Les tarifs douaniers de Trump : Le Canada évite en grande partie les tarifs douaniers « réciproques »… pour l’instant Les tarifs douaniers de Trump : Le Canada évite en grande partie les tarifs douaniers « réciproques »… pour l’instant

4 avril 2025 8 MIN DE LECTURE

Le 2 avril 2025, le président Trump a finalement mis sa menace à exécution et annoncé des tarifs douaniers « réciproques ». Dans son décret (le décret), il impose des tarifs douaniers ad valorem sur toutes les importations en provenance de tous les pays du monde à des taux commençant à 10 %, mais atteignant des pourcentages bien supérieurs pour plusieurs pays. Bien que le Canada ne soit pas exempté, les marchandises importées qui sont admissibles à titre de marchandises originaires du territoire d’un pays ACEUM peuvent continuer à bénéficier du traitement préférentiel prévu par l’ACEUM (c’est-à-dire généralement en franchise de droits), à l’exception de l’acier et de l’aluminium ainsi que de l’automobile, marchandises sur lesquelles l’administration Trump a imposé des tarifs douaniers le mois dernier.

Dans le présent bulletin, nous décrivons les principaux éléments du décret, expliquons comment il touche ou non les marchandises canadiennes et discutons de ce à quoi il faut s’attendre par la suite.

Le décret : principaux éléments

  • Un tarif douanier de base ad valorem de 10 % s’applique à toutes les importations en provenance de tous les pays du monde à compter du 5 avril 2025 à 0 h 01 (heure de l’Est).
  • Les importations aux États-Unis en provenance de certains pays seront soumises à des tarifs douaniers de base à des taux supérieurs. Ces taux, qui varient d’un pays à l’autre, entreront en vigueur le 9 avril 2025 à 0 h 01 (heure de l’Est).
    • Les détails concernant les pays supplémentaires et les taux applicables à leur égard seront indiqués dans des annexes lorsque le décret aura été publié dans le Federal Register (ci-après, le Registre fédéral). Les pays soumis à des tarifs douaniers supérieurs à 10 % comprennent la Chine (34 %), l’Union européenne (20 %), le Vietnam (46 %), Taïwan (32 %), le Japon (24 %), l’Inde (26 %), la Corée du Sud (25 %), la Thaïlande (36 %), la Suisse (31 %), l’Indonésie (32 %), la Malaisie (24 %), le Cambodge (49 %), l’Afrique du Sud (30 %), le Bangladesh (37 %), Israël (17 %) et d’autres pays encore.
  • Pour le Canada (et le Mexique) en particulier :
    • À l’exception des produits d’acier et d’aluminium et des produits automobiles qui sont soumis à des tarifs douaniers de 25 % en vertu de l’article 232 de la loi américaine intitulée Trade Expansion Act of 1962, les marchandises qui sont admissibles à titre de marchandises originaires du territoire d’un pays ACEUM peuvent continuer à être importées aux États-Unis en franchise de droits.
      • Les produits d’acier et d’aluminium auxquels s’appliquent les tarifs douaniers au titre de l’article 232 resteront soumis à ces tarifs, mais ne feront pas l’objet de tarifs douaniers « réciproques » supplémentaires.
      • Les automobiles et les pièces automobiles auxquelles s’appliquent les tarifs douaniers au titre de l’article 232 resteront soumises à ces tarifs, mais ne feront pas l’objet de tarifs douaniers « réciproques » supplémentaires. Les tarifs douaniers au titre de l’article 232 sur l’automobile sont entrés en vigueur le 3 avril 2025. Les détails concernant les automobiles et les pièces automobiles soumises aux tarifs douaniers ont été publiés le 2 avril [PDF].
    • Les marchandises qui ne sont pas admissibles à titre de marchandises bénéficiant du traitement préférentiel prévu par l’ACEUM, autres que les produits d’acier et d’aluminium et les produits automobiles auxquels s’appliquent les tarifs douaniers au titre de l’article 232, continueront d’être soumises aux tarifs douaniers de 25 % au titre de l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA) (et de 10 % pour l’énergie et la potasse ne relevant pas de l’ACEUM) en vigueur depuis le 4 mars.
  • Si les tarifs douaniers de 25 % au titre de l’IEEPA sur les marchandises canadiennes (et mexicaines) sont levés, les marchandises originaires du territoire d’un pays ACEUM continueront de bénéficier du traitement préférentiel prévu par l’ACEUM, tandis que les marchandises importées du Canada et du Mexique qui ne sont pas admissibles à titre de marchandises originaires du territoire d’un pays ACEUM seront soumises à un tarif douanier de 12 % (soit deux points de pourcentage de plus que le taux de base de 10 %). D’autres marchandises exclues du décret seront indiquées dans une annexe une fois le décret publié dans le Registre fédéral. Il s’agira notamment « [traduction libre] du cuivre, de produits pharmaceutiques, de semi-conducteurs, d’articles en bois ouvré, de certains minéraux critiques, d’énergie et de produits énergétiques » et de tous les articles susceptibles d’être soumis à des tarifs douaniers dans le cadre d’actions futures au titre de l’article 232.

Autres caractéristiques notables du décret

  • Le contenu américain se trouvant dans des marchandises importées n’est pas soumis aux tarifs douaniers « réciproques », à condition qu’au moins 20 % de la valeur totale des marchandises importées soit originaire des États-Unis. Le « contenu américain » est déterminé par la valeur d’un article attribuable aux composants entièrement fabriqués ou substantiellement transformés aux États-Unis. Cette mesure semble avoir pour but d’inciter les fabricants à ramener au moins une partie de leur production aux États-Unis. Bien que le décret autorise U.S. Customs and Border Protection (le service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis) à exiger des renseignements et des documents permettant de vérifier si les importations remplissent les conditions requises pour bénéficier de l’exemption relative au contenu américain, il reste à voir comment il sera mis en œuvre.
  • Le traitement de minimis reste disponible pour les marchandises soumises au décret… pour l’instant. Une fois que le secrétaire américain au commerce aura avisé le Président que le service des douanes dispose des systèmes requis pour traiter les opérations douanières supplémentaires à sa charge, le traitement de minimis ne sera plus disponible. Les systèmes en question devraient être opérationnels dès le début du mois de mai 2025, mais cela pourrait prendre plus de temps compte tenu du volume et de l’éventail des marchandises bénéficiant du traitement de minimis.
  • Les marchandises en transit sur le mode de transport final avant 0 h 01 (heure de l’Est) le 5 avril 2025 sont exemptées des tarifs douaniers réciproques.
  • Le décret est muet en ce qui concerne le remboursement éventuel des tarifs douaniers. Les décrets antérieurs imposant des tarifs douaniers au titre de l’IEEPA et de l’article 232 (par exemple, les tarifs douaniers de 25 % au titre de l’IEEPA imposés au Canada) indiquaient explicitement qu’aucun remboursement n’était possible. Par son silence, le décret actuel suggère qu’il est encore possible d’obtenir un remboursement, par exemple, pour les intrants qui sont intégrés dans les marchandises fabriquées aux États-Unis, puis réexportées.

Le fondement juridique des tarifs douaniers

Le président Trump s’appuie de nouveau sur l’IEEPA. Le décret stipule que les tarifs douaniers réciproques sont imposés en réponse à « [traduction libre] une urgence nationale résultant de conditions reflétées par des déficits annuels importants et persistants de la balance commerciale des États-Unis ».

Un bref répit pour le Canada?

Le décret du 2 avril laisse le Canada dans une position presque identique à celle qu’il occupait à l’égard des tarifs douaniers américains le 1er avril. La plupart des marchandises originaires du territoire d’un pays ACEUM continuent d’être à l’abri des tarifs douaniers, mais les principaux secteurs manufacturiers – l’acier, l’aluminium et l’automobile – sont très exposés. Les exportations canadiennes – plus particulièrement le bois d’œuvre – restent également visées par des enquêtes en cours au titre de l’article 232, et l’administration Trump a menacé d’ouvrir des enquêtes au titre de l’article 232 sur d’autres exportations clés pour le Canada, notamment les produits pharmaceutiques.

Le fait que les exportations canadiennes aient été largement épargnées par le décret du 2 avril suggère que les importations américaines au Canada sont moins susceptibles de faire l’objet de tarifs de représailles supplémentaires à court terme, à l’exception du contenu américain se trouvant dans les automobiles pour lequel le Canada a annoncé des tarifs de représailles le 3 avril en réponse aux tarifs douaniers américains au titre de l’article 232 sur l’automobile. Quoi qu’il en soit, on peut encore s’attendre à ce que d’autres mesures commerciales perturbatrices soient prises au cours des prochains mois.

Par ailleurs, on ne sait pas si, en ce qui concerne les marchandises admissibles à titre de marchandises originaires du territoire d’un pays ACEUM, le maintien de l’« exemption » des tarifs douaniers au titre de l’IEEPA indique que l’administration américaine a comme stratégie à long terme de renégocier l’ACEUM à des conditions encore plus avantageuses pour les États-Unis, ou s’il reflète simplement le fait que l’administration américaine a pris conscience que l’imposition de tarifs douaniers sur toutes les marchandises issues des chaînes d’approvisionnement nord-américaines, qui sont profondément intégrées, et les vastes mesures de représailles que le Canada et le Mexique prendraient en conséquence seraient beaucoup trop pénibles économiquement pour les consommateurs américains et politiquement pour les Républicains.