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Modifications proposées à la TPS/TVH en ce qui a trait aux livraisons directes

8 août 2016

Les règles sur les livraisons directes prescrites à l'article 179 de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi ») autorisent essentiellement un non-résident non inscrit à acquérir des produits au Canada, ou des services commerciaux à l'égard de produits, en franchise de taxe, pourvu que les produits soient exportés ou conservés au Canada par un inscrit. Le ministère des Finances a également déclaré que les règles sur les livraisons directes visent à s'appliquer uniquement à l'inscrit qui accepte la responsabilité potentielle relative à la taxe applicable en case de transfert subséquent ou d'utilisation non commeciale subséquente des produits. En outre, le ministère des Finances a indiqué que les règles visent à « veiller à ce que la TPS[1] s'applique aux produits situés au Canada qui sont fournis par une personne non-résidente non inscrite pour consommation au Canada, de la même façon qu'elle s'appliquerait si les produits étaient acquis à l'étranger par une personne non-résidente non inscrite puis importés pour consommation au Canada[2] ».

En l’absence de règles sur les livraisons directes, un non-résident non inscrit qui achète des produits à des fins de revente au Canada devrait payer la TPS à l’achat des produits, mais ne pourrait pas réclamer un crédit de taxe sur les intrants pour la TPS payée. Ce serait le cas même si les produits étaient vendus ultimement à un inscrit qui aurait le droit de réclamer le plein montant de crédit de taxe sur les intrants pour la TPS payée. Dans ces circonstances, sans les règles sur les livraisons directes, le non-résident non inscrit serait tenu de s’inscrire sous le régime de la TPS pour pouvoir réclamer les crédits de taxe sur les intrants pour les taxes payées.

Malheureusement, au fil des ans, l’Agence du revenu du Canada (ARC) a adopté une approche assez restrictive en ce qui concerne l’application des règles sur les livraisons directes. Afin de clarifier les choses et de combler certaines lacunes perçues dans les règles actuelles, le ministère des Finances a publié des propositions de modifications législatives relatives aux règles sur les livraisons directes le 22 juillet 2016 (la « date de l’annonce »). Ces dispositions modifiées (les « nouvelles règles ») visent à s’assurer de l’atteinte des objectifs de politique relatifs aux règles sur les livraisons directes.

Bien que les nouvelles règles soient assez élaborées et extrêmement techniques (à l'instar des règles actuelles), elles semblent régler de manière logique et cohérente un certain nombre des questions que soulevait la façon dont l'ARC applique les règles existantes3].

Voici un résumé de haut niveau de certaines des principales modifications apportées par les nouvelles règles. Tous les renvois législatifs ci-dessous se rapportent aux dispositions de la Loi.

Création d'un nouveau « certificat du propriétaire »

En vertu des nouvelles règles, seul un consignataire qui achète des fournitures directement auprès d’un non-résident non inscrit peut délivrer un certificat de livraison directe. Toutefois, les nouvelles règles créent aussi le concept d’un certificat du propriétaire, qui fonctionne en gros comme un certificat de livraison directe, mais qui offre plus de souplesse et d’allègement en ce qui concerne l’interprétation assez restrictive que fait l’ARC des règles actuelles sur les livraisons directes (un « certificat du propriétaire »). Si un inscrit sous le régime de la TPS (l’« inscrit ») fournit des produits, un service qui consiste à fabriquer des produits ou à produire des biens ou un service commercial relatif à la plupart des produits, à une personne non-résidente non inscrite, l’inscrit cause le transfert de la possession matérielle de ces biens quelque part au Canada à un autre inscrit sous le régime de la TPS (le consignataire), et le consignataire n’a pas le droit de délivrer de certificat de livraison directe, un certificat du propriétaire peut alors être délivré si : a) immédiatement après la prise de possession matérielle des produits, les produits sont ceux d’un tiers qui est inscrit sous le régime de la TPS (le « tiers inscrit »), ou b) le consignataire acquiert la possession matérielle des produits à titre d’acquéreur d’une fourniture taxable par vente des produits qui a été effectuée par un tiers inscrit avant le transfert de la possession matérielle. Dans ces circonstances, soit le tiers inscrit (dans les deux cas a) et b) ci-dessus) soit le consignataire (dans le cas b) ci-dessus) peut délivrer un certificat du propriétaire qui aura essentiellement le même effet qu’un certificat de livraison directe (c.-à-d. Que la fourniture vendue au non-résident non inscrit sera réputée être effectuée à l’étranger, de sorte qu’aucune TPS ne sera exigible, et les effets du paragraphe 179(1) seront annulés).

Par exemple, le certificat du propriétaire devrait s’appliquer lorsqu’un inscrit vend des produits à un non-résident non inscrit qui les revend ensuite à un grossiste inscrit sous le régime de la TPS qui les vend ultimement à un distributeur inscrit sous le régime de la TPS et que les produits sont ensuite livrés directement de l’inscrit au distributeur. Dans ce scénario, l’ARC avait décidé qu’en vertu des règles actuelles un certificat de livraison directe ne pouvait être délivré par le grossiste, parce que celui-ci n’avait pas eu la possession matérielle des produits, et le distributeur ne pouvait pas délivrer de certificat de livraison directe parce qu’il n’était pas redevable en vertu de la section IV de la Loi. Selon les nouvelles règles, le grossiste ou le distributeur dans cet exemple devrait être en mesure de délivrer un certificat du propriétaire, de sorte que la fourniture au non-résident non inscrit serait réputée être effectuée à l’extérieur du Canada.

Création d'une nouvelle obligation pour les consignataires et les propriétaires qui délivrent les certificats

Comme on le mentionne ci-dessus, la position de l’ARC était que seule la personne tenue d’établir par autocotisation la taxe prévue à titre d’acquéreur d’une fourniture taxable importée pouvait délivrer un certificat de livraison directe, même si rien dans les anciennes règles n’indiquait que ce devait être le cas. Les nouvelles règles renferment un certain nombre de dispositions qui créeraient une obligation potentielle d’établir par autocotisation la taxe applicable pour quiconque délivre un certificat de livraison directe ou un certificat du propriétaire.

Nouvelles règles concernant les intrants utilisés dans le processus de fabrication

Les règles actuelles sur les livraisons directes ne s’appliquent qu’aux produits livrés sous la même forme qu’ils ont été vendus. Techniquement, les règles ne s’appliquent pas aux produits utilisés comme intrants ou consommés en vue de fabriquer d’autres produits. Les alinéas 179(2)c)(ii) et (iv) des nouvelles règles autorisent maintenant un consignataire à délivrer un certificat de livraison directe pour des produits qui sont intégrés ou combinés à d’autres produits ou consommés ou absorbés lors de la fabrication ou de la production d’autres produits.

Nouvelles règles dans le contexte d'une location

Des préoccupations ont été soulevées au sujet des règles actuelles qui présentent certaines lacunes dans le cas où un non-résident non inscrit loue des produits au Canada. Par exemple, si un non-résident non inscrit avait importé des produits au Canada, puis les avait loués au Canada, le preneur pourrait potentiellement réclamer des crédits de taxe sur les intrants en vertu de l’article 180 pour la TPS payée à l’importation des produits au Canada. À la fin de la location, le non-résident serait propriétaire des biens au Canada et pourrait les fournir à un consommateur canadien en vertu de l’article 143, de sorte que la fourniture serait ainsi réputée être effectuée à l’extérieur du Canada et qu’aucune TPS ne serait exigible. S’il exerçait des activités au Canada, ce qui n’est pas toujours le cas, le non-résident pourrait devoir s’inscrire sous le régime de la TPS. Les nouveaux paragraphes 179(8) à (12) établissent la façon dont les règles sur les livraisons directes s’appliqueront aux locations. De façon générale, les nouvelles règles créent une obligation potentielle pour le preneur précédent (en vertu du paragraphe 179(1)), à moins que le nouveau preneur ne délivre un certificat de livraison directe ou un certificat du propriétaire. Compte tenu des nombreuses règles particulières, et des exceptions à ces règles, et compte tenu de leur complexité, les non-résidents qui font de la location au Canada ont intérêt à examiner les règles sur la livraison directe dans le contexte de la location afin de déterminer si elles s’appliquent à leur situation.

Précisions concernant les règles sur le maintien de la possession prescrites au paragraphe 179(4)

Un certain nombre de modifications à l’actuel paragraphe 179(4) sont proposées en ce qui concerne les règles sur le maintien de la possession, pour tenir compte du moment où les produits sont livrés et pour préciser l’application des règles dans d’autres situations. 

Après avoir reçu la sanction royale, les nouvelles règles sur le maintien de la possession figureront aux sous-alinéas 179(5) b)(i) à (v). Nous soulignons que le sous-alinéa 179(5)b)(v) traite explicitement de la question du « rachat », lorsqu’un inscrit vend des produits à un non-résident non inscrit, puis rachète les mêmes produits auprès du non-résident à des fins de revente au Canada. On pourrait facilement faire valoir que les règles actuelles s’appliqueraient dans pareil cas, de sorte que le non-résident non inscrit n’aurait aucune TPS à payer, mais les nouvelles règles devraient clarifier l’application de l’article 179 dans ce genre de situation.

Dispositions relatives à l'entrée en vigueur

Nous notons qu'il y a deux ensembles de nouvelles règles sur les livraisons directes : un premier ensemble qui s’applique à compter de la date de l’annonce (avec un certain effet rétroactif expliqué ci-dessous) et un second, qui s’appliquera après la sanction royale. Les deux ensembles de règles fonctionnent à peu près de la même façon. 

L’une de nos préoccupations à l’égard des nouvelles règles a trait aux dispositions relatives à leur entrée en vigueur. Plus particulièrement, la plupart sinon la totalité des modifications qui visent à libérer l’inscrit de l’obligation de remettre la TPS ne s’appliquent qu’aux fournitures effectuées après la date de l’annonce. Toutefois, quelques-unes des dispositions, qui n’ont généralement pas un effet d’allègement, peuvent s’appliquer de façon rétroactive si des taxes ont été payées. Comme le ministère des Finances déclare régulièrement ses mesures législatives rétroactives quand il estime que les contribuables ne respectent pas l’esprit de la Loi, nous aurions pensé qu’il aurait déclaré que les règles d’allègement s’appliqueraient aussi de façon rétroactive, puisque, dans ce cas, ce sont les déterminations de l’ARC qui n’étaient pas conformes à l’esprit de la Loi. C’est d’autant plus vrai que le gouvernement a mis beaucoup de temps à annoncer les nouvelles règles.

Enfin, nous soulignons que le ministère des Finances a invité les parties intéressées à faire parvenir leurs commentaires sur les modifications proposées avant la fin août. Si vous souhaitez envoyer vos observations, mais que vous ne croyez pas pouvoir le faire d’ici la date limite, nous vous recommandons d’en informer le Ministère, en précisant la date à laquelle vous enverrez vos observations.

Si vous avez des questions concernant les nouvelles règles sur les certificats de livraison directe, veuillez communiquer avec l’un des membres suivants de l’équipe d’Osler responsable des questions relatives à la taxe de vente :

Alan Kenigsberg akenigsberg@osler.com 416 862-6659

Marlene Legare mlegare@osler.com 416 862-4603

D’Arcy Schieman dschieman@osler.com 416 862-5977

Blake Murray bmurray@osler.com 416 862-6444

Alain Fournier afournier@osler.com 514 904-5390

Sean Aylward saylward@osler.com 416 862-5901

 

[1]   Les renvois à la TPS dans le présent document englobent la taxe sur les produits et services et la taxe de vente harmonisée.

[2]  Comme il est indiqué dans les notes explicatives relatives aux modifications législatives annoncées le 22 juillet 2016.

[3] Seule exception, les règles modifiées n’abordent pas la question des produits mélangés comme les produits transportés en continu (PTC) par pipeline ou par un autre type de canalisation (comme le pétrole et le gaz). Nous comprenons que c’est intentionnel, car le ministère des Finances estime que les règles sur les livraisons directes de PTC devraient être abordées séparément dans le cadre d’un examen ultérieur des dispositions de la Loi propres aux PTC.