Auteurs(trice)
Associé, Litiges, Toronto
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Sociétaire, Litiges, Toronto
Sociétaire, Litiges, Toronto
Points à retenir
- La Cour supérieure de l’Ontario a refusé de certifier le recours collectif envisagé dans l’affaire Donegani v. Facebook, Inc. en raison de l’absence de preuve de l’existence d’un préjudice indemnisable.
- La juge Akbarali a souligné que, en l’absence d’un préjudice indemnisable, le recours collectif ne favoriserait pas l’accès à la justice ni ne ferait la promotion de l’économie des ressources judiciaires.
- Les demandeurs ont admis que l’existence de dommages-intérêts pécuniaires était peu probable, et le tribunal a estimé qu’une action visant uniquement des dommages-intérêts symboliques était insuffisante.
- Cette décision renforce la tendance des tribunaux à mettre l’accent sur leur rôle de contrôleurs et à refuser de certifier un recours collectif lorsque seuls des dommages-intérêts symboliques sont demandés.
Le 24 octobre 2025, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a rejeté la motion en certification d’un recours collectif envisagé par des demandeurs dans l’affaire Donegani v. Facebook, Inc.[1]. La juge Akbarali a estimé que le recours collectif envisagé n’était pas le meilleur moyen de régler les questions communes, d’autant plus qu’il n’y avait aucune preuve de l’existence d’un préjudice indemnisable. Elle a confirmé que la preuve de l’existence d’un préjudice indemnisable était une « condition préalable fondamentale » (fundamental prerequisite) à la certification d’un recours collectif.
Contexte
Les demandeurs ont allégué que Facebook avait violé les contrats qu’elle avait conclus avec ses utilisateurs du fait qu’elle aurait partagé leurs données avec divers fabricants d’appareil et applications tierces. La juge Akbarali a rendu sa décision à l’issue de la troisième audience de certification dans cette affaire. En 2022, après le début de l’audience, les demandeurs ont demandé et obtenu un ajournement en vue de rassembler davantage de preuves et de modifier leur déclaration. En 2024, la juge Akbarali a rendu ses conclusions initiales sur la cause d’action et les critères relatifs aux questions communes[2]. Elle a également demandé aux demandeurs de revenir avec une nouvelle définition de « groupe » et de nouveaux arguments traitant, entre autres, de la viabilité de la définition de « groupe » et de l’exigence relative au meilleur moyen de régler les questions communes.
Il convient de noter que les demandeurs ont admis que l’existence de dommages-intérêts pécuniaires était peu probable et ont estimé que, si le tribunal certifiait la question des dommages-intérêts symboliques comme une question commune, les demandeurs renonceraient à demander des dommages-intérêts compensatoires et ne réclameraient que des dommages-intérêts symboliques.
Refus de la certification par le tribunal
La juge Akbarali a estimé que, en l’espèce, un recours collectif n’était pas le meilleur moyen de régler les questions communes au motif que, indépendamment du fait que les demandeurs renonçaient à des dommages-intérêts compensatoires, il n’y avait aucune preuve de l’existence de dommages-intérêts compensatoires dans le dossier (et les demandeurs ont admis que l’existence de tels dommages-intérêts était peu probable). S’appuyant sur la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Société des loteries de l’Atlantique c. Babstock[3], ainsi que sur plusieurs décisions récentes des tribunaux de l’Ontario confirmant le même principe, la juge Akbarali a déclaré que « [traduction libre] la nécessité de prouver l’existence d’un préjudice indemnisable était une condition préalable fondamentale à la certification d’un recours collectif ».
De plus, la juge Akbarali a conclu ce qui suit :
- Accès à la justice : En l’absence de préjudice indemnisable, l’action ne répondrait pas à l’objectif de promotion de l’accès à la justice.
- Économie des ressources judiciaires : En l’absence de préjudice indemnisable, « [traduction libre] dans un système judiciaire sous-financé, les ressources judiciaires sont mieux utilisées ailleurs ».
- Modification du comportement : Les démarches devant les autorités de réglementation constituaient un meilleur moyen d’encourager la modification du comportement, en particulier en l’absence de preuve de l’existence d’un préjudice indemnisable.
En plus de ne pas satisfaire au critère du meilleur moyen pour régler les questions communes, les demandeurs n’ont pas non plus fourni de définition viable de « groupe ». La juge Akbarali a estimé que, en ce qui a trait à ce terme, la définition envisagée était inappropriée, car elle était à la fois trop large et trop restrictive, et, pour en déterminer les limites, il aurait fallu faire enquête sur la situation de chacun des membres du groupe.
Conclusions
La décision dans l’affaire Donegani s’inscrit dans une tendance croissante des tribunaux à mettre l’accent sur leur rôle de contrôleurs à l’étape de la certification et confirme que les tribunaux continuent de refuser de certifier un recours collectif lorsque seuls des dommages-intérêts symboliques sont demandés. La juge Akbarali a expliqué de manière succincte pourquoi une action formulée de cette manière ne servirait pas les objectifs poursuivis par les recours collectifs.
L’équipe d’Osler qui a représenté Facebook, Inc. dans cette affaire était dirigée par Mark A. Gelowitz, Robert Carson, Lauren Harper et Clare Barrowman.
[1] Donegani v. Facebook, Inc., 2025 ONSC 6020.
[2] Donegani v. Facebook, Inc., 2024 ONSC 7153.
[3] Société des loteries de l’Atlantique Inc. c. Babstock, 2020 CSC 19.