Dans un récent jugement, la Cour supérieure du Québec a affirmé sa volonté d’examiner rigoureusement le bien-fondé des actions collectives, même si elles ont déjà été autorisées. Le litige en question, Option Consommateurs c. Société des loteries du Québec (Loto-Québec), 2025 QCCS 476, reposait sur des allégations de fausses représentations et d’omissions de la part de Loto-Québec dans son offre de jeux en ligne. Cette décision se distingue par le fait qu’elle fait partie des cas peu fréquents où une action collective a été jugée au mérite.
Violation non prouvée de la Loi sur la protection du consommateur du Québec
La partie demanderesse soutient que le jeu en ligne « Big Money Slingo » de Loto-Québec, qui réunit des jeux de machine à sous et de bingo, a présenté de manière trompeuse l’importance du facteur de chance dans sa dynamique de jeu (gameplay). Plus précisément, la partie demanderesse alléguait que le jeu donnait la fausse impression que le hasard était un facteur tout au long du jeu. De plus, elle soutient que ces fausses représentations constituent plusieurs violations de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) du Québec.
Dans le cadre de son analyse, le Tribunal a procédé à un examen rigoureux des rapports d’experts présentés par les deux parties. En effet, le Tribunal a estimé que la preuve mathématique des experts fournie par la partie demanderesse sur les « quasi-succès » produits par le jeu n’était pas fiable et était inutile, retenant plutôt le rapport d’expertise produit en preuve par la partie défenderesse, suggérant que des facteurs de probabilité aléatoires intervenaient à chaque tour, alors qu’ils n’intervenaient qu’une seule fois et uniquement au début du jeu.
Le Tribunal a conclu que la partie demanderesse n’avait pas réussi à prouver que Loto-Québec avait fait des déclarations fausses ou trompeuses, selon la grille d’évaluation établie par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Richard c. Time. Par ailleurs, la partie demanderesse n’a pas réussi à démontrer que le moment où les facteurs de probabilités aléatoires jouent sur la dynamique de jeu serait un critère déterminant et important pour l’ensemble des membres du groupe lorsqu’ils décident de participer au jeu en ligne. Par conséquent, la partie demanderesse ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve pour démontrer que Loto-Québec s’était livrée à une pratique interdite en vertu de la LPC du Québec.
Une autre action collective rejetée au mérite
Le rejet d’une action collective sur le fond n’est pas une exception au Québec. Cette cause rappelle l’issue de nombreux jugements d’actions collectives rendus au Québec depuis que nous avons examiné l’arrêt Lamoureux c. Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM), 2021 QCCS 1093 dans notre article First merits decision dismissing privacy class action in Canada (Première décision sur le fond rejetant un recours collectif en matière de protection des renseignements personnels au Canada). Plus récemment, les affaires Fortin c. Mazda Canada inc., 2022 QCCA 635, Lussier c. Expedia inc, 2024 QCCS 472 et Duguay c. General Motors du Canada ltée, 2023 QCCS 3223, ont été jugées sur le fond et rejetées par les tribunaux du Québec.
Points à retenir
Dans la décision Option Consommateurs, le tribunalsouligne une volonté claire de la part de la Cour supérieure du Québec de soumettre la preuve à l’appui des actions collectives à une analyse rigoureuse. Les professionnels du droit doivent garder à l’esprit que l’autorisation d’une action collective ne garantit en rien une décision favorable sur le fond. Cette affaire nous rappelle que le fardeau de la preuve repose sur la partie demanderesse pendant toute la durée des procédures.