Auteurs(trice)
Associé, Droit du travail et de l'emploi, Toronto
Sociétaire, Droit du travail et de l'emploi, Toronto
Sociétaire, Droit du travail et de l’emploi, Toronto
Le gouvernement de l’Ontario a interjeté appel de la décision de la Cour supérieure de l’Ontario concernant le projet de loi 124, Loi de 2019 visant à préserver la viabilité du secteur public pour les générations futures (projet de loi 124 ou Loi), qui a invalidé la loi plafonnant les augmentations de salaire dans le secteur public. Le 12 février 2024, la Cour d’appel de l’Ontario, divisée, a rejeté en grande partie l’appel du gouvernement, confirmant que le projet de loi 124 viole les droits des travailleurs syndiqués en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.
Contexte
Le gouvernement de l’Ontario a adopté le projet de loi 124 en novembre 2019, qui plafonnait à 1 % les augmentations salariales annuelles des employés du public pour une période de trois ans. L’objectif déclaré de la Loi était de relever les défis budgétaires de la province et d’assurer la pérennité des services publics.
Diverses organisations syndicales contestent la validité de la Loi, faisant valoir qu’elle porte atteinte à leur droit à la liberté syndicale aux termes de l’alinéa 2d) de la Charte en minant leur droit à la négociation collective. En novembre 2022, la Cour supérieure de l’Ontario a déclaré la Loi inconstitutionnelle, déclarant qu’elle avait nui de façon importante au processus de négociation collective, qu’elle avait enfreint l’alinéa 2d) de la Charte et qu’elle ne pouvait pas être sauvegardée par l’article premier de la Charte. Le gouvernement en a appelé de la décision.
Décision de la Cour d’appel de l’Ontario
La Cour d’appel a majoritairement confirmé les motifs et les conclusions de la Cour supérieure, concluant, entre autres, que la Loi avait supprimé la rémunération et les salaires de la portée des éléments pouvant être négociés dans le cadre d’une négociation collective et que, par conséquent, elle ne préservait pas un processus valable de consultation et de négociation de bonne foi garanti par l’alinéa 2d) de la Charte. Contrairement aux tribunaux de première instance, qui ont invalidé la Loi dans son intégralité, la Cour d’appel a limité la déclaration d’inconstitutionnalité à l’application de la Loi aux travailleurs syndiqués.
Répercussions
Le 23 février 2024, soit moins de deux semaines après la décision d’appel, le gouvernement de l’Ontario a abrogé la Loi dans son intégralité pour remédier aux inégalités créées par la décision de la Cour d’appel. Même avant la décision de la Cour d’appel, certains employeurs du secteur public et des syndicats avaient entamé des négociations et des arbitrages des clauses de « réouverture » salariale en réponse à la décision de la Cour supérieure. Nous pensons que cette tendance se poursuivra. Pour les travailleurs non syndiqués, en l’absence d’un droit contractuel aux augmentations de salaire au cours de la période de trois ans prévues par le projet de loi 124, l’abrogation de la Loi ne crée pas, à elle seule, un droit à des augmentations salariales rétroactives. Toutefois, certains employeurs du secteur public offrent volontairement des augmentations salariales rétroactives et/ou entament d’autres discussions sur la rémunération à la lumière de la décision afin de se conformer aux attentes du marché et d’encourager le maintien en poste des travailleurs.