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Le Canada suit l’exemple de la Colombie-Britannique et reconnaît le titre de la Nation haïda sur les îles Haïda Gwaii Le Canada suit l’exemple de la Colombie-Britannique et reconnaît le titre de la Nation haïda sur les îles Haïda Gwaii

29 mai 2025 4 MIN DE LECTURE

Contexte

Le 4 décembre 2024, le Conseil de la Nation haïda (Nation haïda) et le gouvernement du Canada (Canada) ont conclu l’Accord Chiix̲uujin / Chaaw K̲aawgaa « Big Tide (Low Water) » sur les terres visées par le titre haïda [PDF; en anglais seulement] reconnaissant le titre ancestral de la Nation haïda sur les îles Haïda Gwaii (l’accord fédéral).

Comme nous l’avons écrit précédemment, le 14 avril 2024, la Colombie-Britannique et la Nation haïda ont conclu l’Accord Gaayhllxid • Gíhlagalgang « Rising Tide » sur les terres visées par le titre haïda [PDF; en anglais seulement], dans lequel la Colombie-Britannique reconnaît le titre ancestral de la Nation haïda sur les îles Haïda Gwaii (l’accord provincial). Le Canada n’y étant pas partie, l’accord provincial ne traite pas des intérêts du Canada sur les îles Haïda Gwaii et n’y déroge pas. L’accord fédéral répond à certaines des questions concernant les intérêts du Canada sur les îles Haïda Gwaii.

L’accord fédéral

Le fait le plus marquant de l’accord fédéral est sans doute que le Canada soutiendra désormais conjointement l’action en justice en cours de la Nation haïda visant à obtenir une déclaration à l’égard du titre ancestral en vertu de l’article 35 de la Constitution (l’affaire relative au titre haïda)[1]. L’affaire relative au titre haïda présente un scénario unique dans lequel toutes les parties – la Nation haïda, le Canada et la Colombie-Britannique – cherchent conjointement à obtenir une déclaration à l’égard du titre ancestral pour la Nation haïda[2].

La structure et le libellé de l’accord fédéral reflètent ou imitent largement celui de l’accord provincial. Comme l’accord provincial, l’accord fédéral :

  • ne déroge pas aux intérêts en fief simple, aux terres de village et de réserve et à la fourniture de services publics (tels que les services postaux et les systèmes de navigation) sur les terres haïdas;
  • prévoit que les décisions relatives à la gestion des terres et des ressources sur les îles Haïda Gwaii[3] seront prises en conformité avec les titres ancestraux haïdas[4];
  • prévoit que les terres de la Couronne qui ne sont plus nécessaires aux fins pour lesquelles elles sont détenues par le Canada reviendront à la Nation haïda[5].

Contrairement à l’accord provincial, qui prévoit un processus de transition d’une durée estimative de deux ans, l’accord fédéral prévoit un processus de transition d’une durée estimative de cinq ans[6]. Les parties se sont engagées à négocier plusieurs questions importantes au cours du processus de transition, notamment le processus permettant de déterminer si le Canada n’a plus besoin des terres sur lesquelles le fédéral a des intérêts et le processus de restitution de ces terres à la Nation haïda[7], la réconciliation des lois et des compétences de chaque partie[8] et six questions énumérées[9] (collectivement, les questions reportées).

Selon l’accord fédéral, le titre ancestral comprend également la zone intertidale et s’étend jusqu’à la laisse de basse mer[10].

Conclusion

L’accord fédéral constitue une étape historique dans la reconnaissance par le Canada d’un titre ancestral par le biais d’un accord et d’un règlement plutôt que par une décision de justice. Cependant, quelques questions restent en suspens, notamment, et surtout, la suivante :

Comment les tribunaux traiteront-ils une revendication conjointe de titre ancestral?

Dans le passé, il a été difficile pour les parties d’établir des revendications de titre ancestral en vertu du critère établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Delgamuukw c. Colombie-Britannique[11]. Dans l’affaire The Nuchatlaht v. British Columbia, le tribunal a accordé un titre ancestral limité après que le Canada et la Colombie-Britannique eurent accepté que les Nuchatlaht pouvaient faire valoir un titre plus limité que celui qu’ils revendiquaient au départ[12]. Il reste à voir comment un tribunal traitera le Canada, la Colombie-Britannique et la Nation haïda, qui cherchent conjointement à obtenir un titre ancestral sur l’ensemble des îles Haïda Gwaii.

Comment les parties négocieront-elles les questions reportées?

Les questions reportées comprennent certains des aspects les plus importants de l’accord. En reportant la négociation de ces points, les parties ont retardé une partie importante et significative des négociations. La manière dont ces questions seront résolues au cours du processus de transition sera déterminante pour la mise en œuvre de l’accord fédéral.


[1] Accord fédéral, par. 8.1(a).

[2] Accord fédéral, par. 8.1(a).

[3] Accord fédéral, art. 1.2.

[4] Accord fédéral, art. 4.23.

[5] Accord fédéral, art. 4.3.

[6] Accord fédéral, annexe A, par. 3(b).

[7] Accord fédéral, art. 4.3.

[8] Accord fédéral, art. 3.3.

[9] Espace aérien, arrangements fiscaux, fiscalité, pêche et questions connexes, autres questions maritimes, autres questions. Voir l’article 6.1 de l’accord fédéral.

[10] Accord fédéral, art. 9.1

[11] [1997] 3 RCS 1010 [arrêt Delgamuukw].

[12] 2024 BCSC 628