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La prochaine phase de modification de la Loi sur la concurrence sur la voie rapide

Auteur(s) : Shuli Rodal, Michelle Lally, Kaeleigh Kuzma, Chelsea Rubin, Reba Nauth, Alysha Pannu, Zach Rudge

Le 18 septembre 2023

Le 14 septembre 2023, le premier ministre Justin Trudeau a dévoilé que le gouvernement du Canada prévoyait d’apporter un certain nombre d’autres modifications importantes à la Loi sur la concurrence (la Loi). Les modifications à venir s’inscrivent dans le cadre d’un examen continu de la Loi sur la concurrence et s’appuient sur des modifications récentes qui, entre autres, ont établi de nouvelles dispositions pénales interdisant certains accords de non-débauchage et de fixation des salaires, augmenté considérablement les amendes au criminel et les sanctions pécuniaires au civil, élargi le droit d’accès privé pour la contestation des agissements des entreprises dominantes en vertu des dispositions relatives aux abus de position dominante et abaissé la barre pour ce qui est d’établir ce qui constitue un agissement anticoncurrentiel. On trouvera de plus amples détails sur les récentes modifications dans les bulletins d’actualités Osler de juin 2022 et de juin 2023.

Bien que l’annonce du 14 septembre ne fournisse que peu de détails, elle indique que les modifications, qui devraient être présentées prochainement, comprendront les suivantes :

  1. conférer au Bureau de la concurrence (le Bureau) le pouvoir d’exiger la production de renseignements pour réaliser des études de marché
  2. éliminer la défense fondée sur les gains en efficience
  3. permettre au Bureau de prendre des mesures contre certains types de « collaborations » anti-concurrentielles qui ne sont pas clairement couvertes par les dispositions actuelles de la Loi

Bien que l’annonce se concentre sur les préoccupations relatives à la dynamique concurrentielle dans le secteur de l’alimentation, les modifications en question auront une incidence très vaste sur le droit de la concurrence au Canada et auront des conséquences importantes pour les entreprises qui font affaire au Canada.

Études de marché

À l’heure actuelle, pour évaluer l’état de la concurrence sur un marché ou dans un secteur d’activité particulier, le Bureau peut effectuer des études et, à cette fin, peut demander aux entreprises de lui fournir des renseignements. Toutefois, il ne peut pas contraindre les entreprises à lui en fournir, de sorte qu’il doit s’en remettre à leur bonne volonté.

Les études de marché se distinguent des enquêtes. Lorsqu’il a des raisons de croire qu’une ou plusieurs entreprises ont des agissements pouvant être passibles de sanctions en vertu d’une ou de plusieurs dispositions de la Loi, le commissaire à la concurrence (le commissaire) peut ouvrir une enquête, ce qui lui confère des pouvoirs d’enquête formels. En revanche, pour effectuer une étude de marché, le commissaire n’a pas besoin d’avoir des raisons de croire qu’une ou plusieurs entreprises sont en train d’avoir des agissements anticoncurrentiels pouvant être passibles de sanctions.

Dans ce contexte, les entreprises ont soulevé d’importantes questions quant à l’opportunité de les obliger à fournir des renseignements, ce qui peut entraîner un fardeau et des dépenses considérables. Une fois les modifications déposées, il sera particulièrement important d’examiner les pouvoirs qui sont expressément proposés et, surtout, la question de savoir si les modifications prévoient des freins et des contrepoids appropriés sur l’étendue des renseignements à fournir, les délais connexes et les questions d’application régulière de la loi.

Défense fondée sur les gains en efficience

Bien que la proposition en soi ne soit pas claire, l’« élimination » de la défense fondée sur les gains en efficience constituera un changement important pour le régime canadien d’examen des fusionnements. La défense fondée sur les gains en efficience, qui est propre au droit canadien de la concurrence, permet aux parties à une opération qui, selon le tribunal, empêche ou diminue sensiblement la concurrence de la conclure si les gains en efficience qui seraient perdus si le tribunal prononçait une ordonnance l’emportent sur les effets anticoncurrentiels.

À l’instar des études sur le pouvoir de marché, le commissaire demande depuis longtemps l’élimination de la défense fondée sur les gains en efficience, y compris dans les commentaires fournis en réponse à une consultation menée au début de l’année par le gouvernement du Canada sur les modifications à apporter à la Loi. L’issue de quelques affaires de fusionnement seulement a officiellement tourné autour de l’applicabilité de la défense fondée sur les gains en efficience. Toutefois, l’existence de ce moyen de défense a eu une incidence plus vaste sur la procédure d’examen des fusionnements et sur les délais au Canada.

Collaborations

Il y a peu de détails sur la troisième modification mentionnée dans l’annonce, qui porte, en termes vagues, sur des « collaborations » et « en particulier dans les situations où de grands épiciers empêchent des concurrents plus petits de s’installer près d’eux ». Une fois les modifications déposées, il faudra voir l’étendue des agissements qui sont visés et qui ne sont pas déjà passibles de sanctions en vertu de l’une des dispositions générales existantes de la Loi sur la concurrence.

Prochaines étapes

On ne sait pas précisément quand les modifications seront déposées. Toutefois, il convient de noter que l’annonce, qui se termine par une référence à la vaste consultation sur l’avenir de la Loi qui a d’abord été annoncée dans le Budget 2022, puis entreprise en 2023, précise que « [l]e gouvernement prévoit d’effectuer une réforme législative complète de la Loi sur la concurrence au cours des prochains mois ». Une telle déclaration laisse entendre que d’autres modifications, en plus de celles qui sont expressément mentionnées dans l’annonce, pourraient être sur la table.

Pour plus de renseignements sur les modifications et sur leurs répercussions éventuelles sur votre entreprise, veuillez communiquer avec les membres du groupe Droit de la concurrence et investissement étranger d’Osler.