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Plan Nord - Le gouvernement du Québec dépose un document de consultation sur sa proposition de nouveau régime de redevances minières

Auteur(s) : François Paradis, Hugo-Pierre Gagnon

13 mars 2013

Le 7 mars 2013, le gouvernement du Québec a publié un document de consultation présentant sa proposition de modifications au régime d’impôt minier et de redevances minières du Québec en prévision de son forum sur le régime proposé, lequel aura lieu le 15 mars 2013. Le gouvernement du Parti Québécois (PQ) consulte actuellement le secteur minier concernant son projet de régime de taxation hybride, qui comprendrait, en remplacement du système actuel uniquement fondé sur la taxation des profits miniers, une redevance de 5 % selon la valeur du minerai extrait (ad valorem) et une taxe supplémentaire sur les profits miniers.

Contexte du document de consultation

Avant 1994, le taux de redevances au Québec correspondait à 18 % des profits d’une société minière, et de généreux crédits d’impôt remboursables étaient accordés. Ainsi, la province percevait des redevances nettes faibles, voire nulles. En 1994, le Québec a procédé à une réforme de son régime d’impôt minier en baissant le taux de redevances pour l’établir à 12 % selon une approche « mine par mine » et en resserrant les critères d’admissibilité aux crédits d’impôt.

En 2010, le gouvernement libéral a effectué une nouvelle révision en profondeur du régime de redevances. Parmi les modifications apportées, mentionnons la mise en œuvre d’une augmentation progressive du taux de redevances, le faisant passer de 12 % à 14 % en 2011 puis à 16 % en 2012. Selon le document de consultation, le fardeau fiscal total actuel d’une société minière établie au Québec (y compris les redevances ainsi que l’impôt fédéral et provincial) représente environ 38,6 % de ses profits.

À la dernière élection provinciale, le PQ a promis un examen complet du régime d’impôt minier et s’est engagé à augmenter les redevances minières de telle sorte que les Québécois puissent retirer des avantages équitables de l’extraction des ressources minérales non renouvelables de la province. Le ministre actuel des Finances et de l’Économie, Nicolas Marceau, a souligné le défi que pose la recherche d’un juste équilibre entre la maximisation des redevances, des investissements et de l’emploi dans le secteur minier.

Document de consultation

Le document de consultation propose un régime de redevances hybride comprenant une  redevance ad valorem de 5 % et une taxe supplémentaire sur les profits, laquelle pourrait être calculée sur : (i) la marge de profit d’une mine selon un taux augmentant avec la rentabilité de la mine (c.-à-d., taxation progressive), ou (ii) sur les « surprofits » selon un taux fixe de 30 %.

Selon la première option proposée, la même assiette fiscale que celle du régime actuel serait utilisée, mais l’impôt augmenterait progressivement par tranches de profits, à partir d’un certain niveau de rentabilité. Le document de consultation indique que la rentabilité serait définie en fonction de la proportion que représente les profits annuels de l’exploitant ou du propriétaire de la mine sur la valeur de production de toutes ses mines. La valeur de production d’une mine correspondrait à l’excédent de la valeur brute de chaque mine par rapport à l’ensemble des (i) frais liés au traitement, à la manutention, à l’entreposage et à la commercialisation du minerai, (ii) à la portion des frais administratifs relatifs à ces activités, et (iii) aux allocations pour le traitement et l’amortissement des ressources utilisées dans le traitement en lien avec la mine. Le document de consultation ne suggère cependant pas de taux ni de tranches pour ce nouvel impôt minier progressif.

Selon la deuxième approche, les profits excédant un certain seuil considéré comme un rendement acceptable en fonction du risque (c.-à-d. « surprofits ») seraient assujettis à un taux d’imposition fixe de 30 %. Le document de consultation ne mentionne aucun montant déterminé pour le seuil proposé. La taxe proposée serait perçue et calculée sur tout montant résiduel après avoir déduit des profits d’une société minière (i) les coûts de production globaux, (ii) une provision pour l’amortissement sur le capital de base investi et un rendement acceptable, et (iii) la redevance ad valorem de 5 % applicable.

Objectifs politiques

En proposant ce nouveau régime d’impôt minier, le gouvernement a pour objectif défini de favoriser la stabilité et l’équité dans le secteur minier grâce à la création de liens durables avec les sociétés minières et les collectivités dans lesquelles ces dernières exercent des activités. Le gouvernement veut également soutenir la capacité concurrentielle des sociétés minières exerçant des activités au Québec afin d’attirer de nouveaux investisseurs tout en veillant à ce que chaque société verse des redevances pour les ressources minérales qu’elle extrait.

Les modifications proposées au régime fiscal québécois s’inspirent en partie du régime australien (lequel, dans le cas du minerai de fer, applique un taux de redevances ad valorem de 6,5 % et une « taxe de surprofit » de 22,5 % sur les profits dépassant 125 millions de dollars; et dans le cas de l’or, un taux de redevances ad valorem de 2,5 %). Des régimes hybrides similaires existent actuellement dans d’autres provinces canadiennes, dont l’Alberta, la Colombie-Britannique et Terre-Neuve-et-Labrador.

Fait intéressant à souligner, la question des avantages possibles réalisés à la suite d’une transformation ultérieure au Québec des minéraux bruts extraits n’est pas abordée dans le document de consultation (c.-à-d., si la valorisation de la transformation locale se traduirait par un crédit ou une retenue d’impôt).

Conclusion

De nombreux intervenants du secteur minier se sont dits préoccupés par l’éventualité de l’augmentation des redevances ou des impôts miniers au Québec, et ont identifié les inconvénients possibles dont il faudrait tenir compte dans la conception d’un nouveau régime d’impôts miniers. Parmi ceux-ci, mentionnons (i) l’accès aux gisements éloignés dans le Nord du Québec, (ii) la concentration minérale plus faible des gisements, (iii) la variable climatique, (iv) la distance des marchés asiatiques, (v) les avantages comparatifs d’autres territoires comme le Brésil, l’Australie, etc., (v) l’alourdissement du fardeau et l’affaiblissement de la capacité concurrentielle des sociétés minières forcées de payer des taxes même si elles ne réalisent aucun profit, (vi) le risque accru des projets miniers, (vii) le retrait possible des investisseurs, et (viii) l’augmentation des délais ou des suspensions des projets ou activités actuels de certaines mines plus petites ou moins rentables, voire la fermeture de ces dernières.

Le gouvernement du Québec a organisé un forum afin de consulter le secteur minier sur la révision du régime québécois d’impôt minier et de redevances minières. Ce forum aura lieu le 15 mars 2013 à Montréal. Les participants doivent s’inscrire et soumettre leur mémoire le 14 mars 2013 ou le jour du forum. Le gouvernement aurait l’intention d’annoncer publiquement les modalités finales de son nouveau régime peu après le forum.

Les membres du secteur minier qui pourraient être touchés par les modifications proposées au régime de redevances minières sont invités à communiquer avec Ward SellersFrançois Paradis ou Hugo-Pierre Gagnon s’ils ont des questions ou des préoccupations ou s’ils ont besoin d’assistance pour soumettre une lettre de commentaires afin d’exprimer leur point de vue sur le nouveau régime proposé.