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S’attaquer à la crise de l’accessibilité au logement au Canada

Auteur(s) : Stephen Poloz

Le 18 octobre 2023

Les lois de l’offre et de la demande n’ont pas été révoquées : si les prix des logements et des loyers augmentent plus rapidement que les prix de tous les autres biens, c’est que la demande de logements dépasse l’offre, sous l’effet de la croissance démographique. Pour stimuler la construction, le gouvernement a supprimé la TPS sur les immeubles d’habitation locatifs nouvellement construits. Cela suffira-t-il?

L’ajout de 5 % au résultat net des promoteurs devrait être très significatif; il est donc certain que cela stimulera la construction d’immeubles d’habitation locatifs, mais seulement si d’autres obstacles ne s’y opposent pas. L’offre nouvelle a été freinée par de multiples facteurs : réglementations, contrôle des loyers, octrois de permis, taxes d’aménagement du territoire, etc. Si un constructeur décidait de doubler les constructions prévues au cours des cinq prochaines années, il n’est pas certain que le système lui permette de le faire.

Supposons que ce soit le cas : cela aura-t-il un effet significatif sur l’abordabilité des logements? La réponse est certainement oui, mais le fait qu’elle soit visible ou non dépend de ce qui se passe par ailleurs. Lorsque la demande de logements est excédentaire, les prix d’achat augmentent rapidement et les acheteurs sont poussés vers le marché de la location, ce qui fait grimper les loyers. La construction d’un plus grand nombre de logements locatifs peut atténuer la pression sur les loyers et les prix d’achat, mais la pression nette peut encore être inflationniste. Supposons que la construction planifiée, combinée à l’immigration planifiée, ait conduit à une augmentation des prix des logements de 50 % au cours des cinq prochaines années; si la construction d’un plus grand nombre de logements signifie que les prix n’ont augmenté que de 25 % au cours des cinq années, peut-on considérer qu’il s’agit d’un succès? Un progrès, peut-être, mais difficile à prouver.

Ce que nous savons, c’est que l’immigration entraîne une augmentation de la superficie de nos villes. Le temps nécessaire pour se déplacer dans la ville augmente. Le temps, c’est de l’argent; le prix des logements existants qui sont plus proches du centre de la ville augmente donc au fur et à mesure que la superficie de la ville s’accroît. Cela se produit même si nous construisons chaque année le nombre exact de nouvelles unités d'habitation, dans exactement les bonnes villes, pour faire face à l’immigration. L’abordabilité ne peut donc être jugée qu’à l’aune des types de nouveaux logements fournis, qu’il s’agisse de manoirs en banlieue ou de tours de logements locatifs à proximité d’un bon réseau de transport en commun, et de tout ce qui se trouve entre les deux.

Améliorer l'accessibilité aux logements

Cela signifie qu’il est presque certain que la suppression de la TPS aura pour effet d’améliorer l’offre de logements, mais que les prix pourraient continuer à augmenter. Que pourrait faire d’autre le gouvernement pour améliorer l’accessibilité au logement?

Une voie prometteuse consiste à s’attaquer directement au problème du logement des étudiants. L’éducation des étudiants étrangers est une excellente activité d’exportation pour les universités et les établissements d’enseignement supérieur canadiens, et elle crée un vaste réseau d’immigrants qualifiés pour l’avenir. Bien entendu, ces étudiants contribuent à l’augmentation des prix des logements. Toutefois, les étudiants n’ont pas besoin de logements bien grands, juste d’une fraction de l’espace nécessaire pour un appartement normal. Par conséquent, les gouvernements peuvent créer plus d’unités d'habitation par dollar, et apporter une plus grande contribution à la crise de l’abordabilité, s’ils se concentrent sur la construction d’unités pour étudiants situées à proximité de nos principales universités et de nos principaux établissements d’enseignement supérieur.

Le résultat? L’inabordabilité du logement est un problème qui s’aggrave. La réduction des objectifs en matière d’immigration pourrait ralentir l’inflation du logement, mais aussi étouffer la croissance économique. La suppression de la TPS sur la construction d’immeubles d’habitation locatifs sera utile, mais il serait encore mieux d’accroître rapidement l’offre de logements pour étudiants, ce qui contribuerait à stimuler la croissance économique et à ralentir l’inflation des prix des logements en même temps.