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Rétrospective de l’année en exploitation minière : des progrès au milieu de la volatilité

Auteur(s) : Alan Hutchison, James R. Brown

Le 13 décembre 2017

Même si nous avons assisté en 2017 à une remontée de l’activité et de l’optimisme dans le secteur minier par rapport aux trois années précédentes, des défis de taille demeurent. Plus précisément au sein des petites et moyennes sociétés minières, qui représentent le plus grand segment du secteur minier canadien, l’année écoulée pourrait se résumer par « deux pas en avant, un pas en arrière », en ce qui concerne les perspectives et les conditions générales du marché. Dans un contexte aussi incertain, il n’y a, bien souvent, aucun thème ou enjeu dominant qui définit l’année, surtout du point de vue juridique. Un certain nombre de développements sont néanmoins survenus qui ont eu des répercussions significatives sur le secteur minier et requièrent une attention particulière en 2018.

Activités d’exploration

Les capitaux ont fait leur retour dans le secteur de l’exploration minière en 2017. Les petites sociétés d’exploration et d’exploitation minières ont réalisé plus de financements (particulièrement des placements par voie d’acquisition ferme et des placements commercialisés complémentaires) et les grandes sociétés minières ont affecté davantage de fonds aux budgets d’exploration. Cette recrudescence de l’activité est de bon augure pour le marché dans son ensemble, car le secteur de l’exploration minière a tendance à alimenter les marchés financiers liés au secteur minier canadien.

Ce faisant, l’on a assisté à une multiplication des opérations immobilières, les sociétés minières ayant acquis des options ou conclu des ententes de coentreprise à l’égard de projets d’exploration ou vendu des projets exploration dans le but d’optimiser leur portefeuille. Même si cela devrait se traduire par l’avancement d’un plus grand nombre de projets d’exploration (ce qui est une bonne chose dans un marché avide de découvertes importantes), bon nombre des projets pour lesquels les petites sociétés sollicitent du financement ont déjà fait l’objet d’une évaluation (ou d’une réévaluation) dans le passé.

Cependant, même si davantage d’opérations ont été conclues et que, dans l’ensemble, les vendeurs ont bénéficié de conditions plus favorables qu’au cours des dernières années, de nombreuses opérations visant des terrains comportaient une structure d’option ou de prise de participation exigeant des engagements d’investissement relativement faibles. Bien sûr, dans le cadre d’une structure d’option, les engagements sont habituellement petits pour commencer puis vont croissants selon que les travaux d’exploration ont du succès, ce qui est, en partie, un retour à la normale après une diminution des activités d’exploration au Canada année après année de 2012 à 2016. Il sera intéressant de voir si les opérations avec prise de participation donneront lieu à une croissance des programmes d’exploration en 2018.

Investissement privé

Il a toujours régné un certain scepticisme quant à savoir si l’investissement privé est, ou non, approprié pour le secteur minier, en raison de la volatilité des prix des produits de base, des longs délais entre la découverte et la production (et les flux de trésorerie), et l’importance du capital nécessaire pour mettre une mine en valeur. Ces facteurs s’opposent à la durée limitée des fonds de capital-investissement et à leur mandat d’effectuer des investissements procurant des flux de trésorerie positifs dans ces délais. Lors du récent ralentissement économique, les fonds de capital-investissement ont été assez présents dans diverses initiatives de cession d’actifs secondaires entreprises par de grandes sociétés, ce qui a permis à ces projets de ne pas subir la dévaluation du marché qu’ont vécue les projets à un stade précoce. Cependant, au milieu des rumeurs de réduction progressive des fonds et de l’éventuel abandon des actifs les moins performants, les fonds de capital-investissement vont probablement continuer de se concentrer sur les actifs de stade tardif à plus faible risque.

Plus précisément au sein des petites et moyennes sociétés minières, l’année écoulée pourrait se résumer par « deux pas en avant, un pas en arrière », en ce qui concerne les perspectives et les conditions générales du marché.

Les fonds de capital-investissement comptent de nombreuses réussites dans les métaux de niche occupant une moins grande part du marché. Plus particulièrement, l’acquisition de Dominion Diamonds Corp. par The Washington Companies constitue un rare exemple d’une prise de contrôle par emprunt réussie au moyen d’un investissement privé dans le secteur minier.

Regroupement

Les fusions et acquisitions ont été modérées en 2017 ; un certain nombre de sociétés de taille moyenne, particulièrement dans le secteur aurifère, ont fusionné. Le nombre d’opérations a légèrement augmenté en 2017 par rapport à 2016, mais la valeur globale des opérations est demeurée relativement constante. Cette situation porte à croire que davantage de petites sociétés minières ayant des projets à un stade précoce ont été acquises par de grandes sociétés ou qu’elles ont fusionné avec d’autres petites sociétés, dans bien des cas avec des primes de changement de contrôle moins importantes. Cela témoigne de la poursuite du regroupement du secteur minier préconisé par les analystes et les financiers du secteur depuis 2013.

Structures de financement de rechange – achats de production et redevances

Encore en 2017, l’attention s’est tournée vers les structures de financement de rechange comme les achats de production de métaux (où une société minière reçoit un paiement à l’avance en contrepartie de l’engagement de vendre une partie de la production d’un métal précis à un prix inférieur au prix courant du marché) et les redevances (où le titulaire des redevances acquiert une participation dans un projet minier qui lui donne droit à une partie de la production – ou des recettes – après déduction de certains coûts). Le secteur des achats de production de métaux attire de plus en plus de sources de financement, tandis que l’incidence de cette structure de financement sur les sociétés minières fait de plus en plus l’objet d’examens minutieux. Alors que le marché accepte bien les achats de production de métaux secondaires, il passe davantage à la loupe les achats de production de métaux de première fusion quant à leurs effets sur les paramètres économiques du projet. Les autorités en valeurs mobilières commencent, elles aussi, à évaluer l’incidence des achats de production de métaux sur les obligations d’information continue.

Le marché des redevances évolue également. Les modalités de base rattachées aux redevances n’ont pas changé. Cependant, les conventions de redevances deviennent plus détaillées et il est permis de penser qu’elles sont devenues plus lourdes à respecter pour les propriétaires eu égard à la présentation de l’information et à l’accès aux données, à l’entretien des terrains et aux intérêts réversifs (reversionary interests) en faveur des titulaires de redevances. Plusieurs opérations d’octroi d’options ou de prise de participation sont structurées de façon à ce que la participation du donneur d’option (le vendeur) dans le terrain soit immédiatement diluée en un droit de redevance plutôt qu’en une participation minoritaire dans une coentreprise à la suite de l’exercice de l’option. À l’heure actuelle, le marché semble préférer les droits de redevances à la participation minoritaire. On en trouve un bon exemple dans la récente acquisition par Osisko Gold Royalties du portefeuille de redevances d’Orion Mine Finance, en juillet 2017, au prix d’achat de 1,1 milliard de dollars.

L’un des principaux risques associés aux redevances est de savoir s’il est plus approprié de les considérer comme des intérêts fonciers ou comme des obligations contractuelles. Cela nous amène à la question de savoir si les redevances peuvent être à l’abri de la faillite. En raison du récent ralentissement économique, un certain nombre d’entreprises en cours de restructuration ont fait des propositions qui dépendent de la perception de droits de redevances existants. Les tribunaux ont pris en compte un certain nombre de facteurs pour décider si les parties souhaitaient que les redevances rattachées à un terrain constituent un intérêt foncier ou si la redevance est purement une obligation contractuelle.

Parmi les exemples récents, on compte les procédures de restructuration de Walter Energy en Colombie-Britannique, dans le cadre desquelles la société débitrice a renoncé aux droits de redevance lors de la vente à un tiers du terrain minier générateur de redevances. Au début de 2018, la Cour entendra une demande en dommages-intérêts de l’ancien titulaire des redevances en raison de la perte de recettes découlant de la renonciation aux redevances. Si cette demande est accueillie, elle marquera un grand changement dans les droits des titulaires de redevances et une avenue supplémentaire non négligeable pour les titulaires de redevances en cas de faillite.

La volatilité du marché et la prochaine merveille

Dans l’ensemble, même si, en 2017, le secteur minier a connu une bien meilleure année, il reste en proie à des vents contraires. Compte tenu des incertitudes politiques et économiques mondiales, cela n’est peut-être pas surprenant. Cependant, en période d’incertitude économique, la conjoncture s’améliore habituellement pour les métaux précieux comme l’or, et de nombreux observateurs du marché se sont attendus à ce que le prix de l’or augmente, alors que les banques centrales maintenaient les taux d’intérêt à un bas niveau.

Par ailleurs, le marché s’est beaucoup intéressé aux métaux utilisés dans les batteries, tels que le lithium, le cobalt ou le graphite. Le paysage mondial changeant pour ces métaux et les augmentations potentielles de valeur découlant de l’évolution de nouvelles technologies posent également des défis aux organismes de réglementation.

Post-scriptum

Nous avons le plaisir d’annoncer que le coprésident du groupe de droit minier d’Osler, James Brown, a été nommé au Comité consultatif technique de surveillance du secteur minier des Autorités canadiennes en valeurs mobilières. Ce comité conseille les commissions des valeurs mobilières provinciales sur des questions minières techniques.