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La version révisée des Lignes directrices sur la propriété intellectuelle clarifie l’approche du Bureau de la concurrence à l'égard des questions de PI

Auteur(s) : Michelle Lally, Kaeleigh Kuzma

4 avril 2016

Le Bureau de la concurrence (Bureau) a publié une version révisée des Lignes directrices sur la propriété intellectuelle (LDPI de 2016) le 31 mars 2016, après avoir tenu une longue période de consultation à l'égard d'une ébauche publiée en juin 2015 (ébauche de 2015). En publiant les LDPI de 2016, le Bureau a déclaré qu’une de ses priorités « consiste à accroître la transparence quant à la façon dont il s’occupe des questions de concurrence où intervient la propriété intellectuelle. Afin d’appuyer l’innovation et de veiller à ce que l’orientation offerte suive le rythme des nouveaux développements, le Bureau s’est engagé à revoir chaque année les lignes directrices sur l’application du droit de propriété intellectuelle, et il les révise au besoin en fonction de son expérience, de l’évolution des circonstances, ainsi que des décisions du Tribunal de la concurrence et des autres tribunaux ». L’importance et les vastes répercussions de ces questions ont été illustrées par le fait que le Bureau a reçu une grande quantité de commentaires de diverses parties prenantes au pays et à l’étranger, notamment l’Association du Barreau canadien, l’American Bar Association, des commissaires américains de la Federal Trade Commission, des économistes, Google, Microsoft, Apple, Ericsson et d’autres sociétés fermées.

Les LDPI de 2016 vont bien au-delà d'une simple clarification de l’approche conceptuelle globale du Bureau à l'égard de l’interaction entre la Loi sur la concurrence (Loi) et les questions relatives à la propriété intellectuelle (PI). Elles fournissent plutôt une orientation concrète et pratique attendue aux milieux juridique et des affaires, relativement à l’approche du Bureau à l’égard de cette interaction, dans le contexte de questions de PI dynamiques, y compris les ententes de règlement des litiges en matière de brevets, la substitution de produits, les trolls de brevets (entités spécialisées dans l'acquisition de brevets), l’élaboration de normes en collaboration et les brevets essentiels au respect des normes. En résumé :

  • Ententes de règlement des litiges en matière de brevets – L’examen minutieux antitrust des ententes de règlement des litiges en matière de brevets est depuis des années un sujet délicat et controversé parmi les organismes chargés de l’application de la loi en matière de concurrence aux États-Unis et en Europe. Le Bureau était resté notablement silencieux à cet égard jusqu’à l’automne 2014, où il a alors publié un livre blanc consacré à ce sujet. Le livre blanc a prêté le flanc à de sévères critiques, essentiellement en raison de son manque de clarté quant au moment où le Bureau intenterait des poursuites pénales à l'égard de tels règlements, et quant aux facteurs que le Bureau examinerait en vue de déterminer si un règlement comportant un paiement du fabricant de médicaments de marque à un fabricant de médicaments génériques soulevait de vives préoccupations en droit de la concurrence en vertu des dispositions civiles de la Loi. Il a également suscité de la controverse, car il proposait l'adoption d’un régime de notification pour tous les règlements des litiges en matière de brevets, semblable à celui qui est en place aux États-Unis. Les LDPI de 2016 traitent efficacement de ces questions clés en
    • clarifiant le fait que les règlements seront examinés en vertu des dispositions pénales de la Loi dans seulement trois situations particulières, et qu’en dehors de ces situations bien délimitées, les règlements seront habituellement examinés en vertu des dispositions civiles relatives aux accords sur la concurrence de l’article 90.1 de la Loi;
    • fournissant des directives détaillées sur les facteurs que le Bureau prendra en compte au moment de déterminer si le paiement de fabricants de médicaments de marque à des fabricants de médicaments génériques a pour effet de retarder la mise en marché des génériques et risque de diminuer considérablement ou d’empêcher la concurrence;
    • éliminant la suggestion d’instaurer un régime de notification pour les ententes de règlement des litiges en matière de brevets.
  • Substitution de produits – Les LDPI de 2016 confirment que même si l’utilisation ou la non-utilisation de la PI par son détenteur est habituellement le simple exercice d’un droit de PI (et n’est donc pas assujettie aux dispositions générales de la Loi), dans certaines circonstances, comme celles de la substitution de produits, la non-utilisation de la PI peut constituer davantage qu’un « simple exercice », et pourrait soulever des préoccupations relatives à la concurrence.
  • Trolls de brevets – Les LDPI de 2016 reconnaissent le débat en cours sur l’établissement et la conduite de trolls de brevets, et soulignent qu'à mesure que la situation évolue dans ce domaine en pleine effervescence, le Bureau continuera de parfaire son approche d’application de la loi. Des exemples hypothétiques se penchent sur l'attribution de brevet aux seules fins d’application de la loi, ainsi que sur la publicité mensongère et les pratiques commerciales trompeuses, dans le contexte d’un troll de brevets qui se prévaudrait de ses brevets à l’encontre de présumés contrefacteurs.
  • Élaboration de normes en collaboration et brevets essentiels au respect des normes – Ici, comme dans son analyse sur les trolls de brevets, le Bureau établit explicitement que sa réflexion sur les relations entre la PI et la politique antitrust dans ce secteur dynamique peut évoluer de telle sorte qu’il « pourra reconsidérer certains aspects des présentes lignes directrices énoncées dans cette sous-section à la lumière de l’expérience et des éventuelles nouvelles circonstances ». Compte tenu de cette mise en garde, les LDPI de 2016 :
    • confirment que la conduite conjointe d'organismes d’élaboration de normes (OEN) participants qui a clairement pour but d’établir une norme au sein de l'industrie serait examinée aux termes des dispositions civiles de l’article 90.1 sur les accords conclus entre concurrents, et non aux termes des dispositions pénales de l’article 45 sur le complot;
    • dissipent la confusion créée dans l’ébauche de 2015 à propos des brevets essentiels au respect des normes et différencient les brevets en précisant que les brevets essentiels au respect des normes font partie des normes élaborées par des OEN officiels, ce qui élimine toute suggestion selon laquelle les brevets essentiels au respect des normes englobent les brevets exclusifs distinctifs, y compris ceux que d’autres ont qualifié de normes commercialement essentielles, ou « de facto »;
    • confirment que les prétendus agissements anticoncurrentiels du titulaire d'un brevet essentiel au respect des normes seront examinés aux termes de la disposition sur l’abus de position dominante, plutôt que comme un différend contractuel entre les parties;
    • abordent, en termes pratiques, le potentiel d'agissement anticoncurrentiel du titulaire d'un brevet essentiel au respect des normes tentant de tirer indûment parti de son brevet (p. ex. par un brevet extorsionnaire, une embuscade tendue au moyen d’un brevet, en revenant sur son engagement en matière de licence, en refusant un engagement à accorder une licence ou en demandant une injonction après s’être engagé à concéder une licence) ainsi que le cadre d’analyse du Bureau à l'égard d’un tel agissement, aux termes de la disposition sur l’abus de position dominante de l’article 79 de la Loi.

Ce bulletin d'Actualités fournit d’autres renseignements concernant le processus de révision qui a mené à la publication des LDPI de 2016, de même qu’un examen plus détaillé des sujets susmentionnés.

 


A. Contexte

Le Bureau a d’abord exprimé son point de vue sur les relations entre le droit de la concurrence et la PI, dans les lignes directrices publiées en 2000 (LDPI de 2000). Les LDPI de 2000 présentent l’approche conceptuelle globale du Bureau, qui est fondée « sur l'hypothèse que la Loi sur la concurrence s'applique en général aux comportements touchant la PI comme à ceux concernant d'autres types de propriété ». Le fondement de l’approche du Bureau était que les circonstances dans lesquelles le Bureau peut appliquer la Loi à des comportements touchant la PI entrent dans deux grandes catégories : celles qui supposent plus que le simple exercice d'un droit de PI, et celles qui supposent le simple exercice d'un tel droit de PI, sans plus. Les LDPI de 2000 expliquaient que le Bureau utiliserait les dispositions générales de la Loi pour traiter des premières, et l'article 32 (recours spéciaux), pour traiter les dernières. (L’article 32 de la Loi est une disposition exceptionnelle, rarement appliquée, qui prévoit un recours particulier qui, sur demande du procureur général, accorde à la Cour fédérale le pouvoir d’empêcher l’utilisation de droits de PI pour réduire indûment le commerce ou restreindre la concurrence.)

Après la publication des LDPI de 2000, la situation a considérablement évolué à l'échelle internationale concernant le traitement de la PI et des droits de PI par les lois sur la concurrence et les organismes d’application de la loi. Par exemple, les règlements de litiges concernant des brevets pharmaceutiques ont reçu beaucoup d’attention de la part de la Federal Trade Commission (FTC) des États-Unis pendant des années, et ils ont fait l’objet d’une décision historique de la Cour suprême des États-Unis en 2013 (pour plus de renseignements à ce sujet, veuillez consulter notre bulletin d’Actualités). Les organismes chargés de l’application de la loi à l’échelle internationale et les tribunaux se sont également penchés sur l’application de la législation sur la concurrence aux trolls de brevets et aux activités liées aux brevets essentiels au respect des normes. Au Canada, le Bureau a amorcé une enquête en 2012 sur un présumé comportement anticoncurrentiel, ayant trait à la substitution de produits dans le secteur pharmaceutique (l’enquête a été interrompue en 2014).

En octobre 2013, le Bureau a annoncé que la révision des LDPI de 2000 se ferait en deux étapes. À notre avis, la première étape englobait la publication, en septembre 2014, des LDPI révisés (LDPI de 2014) et du livre blanc intitulé : Ententes de règlement des litiges en matière de brevets : Le point de vue du Canada. La deuxième étape portait sur la publication de l'ébauche de 2015.

À une exception près, les LDPI de 2014 abordaient principalement les modifications apportées à la Loi depuis la publication des LDPI de 2000. L’exception avait trait à la décision du Bureau de restreindre son interprétation de l’expression « simple exercice » d’un droit de PI, auquel seul l’article 32 de la Loi, rarement utilisé, s’applique. Jusqu’en 2014, le Bureau avait considéré que le « simple exercice » d’un droit de PI était l’utilisation ou la non-utilisation de la PI par un titulaire de la PI. En 2014, le Bureau a indiqué qu'il ne considérait plus la non-utilisation de la PI par un titulaire de la PI comme le « simple exercice » d’un droit de PI. Par conséquent, les allégations relatives à la non-utilisation de la PI par un titulaire de la PI pourraient faire l’objet d’un examen aux termes des dispositions générales de la Loi, plutôt que du recours particulier en vertu de l’article 32. Pour plus de détails concernant les LDPI de 2014, veuillez consulter notre bulletin d’Actualités.

Le livre blanc avait pour but de « présenter le contexte du système de réglementation canadien régissant la mise en marché des produits génériques, sa loi sur la concurrence, ainsi que le point de vue préliminaire du Bureau sur la façon dont la loi sur la concurrence au Canada pourrait s'appliquer aux règlements à l'amiable ». Le livre blanc a donné lieu à des incertitudes quant au moment où le Bureau pourrait faire enquête sur les ententes de règlement des litiges en matière de brevets, conformément aux dispositions pénales de la Loi sur les complots. Étant donné les enjeux de taille liés aux règlements des litiges en matière de PI, et la fréquence croissante avec laquelle de coûteux recours collectifs sont intentés dans leur foulée, même lorsque le Bureau n'intente pas de poursuites, le manque de clarté sur cette question importante était décevant. Le livre blanc a également suscité de la controverse, car il proposait l'adoption d’un régime de notification pour tous les règlements de litiges en matière de brevets, semblable à l'exigence, aux États-Unis, visant à notifier la FTC à l'égard de toutes les ententes de règlement des litiges en matière de brevets pharmaceutiques. Pour plus de détails concernant le livre blanc, veuillez consulter notre bulletin d’Actualités.

L’ébauche de 2015 abordait de manière beaucoup plus détaillée que jamais auparavant les développements récents relatifs à la politique sur la concurrence et à la législation sur la PI, ce qui démontrait que le Bureau se penchait sur ces questions et reconnaissait que des changements importants à ses orientations étaient nécessaires. L’ébauche de 2015 présentait la position du Bureau en matière d’application de la loi relativement à un éventail de pratiques et de questions particulières à la PI, notamment les ententes de règlement des litiges en matière de brevets, la substitution de produits, les trolls de brevets, l’élaboration de normes en collaboration et les brevets essentiels au respect des normes. Comme il est mentionné ci-dessus, il y a eu un long et vaste processus de consultation a à l’égard de l’ébauche de 2015, et le Bureau a également pu profiter du fait que les autorités chargées de l’application des lois antitrust dans d’autres territoires de compétence, comme en Europe, en Chine et en Corée, entreprenaient des consultations semblables.

Fait à noter, les LDPI de 2016 empruntent la même approche conceptuelle globale des relations entre la législation sur la concurrence et la PI que ce qui était énoncé dans les LDPI de 2000. Les points saillants des LDPI de 2016 sont présentés ci-dessous.

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B. Règlement de poursuites aux termes du règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité)

Dans les LDPI de 2016, le Bureau a répondu efficacement aux critiques du livre blanc, il a considérablement éclairci son approche en matière d’application de la loi, et a éliminé l’idée d’un régime de notification, dans le cas des règlements de litiges en matière de brevets.

Le Bureau reconnaît explicitement les avantages des règlements entre les sociétés pharmaceutiques fabriquant des médicaments de marque et les sociétés fabriquant des génériques, aux termes du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) (RMBAC) – pour les parties elles-mêmes et pour la société en général – à la restriction près que « les règlements de litiges, toutefois, peuvent constituer un risque pour la concurrence si l’entente entre les parties va au-delà de ce qui est raisonnablement nécessaire pour en arriver à un règlement, comme le fait d’inclure un paiement pour retarder une concurrence au niveau des médicaments génériques ».

Fait important, en établissant le contexte de cet exposé détaillé du cadre d’analyse que le Bureau applique à l'examen de ces règlements et aux facteurs qu’il prendra en considération, le Bureau souligne qu’il existe des différences considérables entre les régimes de réglementation des divers pays, ce qui peut « avoir une incidence sur les mesures incitatives visant à amener les parties à conclure des ententes et à respecter les conditions des règlements qui sont en vigueur au Canada ». Le Bureau souligne les caractéristiques du RMBAC du Canada, qui se distinguent de celles du régime américain et qui sont pertinentes tant en ce qui a trait aux mesures incitatives visant à amener les fabricants de médicaments génériques à contester les brevets qu'aux modalités des règlements des procédures en vertu du RMBAC, notamment : l’absence d’une période d’exclusivité pour le premier fabricant de médicaments génériques à contester le brevet d’un fabricant de médicaments de marque; la capacité des fabricants de génériques de réclamer des dommages-intérêts au titulaire de brevet aux termes de l’article 8 du RMBAC; le risque de double litige pour les fabricants de médicaments de marque et les fabricants de génériques (p. ex. après être parvenu à défendre une procédure d’interdiction présentée en vertu du RMBAC, le fabricant de médicaments génériques est confronté à la possibilité que le fabricant de médicaments de marque engage une poursuite en contrefaçon si le fabricant de médicaments génériques décide de commercialiser son produit avant l’expiration du brevet; et un fabricant de médicaments de marque dont la demande d’interdiction est acceptée continue d’être confronté à la possibilité que son brevet fasse l’objet d’une invalidation); et les importantes restrictions relativement aux prix que les fabricants de médicaments de marque et de médicaments génériques peuvent exiger pour leurs produits afin d’être inscrits dans les formulaires provinciaux.

L’approche de l’application de la loi empruntée par le Bureau à l’égard des règlements de litiges peut se résumer comme suit :

  1. Entente relative à une mise en marché séparée : aucun risque lié à la législation sur la concurrence.

Si un règlement n’implique pas que le fabricant du médicament de marque fournisse d'autre contrepartie au fabricant du médicament générique que de lui permettre d’accéder au marché au plus tard à l’échéance du brevet (entente relative à une mise en marché séparée), le Bureau n’examinera pas le règlement en vertu de la Loi.

  1.  Les règlements « trompe-l’œil » et les règlements s’étendant au-delà du potentiel d’exclusion du brevet sont analysés en vertu des dispositions pénales de l’article 45 sur le complot.

Le Bureau examinera un règlement en vertu des dispositions pénales de l’article 45 uniquement si : (a) le règlement s’étend au-delà du potentiel d’exclusion du brevet en retardant la commercialisation du médicament générique après la date d’expiration du brevet; (b) le règlement s’étend au-delà du potentiel d’exclusion du brevet en limitant la concurrence pour les produits qui ne sont pas liés au produit faisant l’objet des procédures en vertu du RMBAC; ou (c) le règlement est un « trompe-l’œil », de sorte qu'il est conclu même si les parties admettent que le brevet est invalide ou qu'il n'y a pas eu de violation de brevet.

En ce qui concerne le point (c), les LDPI de 2016 précisent que le Bureau considérera un règlement comme étant un trompe-l’œil si le Bureau a des motifs de croire que les deux parties ont admis que le brevet était invalide et/ou qu'il n'y avait pas eu de violation de brevet. Bref, cela décrit une situation dans laquelle « le RMBAC et le règlement sont utilisés pour dissimuler un complot ». En pareil cas, le Bureau ferait enquête pour vérifier si les parties sont parvenues à une entente en violation de l’article 45. Si le Bureau croyait qu’une telle entente a été conclue, il transmettrait l’affaire au directeur des poursuites pénales (« DPP »). Lorsqu’une affaire est transmise au DPP, mais que celui-ci décide de ne pas intenter de poursuite, le Bureau peut décider de réévaluer si le règlement devrait faire l’objet d’une solution en vertu des dispositions relatives aux affaires susceptibles d’examen de la Loi.

  1. Entente relative à une mise en marché séparée, avec paiement du fabricant du médicament de marque au fabricant du générique, sans être un trompe-l’œil :  analysée aux termes de la disposition civile de l'article 90.1 sur les pratiques susceptibles d’examen.

Le Bureau précise qu’un règlement selon lequel un fabricant de médicaments de marque offre une compensation au fabricant de génériques, en plus de permettre l’accès du médicament générique sur le marché, pourrait créer un tort sur le plan de la concurrence :

Puisque le fabricant du médicament de marque réaliserait habituellement davantage de bénéfices en empêchant le médicament générique d’accéder au marché que ce que le fabricant de médicaments de marque et le fabricant de médicaments génériques recevraient ensemble en se livrant concurrence sur le marché (parce que les médicaments génériques se vendent généralement à un prix plus abordable que les médicaments de marque, alors que la différence représente des économies qui reviendraient aux acheteurs de médicaments), les parties partagent le même incitatif qui consiste à céder le marché au fabricant de médicaments de marque et à partager les bénéfices obtenus parce qu’on évite la concurrence. La préoccupation qu’entretient la concurrence en rapport avec le règlement consiste dans ce que le paiement obtenu par le fabricant de médicaments génériques peut résulter du partage des bénéfices supra-concurrentiels (qui sont maintenant garantis) du fabricant de médicaments de marque. Les acheteurs de médicaments peuvent être touchés par ce type de règlement en raison des prix plus élevés, alors que les patients pourraient connaître des délais au niveau de l’accès à des médicaments abordables.

Puisqu’un règlement n’implique pas qu’une seule partie, le Bureau examinerait généralement un règlement comme une entente entre concurrents, aux termes de l’article 90.1 de la Loi, et appliquerait son cadre d’analyse, tel qu'établi dans les Lignes directrices sur la collaboration entre concurrents du Bureau. (Les LDPI de 2016 indiquent que puisque les pratiques en matière de règlements sont dynamiques et continuent d’évoluer, des circonstances peuvent se produire où le Bureau décide d’examiner un règlement assorti d’un paiement, en vertu des dispositions sur l’abus de position dominante de l’article 79, si les éléments requis sont présents.)

Au moment de déterminer si un règlement aura probablement pour résultat de prévenir ou d’atténuer de manière substantielle la concurrence, le Bureau adoptera l’option « en l’absence ». Plus particulièrement, le Bureau déterminera si, « en l’absence » de règlement, le fabricant de médicaments génériques serait entré sur le marché avant la date prévue dans le règlement, en examinant si l’importance du paiement allait probablement avoir pour effet de retarder l’entrée sur le marché du générique, et si une entrée hâtive du générique sur le marché aurait fait abaisser les prix payés par les acheteurs de médicaments.

En ce qui concerne le paiement, le Bureau indique que la forme de paiement (p. ex. un transfert monétaire ou une rémunération pour services rendus) ne modifie en rien l’analyse fondamentale du Bureau quant à savoir si son effet était de retarder l’entrée sur le marché du médicament générique, et que le Bureau prendrait en considération certains facteurs comme : la valeur marchande de tout bien ou service fourni par le fabricant de médicaments génériques; la gravité de l’exposition aux dommages selon l’article 8 pour le fabricant de médicaments de marque aux termes du RMBAC; et les coûts restants que devra vraisemblablement assumer le fabricant de médicaments de marque sans règlement du litige. Les coûts restants en l'absence d'un règlement du litige peuvent comprendre les coûts prévus d’une autre action en contrefaçon de brevet et d’une demande reconventionnelle pour invalidation de brevet ainsi que les coûts causant potentiellement préjudice lors de la demande d’interdiction et des actions intentées en cas de violation ou d’invalidation. Le Bureau tiendrait également compte d’autres justifications, notamment les gains d’efficacité possibles que le règlement permettrait de réaliser et qui seraient impossibles à atteindre en l’absence de règlement.

En ce qui concerne la question de savoir si l’arrivée plus tôt sur le marché de médicaments génériques aurait entraîné une diminution des prix, le Bureau précise qu’il tiendrait compte de ce qui suit : la différence de prix probable qui existerait entre le prix des médicaments de marque et le prix des médicaments génériques; le fait que d’autres fournisseurs éventuels de médicaments génériques ont déposé ou étaient susceptibles de déposer des avis d’allégation et, le cas échéant, le moment où ces produits se trouveraient sur le marché; et s’il y avait d’autres fournisseurs de produits génériques qui avaient signifié des avis d’allégation et étaient impliqués dans un litige aux termes du RMBAC avec le fournisseur de médicaments de marque, le Bureau chercherait à déterminer si ce dernier était en train de négocier des règlements avec les fournisseurs de génériques et, le cas échéant, les modalités envisagées.

Si le Bureau détermine que le montant du paiement était si élevé qu’il a probablement retardé l’arrivée sur le marché, que les effets concurrentiels du retard du fournisseur de génériques étaient considérables, alors que l’arrivée sur le marché au moment opportun des autres fournisseurs de médicaments génériques n’était pas susceptible de présenter l’ampleur et l’étendue permettant de limiter suffisamment le capacité des fournisseurs de produits de marque et génériques d’exercer un pouvoir sur le marché concerné, il en viendrait à la conclusion que le règlement a empêché ou diminué la concurrence de manière substantielle, au sens de l’article 90.1. Lorsqu’on ne satisfait pas l’exception sur le plan de l’efficacité, le Bureau peut chercher réparation devant le tribunal afin d’interdire à quiconque de poser quelque geste que ce soit en vertu du règlement ou d’exiger qu’un individu (avec le consentement de celui-ci et du Bureau) pose tout autre geste.

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C. Substitution de produits

Les LDPI de 2014 indiquaient que le Bureau ne considérait plus la non-utilisation de la PI par un titulaire de droits de PI comme le « simple exercice » d’un droit de PI, ce qui faisait en sorte que les allégations relatives à la non-utilisation de la PI par un titulaire de droits de PI seraient susceptibles d’examen, aux termes des dispositions générales de la Loi, plutôt qu’uniquement en vertu de l’article 32.

Le retrait de la « non-utilisation de la PI » de la définition de « simple exercice » dans les LDPI de 2014 semblait s'expliquer par le fait que le Bureau ne voulait pas être empêché de contester la substitution de produits en tant qu’agissements potentiellement anticoncurrentiels, aux termes de la disposition sur l’abus de position dominante à l’article 79 de la Loi. (Tant que la définition de « simple exercice » englobait la non-utilisation de la PI, le retrait du marché d’un produit breveté pouvait être qualifié de « simple exercice » d’un droit de PI, et n’était donc pas visé par les dispositions générales de la Loi relatives à l’application de la loi.)

Fait à noter, les LDPI de 2016 affinent encore l’approche du Bureau quant à ce qui constitue le « simple exercice » d’un droit de PI, précisant que « le Bureau définit le simple exercice d’un droit de PI comme l’exercice du droit du titulaire d’empêcher unilatéralement d’autres personnes d’utiliser la PI. Le Bureau considère l’utilisation ou la non-utilisation de la PI par un titulaire de droits de PI comme le simple exercice d’un droit de PI ». Cependant, la note de bas de page correspondante dit ceci : « comme il est indiqué dans l’exemple 9A, dans un petit nombre de circonstances, la non-utilisation d’un droit de PI est considérée comme étant plus que le « simple exercice » d’un droit de PI, ce qui est susceptible de soulever des questions au regard des dispositions générales de la Loi. » Par conséquent, le Bureau est revenu, dans une certaine mesure, à la définition originale figurant dans les LDPI de 2000, avec la mise en garde que dans un « petit nombre de circonstances », la non-utilisation d’un droit de PI pouvait néanmoins soulever des préoccupations en vertu de la Loi.

L’exemple 9A reflète largement les faits publicisés relatifs à l’enquête que le Bureau a menée en 2012 sur Alcon Canada Inc.1] Dans cet exemple, un fabricant de produits pharmaceutiques de marque retire du marché un produit ancien qui perdra la protection de son brevet sous peu, et vend plutôt un nouveau produit similaire qui est breveté. Parallèlement, un substitut générique au produit ancien doit être lancé sur le marché, dès que le brevet de ce dernier expire. La concurrence créée par la commercialisation du médicament générique peut être entravée par le retrait du produit plus ancien (selon lequel le produit générique est formulé et pourrait lui être substitué), et par le lancement d’un produit analogue plus récent, protégé par un brevet. Le Bureau déclare que la conduite du fournisseur de produits de marque, qualifiée de « transition difficile », ferait probablement l’objet d’un examen aux termes de la disposition sur l’abus de position dominante de l’article 79 de la Loi, si le Bureau estimait que cette conduite visait à exclure ou à empêcher la mise en marché du médicament générique. L’exemple 9A expose en détail les mesures que le Bureau prendrait pour déterminer si, à son avis, la conduite en question constitue un abus de position dominante.

Cela fait contraste avec l’exemple 9B, dans lequel le fabricant de produits de marque ne retire pas son produit du marché, mais se contente de cesser d’en faire la promotion auprès des médecins. Le Bureau déclare que cette conduite, qualifiée de « transition facile » ne poserait probablement pas de problème en vertu de la Loi, tant qu’elle n'a pas sapé de manière anticoncurrentielle la base de prescription du produit de marque plus ancien (p. ex. en faisant des déclarations fausses ou erronées au sujet du produit).

Il est à noter que les deux exemples fournis dans les LDPI de 2016 ont trait à des activités dans le secteur pharmaceutique. On ignore si le Bureau songerait à faire enquête sur une présumée substitution de produits à l’extérieur du secteur pharmaceutique, ou si ses préoccupations se limitent à ce secteur hautement réglementé.

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D. Trolls de brevets

Les LDPI de 2016 font allusion au débat en cours sur l’établissement et la conduite de trolls de brevets. Certains considèrent que les activités des trolls de brevets peuvent faire augmenter le montant des règlements, car les trolls de brevets se voient présenter des incitatifs différents de ceux qui sont offerts aux titulaires des brevets originaux et ils ne peuvent pas faire l’objet de demandes reconventionnelles pour contrefaçon. Par contre, d’autres considèrent les trolls de brevets comme bénéfiques pour l’innovation, car ils aident les innovateurs à maximiser les bénéfices de leurs efforts de R et D ce qui stimule ensuite d’autres R et D. Les LDPI de 2016 mentionnent aussi qu'il y a une crainte que les trolls de brevets puissent utiliser des déclarations fausses ou erronées afin de soutirer des frais de licence aux petites entreprises qui veulent éviter un procès pour contrefaçon de brevet.

L’exemple 10 souligne que les entreprises qui obtiennent des brevets dans le seul but de les défendre contre des entreprises qui enfreignent présumément les technologies brevetées doivent, comme toutes les entreprises au Canada, se conformer aux dispositions de la Loi en matière de pratiques de marketing trompeuses et de publicité mensongère, qui interdisent de faire au public des déclarations fausses ou trompeuses sur un point important, dans les cas où la déclaration a pour but de promouvoir un produit ou une entreprise. La Loi contient, à l'égard des pratiques de marketing trompeuses et de publicité mensongère, des dispositions civiles permettant de les examiner ainsi que des dispositions pénales, et prévoit une violation potentielle de la disposition pénale dans les cas où la déclaration trompeuse est faite sciemment ou sans se soucier des conséquences. Par conséquent, les trolls de brevets devraient s’assurer que les avis envoyés aux présumés contrefacteurs de brevets ne contiennent pas de déclarations fausses ou trompeuses sur un point important.

En réponse aux commentaires reçus pendant la période de consultation, l’exemple 11 porte sur la cession de brevets aux seules fins d’application de la loi. Le Bureau fait remarquer que même si la cession d’un brevet est considérée comme quelque chose de plus important que le simple exercice d’un droit de PI, « les titulaires des droits de PI qui prennent les dispositions nécessaires pour appliquer plus efficacement leurs droits de PI ne soulèvent généralement aucun problème en vertu de la Loi ».

Le Bureau reconnaît que l’application de la loi sur la concurrence en matière de trolls de brevets évolue rapidement et, à mesure que la situation évolue, il continuera de parfaire son approche d’application de la loi.

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E. Élaboration de normes en collaboration et brevets essentiels au respect des normes

Les LDPI de 2016 reconnaissent que les activités d’élaboration des normes en collaboration, exercées par l’intermédiaire d’OEN, jouent un rôle précieux et avantageux sur le plan de la concurrence, en favorisant l’innovation et l’interopérabilité, en augmentant l’efficacité et en offrant un plus vaste choix aux consommateurs, en abaissant les coûts de production et en atténuant les obstacles à la mise en marché. Cependant, les LDPI de 2016 reconnaissent aussi et abordent, sur le plan pratique, le potentiel de comportement anticoncurrentiel par un titulaire de brevets essentiels au respect des normes tentant de tirer indûment parti de ses brevets (p. ex. par un brevet extorsionnaire, une embuscade tendue au moyen d’un brevet, en revenant sur son engagement en matière de licence, en refusant un engagement à accorder une licence ou en demandant une injonction après s’être engagé à concéder une licence). L’engagement, par les titulaires de brevets essentiels au respect des normes, à rendre disponibles les normes élaborées en collaboration, d’une manière juste, raisonnable et non discriminatoire, vise à contrebalancer les effets anticoncurrentiels de l’établissement de normes par les OEN, tout en préservant les effets favorisant la concurrence de cette élaboration de normes.

À titre préliminaire, les LDPI de 2016 dissipent la confusion créée par l'ébauche de 2015 à propos des brevets essentiels au respect des normes et des brevets distinctifs. Les LDPI de 2016 clarifient le fait que les brevets essentiels au respect des normes font partie des normes élaborées par des OEN officiels, ce qui élimine toute allégation selon laquelle les brevets essentiels au respect des normes englobent les brevets exclusifs distinctifs, y compris ceux que d’autres ont qualifiés de normes commercialement essentielles, ou « de facto ». Cela témoigne du fait que, même si un brevet distinctif peut faire augmenter l’emprise sur le marché, il le fait en concurrence avec les substituts disponibles, et cette emprise sur le marché est légalement et légitimement obtenue, et ne découle pas d’une entente entre concurrents. Par ailleurs, les brevets essentiels au respect des normes acquièrent leur emprise sur le marché au moyen des ententes d’élaboration de normes en collaboration avec des concurrents, ce qui, au plan pratique, élimine les substituts, et les responsables de la mise en œuvre deviennent « contraints » de respecter la norme.  Le contexte entourant les normes élaborées de manière conjointe ne fournit pas de justification à l’imposition de limites de nature antitrust à la revendication ordinaire et à la défense de brevet relativement aux brevets exclusifs distinctifs.

Les directives du Bureau concernant les incidences de la loi sur la concurrence sur la conduite du titulaire de brevet relativement à ses brevets essentiels au respect des normes assujettis à des modalités justes, raisonnables et non discriminatoires comportent les points saillants suivants :

  • La conduite conjointe d'OEN participants qui a clairement pour but d'établir une norme au sein de l'industrie serait examinée aux termes des dispositions civiles de l’article 90.1 sur les accords entre concurrents, et non aux termes des dispositions pénales de l'article 45 sur le complot.
  • Conformément aux directives et à la jurisprudence d’autres territoires de compétence, le Bureau a rejeté les arguments selon lesquels la présumée conduite anticoncurrentielle d’un titulaire de brevets essentiels au respect des normes assortis de modalités justes, raisonnables et non discriminatoires serait traitée uniquement comme un différend contractuel entre les parties. Les LDPI de 2016 indiquent que la présumée conduite anticoncurrentielle d’un titulaire de brevet essentiel au respect des normes sera examinée aux termes de la disposition de l’article 79 sur l’abus de position dominante. Cependant, le Bureau reconnaît « qu’une conduite pouvant donner lieu à un brevet extorsionnaire peut être assujettie aux règles du droit des contrats, et il envisagerait la possibilité d’exercer son pouvoir discrétionnaire dans un tel cas. Dans certains cas, il peut s’avérer impossible de contrer les répercussions d’une telle conduite sur la concurrence par des moyens autres que des mesures correctives prises en application du droit de la concurrence ».
  • Au moment de déterminer si le titulaire d’un brevet qui pose présumément un geste anticoncurrentiel est dans une position de domination, le Bureau cherchera à déterminer si le titulaire du brevet exerçait un pouvoir sur les marchés qui s’étendait à la technologie normalisée ou sur les marchés qui comprenaient des produits qui étaient à l’origine de la norme. Fait important, le Bureau ne s’appuiera « pas uniquement sur le pouvoir préexistant sur le marché qu’exerçait le titulaire du brevet (c.-à-d. tout pouvoir exercé sur le marché par le titulaire de brevet avant son comportement en question), mais également le pouvoir découlant de son comportement ». Au moment de déterminer si le geste anticoncurrentiel a eu, ou est susceptible d'avoir pour effet de prévenir ou d’atténuer considérablement la concurrence, le Bureau adoptera l’option « en l’absence », afin d’examiner si la conduite du titulaire de brevet a créé, préservé ou rehaussé son emprise sur un marché qui utilise la technologie normalisée :

Un élément essentiel de cet examen consisterait , pour le Bureau, à tenter de déterminer toute technologie alternative à laquelle l’OEN aurait pu avoir recours lorsque la norme a été choisie. De plus, le Bureau chercherait à déterminer toute norme technique ou technologie alternative que les entreprises pourraient adopter pour remplacer la norme de l’OEN après que celle-ci a été choisie. Si de telles alternatives existaient, le Bureau chercherait à prouver l’ampleur des frais de changement que les entreprises devraient assumer au moment d’adopter ces alternatives. Si des technologies alternatives avaient vraisemblablement été choisies comme norme de l’OEN, mais pour la conduite du titulaire de brevet, et si des alternatives à la norme de l’OEN n’existaient pas, ou si les frais de changements étaient exorbitants, le Bureau conclurait fort probablement que le titulaire du brevet a augmenté son emprise sur le marché qui comprend la technologie normalisée.

Le Bureau chercherait également à déterminer si la concurrence en souffrirait sur les marchés des produits où l’on a adopté la norme de l’OEN. Cette analyse permettrait de déterminer si les consommateurs de produits conformes à la norme seraient susceptibles de payer des prix plus élevés aux fabricants de ces produits qui se retrouvent confrontés à des coûts accrus pour accéder à la norme. Le Bureau chercherait des preuves de l’effet des redevances sur les prix des produits conformes aux normes et sur les options auxquelles les consommateurs pourraient se tourner s’ils étaient confrontés à une augmentation de ces prix.

  • Le Bureau établit clairement qu’au moment d’examiner les présumés gestes anticoncurrentiels (p. ex. brevets extorsionnaires, embuscades tendues au moyen d’un brevet, refus d’un engagement à accorder une licence ou demandes d’injonction), « le Bureau n’étant pas un organisme de réglementation des prix, il laisse les parties libres de négocier les taux de redevances ou de recourir aux tribunaux. En l’absence d’une violation très claire d’un engagement en matière de licence (p. ex. exiger une redevance nettement supérieure à un engagement ex ante), il ne prendra pas de mesures d'exécution à l’endroit d’un détenteur de brevet en s’appuyant uniquement sur l’importance des redevances qu’il exige ». Le Bureau poursuit en disant que, même s’il « ne réglementera pas les modalités spécifiques qu’un titulaire de brevet normalisé essentiel peut imposer lorsqu’il tente d’octroyer des licences sur son brevet », ces modalités sont susceptibles d’être examinées si elles risquent d'entraver la concurrence.
  • Les LDPI de 2016 abordent en profondeur l’éventuelle utilisation anticoncurrentielle d’injonctions par des titulaires de brevets essentiels au respect de normes assujettis à des modalités justes, raisonnables et non discriminatoires, un sujet qui a été source de litiges dans d’autres territoires de compétence. Le Bureau précise qu’un engagement à respecter des modalités justes, raisonnables et non discriminatoires n’est pas un engagement à concéder une licence en échange d’aucune redevance, et que les entreprises « ont le droit d’exiger des redevances pour récupérer la valeur de leur investissement ». Le Bureau précise les circonstances dans lesquelles il conclurait qu’il pourrait être approprié de tenter d’obtenir une injonction : « (i) lorsque l’éventuel détenteur de licence refuse de verser une redevance considérée comme étant juste, raisonnable et non discriminatoire par un tribunal ou un arbitre; (ii) lorsque l’éventuel détenteur de licence ne participe pas aux négociations entourant l’octroi d’une licence; (iii) lorsque l’éventuel détenteur de licence refuse, en connaissance de cause, de négocier (par exemple, en insistant sur des modalités clairement en dehors des limites de ce qui pourrait être considéré comme juste, raisonnable et non discriminatoire); ou (iv) lorsque l’éventuel détenteur de licence n’est pas en mesure de payer les dommages (p. ex. une entreprise en faillite). »

Il s’agit d’une section des LDPI de 2016 dans laquelle le Bureau prévient clairement qu’il « pourra reconsidérer certains aspects des lignes directrices énoncées dans cette sous-section à la lumière de l’expérience et des éventuelles nouvelles circonstances ».

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F. Conclusion

Les LDPI de 2016 dissipent une bonne partie des incertitudes créées par les LDPI de 2014 et par le livre blanc. De plus, les LDPI de 2016 fournissent une quantité de directives détaillées et pratiques sur l’approche adoptée par le Bureau en matière d'application de la loi, à l'égard de questions courantes liées à la PI.

Pour en savoir plus sur le présent bulletin d’Actualités ou sur les LDPI, veuillez communiquer avec un membre du groupe Droit de la concurrence et investissement étranger d’Osler.

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[1] L’enquête du Bureau portait sur le fait qu’Alcon avait, ou non, perturbé intentionnellement la fourniture d’un médicament (dont le brevet était sur le point d’expirer), dans le cadre d’une stratégie visant à inciter les patients à passer à une formulation de deuxième génération du médicament et à entraver une concurrence importante de la part des fabricants de génériques. L’enquête a finalement  été abandonnée en 2014, après qu’Alcon eut volontairement remis sur le marché canadien le médicament qu’il avait retiré, car la dynamique concurrentielle était réapparue sur le marché, et la stratégie de conversion temporaire ne semblait pas avoir retardé la commercialisation du générique.