Défis de conformité à la Directive en matière d’approvisionnement dans le SP

5 Fév 2016 6 MIN DE LECTURE

Le secteur des services publics de l’Ontario a été ébranlé par plusieurs scandales très médiatisés liés à l’approvisionnement au cours des dernières années. Pour remédier à la situation, le gouvernement provincial a mis en place des mesures, dont la Directive en matière d’approvisionnement dans le SP (la « Directive »), pour encadrer le processus d’approvisionnement de divers organismes du secteur parapublic, y compris les hôpitaux. Si certains hôpitaux ont réussi à mettre en œuvre la Directive et à établir un processus d’approvisionnement équitable et efficace, d’autres – les hôpitaux de petite taille en particulier – ont du mal à l’adopter et à l’appliquer.

La Directive oblige les hôpitaux à se conformer à un Code d’éthique pour la chaîne d’approvisionnement et à 25 exigences obligatoires en matière d’approvisionnement. Le Code d’éthique pour la chaîne d’approvisionnement traite de sujets comme l’intégrité personnelle et le professionnalisme, la responsabilité et la transparence, ainsi que la conformité et l’amélioration continue. Les 25 exigences obligatoires abordent un vaste éventail de sujets, comme la répartition des tâches d’approvisionnement, les pouvoirs d’approbation, les calendriers, les critères d’évaluation, les exemptions pour approvisionnement non concurrentiel, les conflits d’intérêts et la conservation des dossiers.

Mise en œuvre et difficultés de conformité

Bien que la conformité soit obligatoire, les hôpitaux de l’Ontario ne suivent pas tous la Directive. Certains hôpitaux estiment en fait être « trop petits » pour se conformer en raison de leurs ressources limitées. Voici quelques-uns des défis auxquels font face les hôpitaux en ce qui a trait à la mise en œuvre et au respect de la Directive.

Répartition des tâches. L’exigence n1 de la Directive indique que les hôpitaux doivent répartir les tâches pour au moins trois des cinq fonctions suivantes liées à l’approvisionnement : demande, budget, engagement, réception et paiement. Ces fonctions doivent relever de services distincts ou, à tout le moins, de personnes distinctes. Toutefois, les hôpitaux de petite taille qui n’ont pas assez de personnel pour répartir les tâches doivent mettre en place des mécanismes de contrôle adéquats, approuvés par un vérificateur externe.

Conflits d’intérêts. L’exigence n24 précise que les hôpitaux doivent surveiller tout conflit d’intérêts et, lorsqu’un conflit d’intérêts se produit, prendre des « mesures d’atténuation pertinentes ». Selon le Guide de mise en œuvre de la Directive, cette exigence ferait en sorte qu’une entreprise ne pourrait pas participer à l’approvisionnement si ses services ont été retenus précédemment pour la préparation des documents d’approvisionnement concurrentiel. Cela peut poser un grave problème dans certains domaines très spécialisés des soins de santé, où l’on ne compte que quelques soumissionnaires, voire parfois un seul.

Seuils d’approvisionnement concurrentiel. L’exigence n3 décrit le type de processus d’approvisionnement exigé pour divers seuils d’approvisionnement concurrentiel. Cette exigence précise également que les hôpitaux ne doivent pas réduire la valeur globale de leurs achats en vue de contourner les exigences relatives aux seuils d’approvisionnement concurrentiel (p. ex. en divisant un contrat unique de valeur élevée en plusieurs contrats de valeur moindre). Par exemple, si un hôpital attribue continuellement des contrats au même soumissionnaire dans le cadre d’un processus concurrentiel restreint, ces contrats pourraient éventuellement être considérés comme un seul contrat dont la valeur globale exige un processus d’approvisionnement différent, comme un processus d’approvisionnement ouvert.

Approvisionnement non concurrentiel. L’exigence n21 précise qu’il peut être nécessaire de procéder à un approvisionnement non concurrentiel, mais seulement dans certaines circonstances spéciales, comme lorsqu’il existe une situation d’urgence imprévisible ou qu’il y a absence de concurrence pour des raisons techniques. Comme il ne s’agit pas de situations précises, la mesure dans laquelle les hôpitaux peuvent avoir recours à cette exemption dépendra des circonstances particulières de chaque approvisionnement. Les hôpitaux devraient donc user de prudence en ce qui concerne l’utilisation de cette exemption pour justifier des décisions d’approvisionnement non concurrentiel.

Une conséquence d'une non-conformité à la Directive

Même si la Directive n’a pas force de loi, puisqu’il ne s’agit ni d’une loi ni d’un règlement, dans l’affaire Bot Construction Ltd. c. Ontario (Ministère du Transport), qui portait sur une directive d’approvisionnement semblable, la Cour a jugé qu’une directive pouvait établir l’obligation d’un organisme gouvernemental d’agir de façon équitable et transparente dans le cadre d’un processus d’approvisionnement. Par conséquent, si un hôpital ne respecte pas la Directive et manque à son devoir d’équité, un soumissionnaire contrarié pourrait s’adresser aux tribunaux pour demander une révision judiciaire du manquement présumé. Si la demande du soumissionnaire est reçue, le tribunal peut, à sa discrétion, accorder réparation, par exemple en ordonnant à l’hôpital de réévaluer les propositions ou de lancer une nouvelle initiative d’approvisionnement. Les hôpitaux ont donc intérêt à suivre la Directive pour se protéger contre d’éventuelles poursuites judiciaires intentées par des soumissionnaires mécontents.

Bien que certains hôpitaux aient du mal à appliquer pleinement la Directive, ils doivent relever ces défis afin de s’acquitter de leur obligation de mettre en place un processus d’approvisionnement équitable et transparent. Même si la Directive n’a pas force de loi, les soumissionnaires lésés pourraient demander réparation en présentant une demande de révision judiciaire. Ce n’est qu’un exemple des conséquences que pourrait avoir une non-conformité. Il est donc impératif que les hôpitaux examinent attentivement leurs procédures et leurs documents d’approvisionnement et qu’ils les modifient, au besoin, afin de respecter les obligations prévues par la Directive.


Cet article a paru à l'origine dans Hospital News.