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Protection contre les dommages-intérêts pour mauvaise foi en cas de cessation des activités de franchisés

3 novembre 2016

Le jugement rendu en Alberta dans la cause Seto c. Wendy’s rappelle aux franchiseurs que les tribunaux peuvent scruter le but de décisions importantes ayant une incidence sur les intérêts des franchisés, par exemple la cessation de leurs activités. Il serait bon que les franchiseurs qui envisagent la prise de telles décisions énoncent et documentent avec exactitude le bien-fondé qui les sous-tend afin de se protéger contre les réclamations pour violation de l'obligation d'agir équitablement et de bonne foi.

Dans cette cause, les demandeurs exploitaient une franchise Wendy's à Camrose en Alberta. Malgré les accomodements consentis par le franchiseur, le franchisé était constamment en retard dans le paiement de son loyer, des redevances et des autres frais qu'il devait au franchiseur. De plus, le franchisé devait de fortes sommes à sa banque et à l'Agence du revenu du Canada. Une série d'avis de défaut avaient par conséquent été émis, et le franchiseur s'était vu contraint de résilier la convention de franchise.

Comme ses difficultés financières s'aggravaient, le franchisé avait tenté de vendre sa franchise. Il avait conclu un contrat d'achat et avait demandé au franchiseur de lui remettre les documents de transfert, ce que ce dernier avait fait. Cependant, le franchisé s'était abstenu de transmettre les documents à l'acheteur avant la date d'échéance fixée par ce dernier.

Après avoir appris que l'Agence du revenu du Canada avait obtenu des brefs de saisie et de vente des actifs du franchisé, le franchiseur avait résilié la convention de franchise, pris possession des lieux et rouvert l'ancien établissement en tant que lieu d'affaires. À peu près pendant la même période, la possibilité de conclure la vente de la franchise avec l'acheteur tiers avait refait surface.

Les demandeurs avaient allégué que le franchiseur avait illégitimement mis fin à la convention de franchise. Les demandeurs avaient soutenu, entre autres choses, que le franchiseur avait violé l'obligation d'agir équitablement et de bonne foi en résiliant la convention de franchise alors qu'une vente était imminente. Le tribunal de l'Alberta avait rejeté cette allégation, estimant que l'offre d'achat de la franchise n'en était qu'à ses débuts et que rien ne prouvait que l'intention véritable du franchiseur en résiliant la convention était de compromettre la vente éventuelle. Dans cette cause, l'historique des accommodements consentis par le franchiseur, les défauts de paiement admis par le franchisé et l'état peu avancé du projet de vente par le franchisé ont apparamment amené le tribunal à conclure que le franchiseur n'avait aucune intention illégitime en résiliant la convention.

La leçon pratique à retenir de cette affaire est que les tribunaux tiendront compte du but ou des motifs qui ont incité le franchiseur à exercer le droit de résilier une convention, même si ce dernier en a bel et bien le droit. Par conséquent, il va sans dire que le fait de procéder à la résiliation de conventions de franchise (ou de prendre d'autres décisions importantes touchant les franchisés) à des fins ultérieures expose les franchiseurs à un risque juridique, même dans les cas où la décision relève par ailleurs des droits contractuels du franchiseur.

Les franchiseurs qui envisagent la cessation des activités d'un franchisé seraient avisés d'énoncer et de documenter la justification de leur décision, en particulier s'ils savent que les intérêts financiers du franchisé, par exemple une vente éventuelle, sont en jeu et que le franchisé est susceptible d'être désavantagé par cette décision. Cette précaution renforcera les moyens de défense factuels du franchiseur à l'égard de réclamations pour violation de l'obligation d'agir équitablement et de bonne foi.