Le 18 février 2016, l’Autorité des marchés financiers (l’« AMF ») annonçait que, au terme d’une analyse rigoureuse et approfondie, elle n’entendait pas offrir de récompenses financières aux dénonciateurs. L’AMF disait avoir suivi de très près plusieurs programmes de dénonciation, notamment ceux des États-Unis et de l’Ontario, qui comportent des récompenses. Elle soulignait, en conclusion, son intention de promouvoir au cours des prochains mois un programme de dénonciation qui bonifierait les mesures existantes.
« Nous sommes convaincus que cette protection, combinée à des mesures anti-représailles dans le cadre d’un programme structuré et bien publicisé, auront un impact déterminant sur le nombre et la qualité des dénonciations transmises à l’Autorité, et ce, sans qu’aucune récompense ne soit nécessaire », précisait alors le directeur général du contrôle des marchés, Jean-François Fortin.
Le 16 juin dernier, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario annonçait par voie de communiqué le lancement de son programme de dénonciation et nommait le chef du Bureau de dénonciation. C’est confirmé : l’approche ontarienne reposera sur un système de récompenses (allant jusqu’à 5 millions de dollars), de confidentialité et de prévention des représailles, le tout, en échange des renseignements qui mèneront à la réussite des mesures d'application de la loi.
Le 20 juin 2016, l’AMF est à son tour passée de la parole aux actes; elle a officiellement lancé son programme de dénonciation. Contrairement à l’Ontario, l’AMF misera sur une approche axée uniquement sur la confidentialité, la prévention des représailles et l’anonymat pour les dénonciateurs d’infractions aux lois qu’elle administre. L’AMF persiste et dit non au système de récompenses. Selon elle, rien n’établit avec certitude que l’incitatif financier génère plus de dénonciations de qualité et que l’aspect véritablement clé de tout programme de dénonciation est la protection offerte aux dénonciateurs.
« Les personnes qui souhaitent porter à notre attention certaines informations, mais qui hésitaient à le faire jusqu’à présent par crainte de représailles, peuvent dès maintenant faire appel à notre programme de dénonciation. Nous les invitons à utiliser le guichet sécurisé du programme, qui assure un traitement rigoureux et confidentiel des informations transmises. Notre équipe spécialisée est prête à les accompagner dans leur démarche et à veiller au maintien d’une protection renforcée tout au long des enquêtes et des procédures qui s’ensuivent », a déclaré Louis Morisset, président-directeur général de l’AMF.
Nous pouvons lire sur le site de l’AMF, notamment, que les dénonciateurs bénéficieront du privilège de l’informateur et qu’une immunité les protégera contre d’éventuelles poursuites au civil. L’AMF entend travailler conjointement avec le gouvernement du Québec en vue de proposer des mesures anti-représailles additionnelles dans la législation relative au secteur financier.
Finalement, l’AMF invite le dénonciateur à utiliser le « formulaire de dénonciation » accessible sur son site Internet afin que l’équipe du programme de dénonciation puisse assurer un traitement rapide, efficace et confidentiel des renseignements. Tel qu’il appert de ce formulaire, le dénonciateur devra, notamment, s’identifier et communiquer les coordonnées des entreprises ou des individus, ou des deux, visés par la dénonciation. Le dénonciateur devra également décrire la situation qu’il souhaite porter à l’attention de l’AMF, c’est-à-dire présenter les éléments d’information pertinents et les raisons qui l’incitent à dénoncer cette situation. Finalement, le dénonciateur pourra joindre tout document qu’il juge pertinent.
Il sera intéressant de voir si les mesures de protection offertes par ce programme de dénonciation auront dans les faits une incidence sur le nombre de dénonciations de qualité, étant donné que, contrairement à l’Ontario et aux États-Unis, il ne prévoit aucun incitatif financier.