Québec, où il n’existe pas de dispositions supplémentaires dans la loi provinciale portant sur la nomination d’un séquestre, le Code civil du Québec impose des restrictions supplémentaires à la nomination d’un séquestre en vertu de la LFI. La Cour d’appel du Québec a statué que pour qu’un séquestre national puisse être nommé en vertu de la LFI à l’égard de biens situés au Québec, le créancier garanti doit également se conformer aux dispositions du Code civil du Québec concernant l’exercice d’un droit hypothécaire (c’est-à-dire, l’émission et l’expiration d’un avis de 20 jours pour les biens meubles ou de 60 jours pour les biens immeubles)[11].

Devise prévue dans le jugement

Lorsqu’une partie canadienne à un prêt est partie à un document de prêt ou qu’il existe d’autres obligations susceptibles d’être exécutées devant un tribunal canadien, une clause standard de conversion de la devise prévue au jugement est généralement incluse dans le document de prêt visé.

La Loi sur la monnaie fédérale exige que toute somme d’argent mentionnée dans le jugement d’un tribunal canadien soit exprimée en monnaie canadienne. Par conséquent, toute réclamation aux termes d’un document de prêt qui est présentée devant un tribunal canadien pour être exécutée doit être convertie en dollars canadiens. Les règles régissant le moment et le taux de change applicables à cette conversion diffèrent d’une province à l’autre. Par exemple, en Ontario, en vertu de l’article 121 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, si les parties ont prévu le mode de conversion au contrat, le tribunal donnera effet à la méthode choisie; dans le cas contraire, le tribunal utilisera pour convertir la devise étrangère le taux de change d’une banque ontarienne le jour précédant celui du paiement (ou toute autre date que le tribunal peut choisir dans l’éventualité où cette méthode de conversion par défaut serait inéquitable pour une partie).

Étant donné le risque de recouvrement insuffisant que présente un jugement d’un tribunal canadien en dollars canadiens en raison du risque lié au taux de change, une clause standard relative à la devise du jugement est généralement incluse, qui prévoit que le taux de change sera celui auquel le prêteur pourrait acheter la devise prévue par l’accord avec la devise prévue par le jugement le jour ouvrable précédant immédiatement le jugement et que le débiteur ne sera libéré de ses obligations que dans la mesure où le prêteur peut acheter la devise prévue par l’accord avec la devise prévue par le jugement (avec une indemnité distincte en faveur du prêteur pour toute insuffisance et l’obligation pour le prêteur de retourner tout excédent au débiteur).

Conclusion

Comme l’indique ce qui précède, les prêteurs et les emprunteurs qui souhaitent structurer un prêt transfrontalier ayant un lien avec le Canada doivent être conscients des questions juridiques propres à la législation canadienne qui peuvent avoir une incidence sur leur opération. Les professionnels d’Osler possèdent une vaste expérience de services-conseils aux clients en matière de prêts transfrontaliers.


[1] La Banque des règlements internationaux, BIS international banking statistics and global liquidity indicators at end-September 2021 [PDF] [en anglais uniquement].

[2] Par exemple, en vertu de la LSM de l’Ontario, un « compte » est une créance pécuniaire qui n’est pas attestée par un acte mobilier ou un effet, et un « bien immatériel » s’entend de tout bien meuble, y compris une chose non possessoire, qui n’est pas un objet, un acte mobilier, un titre, un effet, de l’argent ou un bien de placement.

[3] Il peut s’écouler jusqu’à 24 heures avant que l’acte d’hypothèque ne soit inscrit par le RPMR.

[4] Également appelées sociétés à responsabilité illimitée selon la loi applicable.

[5] À la date de la rédaction du présent article, la constitution en société d’une SRI était autorisée par la Business Corporations Act (Colombie-Britannique), la Business Corporations Act (Alberta), la Companies Act (Nouvelle-Écosse) et la Business Corporations Act (Île-du-Prince-Édouard).

[6] Solar Power Network Inc. c. ClearFlow Energy, 2018 ONCA 727.

[7] Les sociétés par actions peuvent être constituées sous le régime fédéral en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) ou sous le régime d’une province ou d’un territoire (par exemple, en vertu de la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario).

[8] Voir, par exemple, l’article 186 de la LCSA.

[9] R.E. Lister Ltd. c. Dunlop Canada Ltd., 1982 CanLII 19 (SCC), [1982] 1 RCS 726.

[10] Le créancier garanti doit donner préavis en la forme prescrite par la LFI.

[11] Séquestre de Media5 Corporation, 2020 QCCA 943.