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S’y retrouver dans les congés de maladie et les documents médicaux des employés S’y retrouver dans les congés de maladie et les documents médicaux des employés

6 juin 2025 7 MIN DE LECTURE

Les employeurs se posent souvent des questions sur les renseignements qu’ils peuvent demander à l’employé qui prend un congé de maladie ou qui demande des accommodements liés à son état de santé.

Par suite de modifications législatives adoptées récemment dans plusieurs provinces, les employeurs ne pourront plus demander à leurs employés de fournir un document médical (par exemple, un billet de médecin ou un certificat médical) pour leurs absences de courte durée. Nous donnons ci-dessous un aperçu des modifications en question ainsi que des indications sur les renseignements que les employeurs sont en droit d’obtenir de l’employé qui demande des accommodements liés à une incapacité physique ou mentale.

Réforme législative : documents médicaux

Les lois limitent de plus en plus le droit des employeurs à demander des documents médicaux pour les absences de courte durée, notamment en Ontario, au Québec, en Saskatchewan et, plus récemment, en Colombie-Britannique. Par-là, on vise à réduire le fardeau administratif qui pèse sur le système de santé et à protéger la vie privée des employés, tout en préservant le besoin d’information de l’employeur aux fins de la gestion et de la prise en charge de ses responsabilités eu égard au lieu de travail.

En Ontario, en vertu de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi, depuis le 28 octobre 2024, les employeurs ne peuvent plus exiger des employés qu’ils fournissent un billet ou un certificat d’un praticien de la santé qualifié pour se prévaloir d’un « congé de maladie », soit les trois jours de congé non rémunéré avec protection de l’emploi auxquels les employés de l’Ontario ont droit chaque année civile pour cause de maladie, de blessure ou d’urgence médicale personnelle.

Au Québec, le projet de loi 68 a apporté à la Loi sur les normes du travail des modifications qui sont entrées en vigueur le 1er janvier 2025. Ainsi, les employeurs du Québec ne peuvent plus demander aux employés de fournir des documents attestant de la raison de leur absence du travail pour les trois premières périodes d’absence n’excédant pas trois jours consécutifs prises chaque année.

En Saskatchewan, s’il est adopté, le projet de loi 5 interdira aux employeurs de demander à un employé un billet de médecin attestant de l’incapacité de l’employé à travailler, à moins que l’employé n’ait été absent pendant au moins cinq jours ouvrables consécutifs ou n’ait été absent deux fois pendant au moins deux jours consécutifs au cours des 12 mois précédents.

En Alberta, la législation régissant les normes d’emploi ne prévoit actuellement aucune restriction de ce genre; les employeurs peuvent toujours demander des billets de médecin pour autant que leurs demandes soient raisonnables. Toutefois, compte tenu de la tendance manifeste des provinces à restreindre la capacité des employeurs à demander des billets de médecin, il est possible que l’Alberta finisse par suivre le mouvement.

L’exemple le plus récent de ce mouvement est le projet de loi 11 de la Colombie-Britannique, intitulé Employment Standards Amendment Act, 2025, présenté le 15 avril 2025. À l’instar du projet de loi 5 de la Saskatchewan et des changements déjà mis en œuvre en Ontario et au Québec, le projet de loi 11 introduit des modifications qui, si elles sont adoptées, limiteront l’utilisation des billets de médecin et l’obligation d’en obtenir auprès des employés.

À l’heure actuelle, la loi de la Colombie-Britannique intitulée Employment Standards Act (ESA) autorise les employeurs à demander une « preuve raisonnablement suffisante » (reasonably sufficient proof) qu’un employé est malade. Le projet de modification de l’ESA préciserait que les employeurs ne peuvent pas demander, et les employés ne sont pas tenus de fournir, un billet rédigé par un médecin, une infirmière praticienne spécialisée ou une infirmière autorisée comme preuve que l’absence de courte durée de l’employé était liée à une maladie.

Malgré ce qui précède, en règle générale, dans l’une ou l’autre des provinces, les employeurs peuvent demander un document médical justifiant le congé de maladie d’un employé si son absence est prolongée (c.-à-d. un congé de maladie de longue durée) ou si sa maladie ou son incapacité exige un accommodement du lieu de travail.

Obligation d’accommoder et demandes de l’employeur

Les employeurs ont l’obligation d’accommoder les employés en situation d’incapacité physique ou mentale (parmi d’autres motifs protégés), dans la mesure où ils peuvent le faire sans subir eux-mêmes un préjudice injustifié. Dans le contexte des congés de maladie, pour s’acquitter de cette obligation, les employeurs peuvent devoir obtenir certains renseignements médicaux de la part de leurs employés afin de comprendre comment favoriser au mieux un retour au travail sûr et productif.

L’employeur a souvent besoin d’un document médical pour vérifier la légitimité de la demande de congé ou d’accommodement d’un employé. Lorsqu’un employé demande un accommodement en raison de son état de santé, l’employeur a l’obligation, de par la loi, d’envisager et, selon le cas, de fournir cet accommodement. Pour s’acquitter de cette responsabilité, l’employeur a le droit de recevoir les renseignements médicaux dont il a besoin pour comprendre la nature et la portée de l’accommodement demandé.

L’étendue des renseignements qui peuvent être demandés dépend de la durée de l’absence, de la nature de la maladie et de la question de savoir si un accommodement est nécessaire ou non. Il est généralement interdit d’exiger des employés qu’ils fournissent des diagnostics médicaux, une liste de symptômes ou des antécédents médicaux détaillés. En règle générale, les employeurs peuvent demander à leurs employés les renseignements suivants :

  • un billet de médecin ou un certificat médical confirmant la maladie de l’employé (sous réserve des restrictions prévues par la loi)
  • la durée prévue de l’absence
  • la confirmation de la nécessité d’un accommodement et des recommandations qui aideraient l’employé à reprendre le travail en toute sécurité
  • toute limitation ou restriction fonctionnelle en rapport avec les tâches à accomplir (par exemple, interdiction de soulever des charges, horaires réduits)
  • une clarification sur le caractère temporaire ou permanent de l’état de santé

Il peut ne pas être nécessaire ou approprié de demander tous les renseignements susmentionnés lorsque l’employé est en congé de maladie de courte durée. Si les employeurs ont un intérêt légitime à vérifier ces absences, leur droit à demander des renseignements médicaux n’est pas illimité. Les employeurs ne peuvent pas exiger des détails non pertinents, excessifs ou trop intrusifs, et ne peuvent pas créer des obstacles inutiles pour les employés. Tout renseignement demandé doit être directement lié aux fonctions de l’employé et proportionnel à la durée de l’absence.

Les employés sont censés collaborer à la procédure d’accommodement. En cas d’absence prolongée ou si l’employé demande certains accommodements, l’employeur peut avoir le droit d’obtenir des renseignements supplémentaires, mais il doit éviter les demandes excessives et doit protéger les renseignements personnels sur la santé.

Conclusion

Les employeurs faisant affaire dans les provinces susmentionnées pourraient devoir revoir et mettre à jour leurs politiques et pratiques pour se conformer aux nouvelles dispositions législatives. Dans les provinces où les nouvelles dispositions législatives accordent aux employés plus de souplesse, par exemple un délai accru pour consulter un médecin et obtenir un billet de médecin, les employeurs devraient également envisager d’adapter en conséquence les contrats de travail applicables et les politiques connexes.

Nous continuerons à suivre l’évolution du projet de loi 11 en Colombie-Britannique. Si vous avez besoin de plus de détails sur le projet de loi ou si vous avez besoin d’aide pour vous y retrouver dans les congés de maladie des employés, veuillez communiquer avec un membre du groupe Droit du travail et de l’emploi d’Osler.