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La COVID-19 étend le secteur de la santé à tous les secteurs

Auteur(s) : Michael Watts, Susan Newell

Le 8 décembre 2020

En cette année 2020 marquée par l’imprévisibilité et une constante évolution, la pandémie mondiale de COVID-19 a placé les questions de réglementation en matière de santé au premier plan de tous les secteurs et industries. Des facteurs comme les états d’urgence provinciaux, l’adoption accrue des technologies de la santé numériques, la reconnaissance accrue des responsabilités en matière de santé et de sécurité des employés et des clients, les pénuries mondiales d’équipement de protection individuelle (EPI) et les initiatives sans précédent de Santé Canada sous la forme de décrets fédéraux temporaires ont tous forcé les acteurs traditionnels du secteur de la santé à s’adapter à un environnement incertain et en constante évolution. Les entreprises exerçant leurs activités en dehors du secteur de la santé ont également été tenues de demander des conseils hautement spécialisés en matière de réglementation de la santé en réponse aux répercussions que la pandémie a eues sur leurs activités et leurs affaires. 

Décrets et directives d’urgence : comprendre et s’adapter aux restrictions en constante évolution

Les entreprises de tous les secteurs ont dû comprendre rapidement les décrets d’urgence pris en vertu de diverses lois provinciales sur les situations d’urgence à la suite d’états d’urgence en matière de santé publique ou autres dans tous les territoires du Canada, comme la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence et la Loi de 2020 sur la réouverture de l’Ontario (mesures adaptables en réponse à la COVID-19) en Ontario, ainsi que les lois d’urgence semblables dans d’autres provinces, et s’y adapter. Alors que la pandémie se poursuit, les états d’urgence et les urgences de santé publique ont été réglés, et les gouvernements provinciaux et municipaux ont mis en œuvre diverses autres mesures législatives et orientations de santé publique pour faire face aux effets persistants de la pandémie, y compris, plus récemment, des mesures de confinement plus restrictives dans les zones à plus haut risque.

Comprendre les effets et l’application de la législation et des décrets, ainsi que les recommandations et les exigences applicables des autorités fédérales, provinciales et municipales, a été une priorité nécessaire pour les entreprises en 2020 dans le cadre de la fermeture, de la réouverture, et à nouveau à l’heure actuelle et dans de nombreux territoires, de la fermeture des entreprises. Au cours de ce processus, les entreprises ont dû s’adapter à la nécessité d’adopter des protocoles et des procédures de nettoyage, ainsi que d’autres mesures de protection, comme le dépistage, les exigences de distanciation physique, les limites de capacité, la réduction des rassemblements inutiles, les couvre-visages, l’EPI et les plans de sécurité. Les directives des autorités de santé publique continuent d’évoluer au fur et à mesure que l’on prend connaissance de nouveaux renseignements sur le virus de la COVID-19.

Dans le contexte plus traditionnel du secteur de la santé, les prestataires de services de santé comme les hôpitaux, les établissements de soins de longue durée et les résidences pour retraités ont dû faire face à des développements sans précédent découlant de la législation d’urgence, comme les pouvoirs extraordinaires d’affectation du travail. En Ontario, par exemple, les mesures extraordinaires d’affectation du travail comprennent le fait d’autoriser les prestataires de services de santé à « prendre les mesures raisonnables nécessaires pour intervenir face à l’épidémie de COVID‑19, à la prévenir et à en atténuer les effets » à l’égard de l’affectation du travail et de la dotation en personnel. Ces pouvoirs comprennent, notamment, le pouvoir a) de réaffecter le personnel à différents endroits au sein des établissements (ou entre ceux-ci) du prestataire de services de santé concerné; b) de réaffecter le personnel pour qu’il travaille dans des centres d’évaluation de la COVID-19; c) de reporter ou d’annuler des vacances, des absences ou d’autres congés, que ces vacances, absences ou congés soient établis par une loi, un règlement, une convention ou autrement; d) de modifier les quarts de travail et les horaires; et e) d’employer du personnel supplémentaire à temps partiel ou temporaire, des entrepreneurs ou des bénévoles, y compris aux fins de l’exécution de travaux de l’unité de négociation.

Cela a soulevé des questions relatives au statut unique des prestataires de soins de santé en vertu de la législation sur la santé et la sécurité au travail, ainsi que des préoccupations relatives à la protection raisonnable des travailleurs de la santé de première ligne dans le cadre de la situation de la pandémie de COVID-19 évoluant rapidement. Cela a également mis en évidence les limites des droits des travailleurs de refuser de travailler lorsque a) la circonstance est inhérente au travail du travailleur ou constitue une condition normale de l’emploi du travailleur, ou b) le refus de travailler du travailleur mettrait directement en danger la vie, la santé ou la sécurité d’une autre personne. 

L’interprétation des modalités d’application des mesures d’intervention en matière de financement lié à la COVID-19 des différents gouvernements a également constitué un défi pour de nombreux acteurs du secteur de la santé. Par exemple, il a été difficile d’évaluer si et comment les versements de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) et les indemnités temporaires liées à la pandémie pouvaient être utilisés dans le cadre de relations de travail et d’arrangements complexes dans le contexte hospitalier.

Accélération de la prestation numérique des soins de santé

Au cours des dernières années, nous avons assisté à une émergence croissante de prestataires de soins de santé de manière numérique parmi toute une série d’acteurs du secteur de la santé, y compris, par exemple, des plateformes de soins virtuels pour faciliter les services fournis par les médecins, les infirmiers praticiens, les prestataires de soins de santé mentale et les pharmacies, entre autres. La pandémie de COVID-19 a rapidement accéléré l’adoption de la prestation de soins de santé par des moyens technologiques et numériques afin de remédier aux limites des infrastructures physiques du système de santé et à leur dépendance aux interactions en personne. Bien que nous ne considérions pas la prestation de soins de santé numériques comme un phénomène de 2020, le taux de croissance et les perturbations dans ce domaine, ainsi que le rythme auquel elle est désormais acceptée et financée par les gouvernements, ont considérablement augmenté, en partie en réponse à la pandémie de COVID-19. Nous prévoyons que cette tendance se poursuivra, même après la fin de la pandémie.

Réaction aux pénuries mondiales d’EPI et nouveaux dispositifs de dépistage de la COVID-19

De manière générale, la pandémie de COVID-19 a accru l’importance de la santé et de la sécurité au travail des employés à l’égard de toutes les entreprises et a sensiblement amélioré le profil de risque des employeurs. Plus particulièrement, l’augmentation sans précédent de la demande mondiale d’EPI a créé un certain nombre de défis pour ceux qui mènent des activités à la fois dans le secteur de la santé et en dehors de celui-ci. Les acteurs du secteur de la santé ont été confrontés à des difficultés bien documentées pour obtenir un stock d’EPI adéquat afin de protéger le personnel de première ligne. Cela a entraîné des réactions extraordinaires de la part des gouvernements, notamment la prise de nouveaux décrets fédéraux temporaires comme l’Arrêté d’urgence concernant l’importation et la vente d’instruments médicaux destinés à être utilisés à l’égard de la COVID-19 pris en vertu de la Loi sur les aliments et drogues (l’Arrêté d’urgence).

En raison de l’énorme demande en EPI au moment où la pandémie s’est déclarée, les gouvernements provinciaux se sont tournés vers des fabricants non traditionnels pour produire, retraiter et distribuer de l’EPI. Par exemple, les gouvernements ont demandé aux fabricants de vêtements de luxe de retraiter les masques N-95 périmés et, en raison d’une pénurie de grande ampleur de désinfectants pour les mains à base d’alcool, les distillateurs se sont mis à fabriquer des désinfectants pour les mains. L’industrie s’est développée de manière spectaculaire à mesure que de plus en plus d’acteurs se concentraient sur la production, le retraitement, la distribution et la fourniture d’EPI. De nouveaux acteurs du marché se sont également engagés dans le développement de nouveaux dispositifs de dépistage de la COVID-19 pour des raisons bénévoles ou financières. 

En cherchant à mettre rapidement leurs produits sur le marché, ces nouveaux acteurs du secteur de la santé ont dû naviguer dans les exigences techniques et réglementaires complexes pour obtenir l’autorisation de Santé Canada de fabriquer, d’importer et de vendre des instruments médicaux réglementés de classe I (respirateurs N95, blouses médicales, visières de protection et lunettes de protection) et de classe II (gants médicaux) et des dispositifs de dépistage de la COVID-19 en vertu du Règlement sur les instruments médicaux adopté en vertu de la Loi sur les aliments et drogues. L’Arrêté d’urgence a créé un nouveau processus de demande simplifié, permettant à un plus grand nombre d’acteurs d’obtenir plus rapidement l’autorisation de Santé Canada. 

Les pénuries d’EPI ont également été exacerbées par les perturbations de la chaîne d’approvisionnement et les activités frauduleuses généralisées. Sans surprise, les défis de la chaîne d’approvisionnement en EPI ont également conduit les entreprises à rechercher de nouveaux canaux et réseaux d’approvisionnement, de nombreux acteurs du secteur cherchant à se prévaloir des dispositions relatives à la force majeure dans les contrats d’approvisionnement.

Stratégies de retour au travail : dépistage de la COVID-19 initié par l’industrie

En plus du dépistage et de la surveillance des employés, les employeurs d’une grande variété de secteurs ont mis en place des mesures de dépistage de la COVID-19 privées visant leurs employés et travailleurs comme l’une des mesures pour aider au maintien ou à la reprise des activités.

Le dépistage de la COVID-19 coordonné par le secteur privé soulève une multitude de questions. Au Canada, le paiement privé de services assurés nécessaires sur le plan médical soulève des questions en vertu de la Loi canadienne sur la santé. D’autres préoccupations pertinentes comprennent les restrictions concernant la formation et les qualifications nécessaires pour faire passer les tests de dépistage de la COVID-19 (qui peuvent différer selon le territoire); les règlements relatifs aux instruments médicaux régissant le matériel de dépistage; les considérations relatives à l’acte autorisé de communiquer un diagnostic à un patient (qui ne peut généralement être effectué que par un médecin ou un autre professionnel de la santé compétent et réglementé dans chaque territoire); l’obtention du consentement approprié pour communiquer des résultats positifs du test de dépistage de la COVID-19 à toute autre personne que celle qui fait le test; et la garantie que les résultats positifs du test de dépistage de la COVID-19 sont communiqués à l’autorité de santé publique concernée pour la recherche des contacts. Il est également nécessaire de composer avec les règles en matière de confidentialité relatives aux renseignements personnels sur la santé dans le cadre de tests de dépistage de la COVID-19 initiés par l’industrie. 

Planifier pour les pires scénarios

Dans les premiers jours de la pandémie de COVID-19, le secteur canadien de la santé était rongé par la crainte que les hôpitaux canadiens soient submergés par la demande et confrontés à des circonstances tragiques semblables à celles vécues dans d’autres pays et villes du monde. En réaction à ces craintes, nous avons vu le monde des affaires entrer dans le secteur de la santé afin d’aider à combler les lacunes des infrastructures qui pourraient survenir si le nombre de cas de COVID-19 au Canada atteignait des niveaux impossibles à gérer.

De nombreux arrangements nouveaux et uniques ont été mis en place à des fins diverses. Ces mesures comprenaient a) la création d’espaces où les travailleurs de la santé qui avaient contracté ou couraient un risque élevé de contracter la COVID-19 pouvaient s’isoler de leur famille et continuer à travailler; b) la création d’hôpitaux mobiles pour faire face à l’éventuel débordement de patients; et c) la création d’un espace supplémentaire temporaire à la morgue si les taux de mortalité devenaient élevés. 

À l’horizon 2021 et au-delà

Les exemples ci-dessus ne sont qu’un petit échantillon du travail unique et très complexe au sein du secteur de la santé que la COVID-19 a créé à l’égard des acteurs traditionnels de ce secteur et du monde des affaires en général. Nous croyons que la pandémie de COVID-19 a généré un changement important, non seulement dans la manière dont les soins de santé sont offerts au Canada, mais aussi dans la manière dont toutes les entreprises réfléchissent à leurs risques opérationnels, ce qui permet à chaque secteur d’activité de porter un regard sur la santé. Nous prévoyons que l’année 2021 sera marquée par une série de nouveaux défis et de nouvelles considérations – ainsi que par des occasions – qui nécessiteront des conseils complexes en matière de réglementation de la santé alors que la pandémie de COVID-19 se poursuit.