Auteur
Associé, Sociétés émergentes et à forte croissance, Montréal
L'agrégation de capitaux privés dans le but d'investir dans des entreprises en démarrage et des sociétés émergentes et à forte croissance reste l'un des moteurs de l'économie mondiale. Ce type d'investissement est souvent réalisé par des « fonds de capital de risque ». Cependant, qu'entend-on par « fonds de capital de risque »? En effet, ces fonds se matérialisent sous différentes tailles et formes.
Outre le fonds de capital de risque « traditionnel » à capital fixe d'une durée de 10 ans, il existe des micro-fonds, des fonds de croissance, des fonds d'opportunité, des fonds de continuité, des fonds sectoriels hautement spécialisés, des fonds « evergreen », des fonds liés à un studio de création d’entreprise ou à un accélérateur de capital de risque, des véhicules de financement spécifiques, des véhicules de co-investissement dédiés, etc. En outre, un large éventail d'investisseurs investit dans cet espace en tant que commanditaires – banques, fonds de fonds, fonds de pension, investisseurs stratégiques, particuliers fortunés, « family offices », etc.
Compte tenu de la multiplicité des types de fonds de capital de risque et des différents types d'investisseurs, il est plus important que jamais de bien comprendre le contexte et les problèmes propres à chaque type de fonds et à chaque type d'investisseur. Le principe de base de tout fonds est simple : les investisseurs (les commanditaires) fournissent de l'argent, le fonds mobilise cet argent pour payer les dépenses (qui peuvent inclure une commission de gestion) et réaliser des investissements, puis les rendements nets sont partagés entre le commandité et les commanditaires. Mais tenter de considérer tous ces véhicules à travers le même prisme conduira inévitablement à la confusion et à la frustration de l'équipe qui tente de lever un fonds (le commandité), pour des commanditaires qui tentent d'évaluer un investissement dans un fonds, et des prestataires de services professionnels qui tentent d'aider les commandités et pour les commanditaires à mettre tout cela en place. Cet article présente quelques exemples de contextes différents à prendre en considération lors de la constitution d'un fonds de capital de risque, qui soulèvent par ailleurs de nombreuses questions.
L'objectif d'investissement d'un fonds, en ce qui concerne le secteur et le stade, aura un impact sur la manière dont le fonds fonctionne réellement. Par exemple, le nombre d'investissements à réaliser et le montant du capital qu'un commandité réserve pour des investissements de suivi dans un fonds investissant dans des entreprises en phase d'amorçage seront probablement très différents de ceux d'un fonds de croissance investissant dans des entreprises à un stade plus avancé. Le degré d'influence que le commandité d'un micro-fonds de pré-amorçage peut exercer sur les sociétés de son portefeuille sera très différent de l'influence que peut avoir un commandité gérant un fonds émettant des chèques importants et dirigeant des rondes de financement ultérieures.
Les fonds constitués pour opérer aux côtés d'un studio de création d’entreprise ou d'un accélérateur présentent un ensemble unique de questions que les commanditaires et commandités doivent prendre en considération. L'argent collecté par le fonds sera-t-il utilisé pour financer les activités du studio de création d'entreprise ou de l'accélérateur ou seulement pour investir dans des entreprises créées par le studio de création d'entreprise ou participant à l'accélérateur ? S'il finance le fonctionnement du studio de création d'entreprise ou de l'accélérateur, comment le fonds sera-t-il rémunéré ? Le fonds sera-t-il autorisé à investir dans des entreprises autres que celles qui sont créées par le studio de création d’entreprise ou qui participent à l'accélérateur ? Et si oui, dans quelle mesure ? Les paramètres économiques des deux types d'investissement doivent-ils être les mêmes ? La liste est longue. L'approche choisie pour chaque question entraînera des conséquences sur la structure fiscale et juridique du fonds et du studio de création d'entreprise ou de l'accélérateur, ainsi que sur la relation entre les deux.
Les termes usuels peuvent revêtir une signification différente selon le type de fonds. Si l'on reprend l'exemple du studio de création d’entreprise, les règles relatives aux conflits d'intérêts régissant les circonstances dans lesquelles un fonds peut investir dans des sociétés dans lesquelles les membres commandités détiennent un intérêt préexistant ne peuvent évidemment pas s'appliquer de la même manière à un fonds constitué dans le but d'investir dans des sociétés issues d'un studio de création d’entreprise qu'à un fonds qui s'approvisionne en investissements sur le marché dans son ensemble. Mais qu'en est-il des investissements de suivi une fois que la société issue d’un studio de création d’entreprise est devenue une société du portefeuille du fonds ? L'équipe du studio de création d’entreprise doit-elle être autorisée à poursuivre ses investissements dans la société ou les investissements doivent-ils tous être réalisés par l’intermédiaire du fonds ? Il y a plus d'une façon d'aborder ces questions.
Quel que soit le type de fonds, il est essentiel que les commandités et leur public (c'est-à-dire les commanditaires) comprennent leurs attentes, leurs exigences et leurs motivations. Un fonds de pension ou une banque réglementée auront des exigences différentes de celles d'un investisseur fortuné et un investisseur stratégique d'envergure aura des motivations différentes de celles d’un « family office » qui investit pour obtenir un rendement financier. Les fonds de fonds ont souvent des obligations d'information détaillées envers leurs propres investisseurs qu'ils doivent aussi transmettre aux fonds sous-jacents. De même, il est important que les investisseurs connaissent leurs commandités et comprennent leurs capacités et leurs limites. Un fonds de pré-amorçage de 10 millions de dollars n'aura pas la même capacité à fournir des rapports ou à traiter d'autres questions que l'équipe d'un fonds de croissance de 500 millions de dollars qui en est à son cinquième fonds.
Compte tenu de la grande diversité des secteurs d'activité ou des stades de développement, de la taille des fonds, de leur structure et du type d'investisseur, toutes les parties ont intérêt à prendre du recul et à évaluer le contexte dans lequel s'inscrit leur opération lorsqu'elles abordent le processus de levée de fonds ou d'investissement du fonds. S'il existe différents styles et approches de négociation que les commandités et les commanditaires peuvent adopter pour résoudre les différents problèmes qui se posent au cours de la constitution d'un fonds, il est clair qu'une approche unique n'est pas viable.