Rapport

Fusions et acquisitions de sociétés ouvertes canadiennes Fusions et acquisitions de sociétés ouvertes canadiennes

Un guide pratique sur les questions entourant les fusions et acquisitions de sociétés ouvertes au Canada
7 mai 2025 76 MIN DE LECTURE
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Système d’alerte et déclarations d’initiés

Les lois canadiennes sur les valeurs mobilières contiennent un système de communication connu sous le nom de « système d’alerte » relativement à l’acquisition de titres de sociétés ouvertes. Lorsqu’un acquéreur achète suffisamment de titres comportant droit de vote ou de titres de capitaux propres de n’importe quelle catégorie pour que lui et tout allié aient la propriété véritable de plus de 10 % des titres de cette catégorie, ou exercent un contrôle ou une emprise sur ces titres, l’acquéreur doit publier et déposer un communiqué dès que possible et dans tous les cas au plus tard à l’ouverture de la séance de négociation le jour ouvrable qui suit l’acquisition, et ensuite déposer une déclaration en vertu du système d’alerte en temps utile et dans tous les cas au plus tard au cours des deux jours ouvrables suivant la date d’acquisition. Des communiqués et déclarations additionnels sont requis à l’acquisition de tranches de 2 % ou plus des titres en circulation de même catégorie, ou au moment de dispositions entraînant une diminution de participation de 2 % ou une diminution de la participation de l’acquéreur sous le seuil de 10 %.

L’information qui doit être divulguée dans les communiqués et les déclarations doit préciser, notamment : (i) le nombre et le pourcentage de titres acquis ou vendus; (ii) l’objectif poursuivi par l’acquéreur de titres ou le vendeur de titres; et (iii) toute autre intention d’acquérir ou de vendre des titres additionnels. On prévoit également une période de réflexion interdisant des achats supplémentaires par l’acquéreur jusqu’à la fin du jour ouvrable suivant la date de dépôt de chaque déclaration. La période de réflexion cesse une fois que le niveau de détention d’actions atteint le seuil de 20 %, moment à partir duquel les règles relatives aux offres publiques d’achat sont déclenchées. Les exigences de déclaration prescrites dans la Schedule 13D de la Securities Exchange Act of 1934 des États-Unis, lesquelles sont déclenchées lorsque le niveau de détention d’actions atteint le seuil de 5 %, sont également susceptibles de s’appliquer aux sociétés cibles qui sont inscrites aux États-Unis.

Les investisseurs institutionnels admissibles, y compris les établissements financiers, les caisses de retraite ainsi que certains fonds de capital-investissement et fonds spéculatifs, peuvent recourir au régime de déclaration mensuelle (RDM), dont le concept est similaire au système de déclaration prévu à la Schedule 13G aux États-Unis. La principale différence entre le système d’alerte conventionnel et le RDM consiste en le fait que le système conventionnel exige la publication d’un communiqué en temps utile et le dépôt d’une déclaration en vertu du système d’alerte dans les deux jours ouvrables qui suivent l’atteinte d’un seuil déclencheur de déclaration, de même qu’une période de réflexion dans les circonstances décrites précédemment, tandis que le RDM permet généralement de déclarer les niveaux de détention en propriété chaque mois, chacune des déclarations devant être faite dans les 10 jours qui suivent la fin du mois, sans période de réflexion. Un investisseur institutionnel admissible est exclu du RDM s’il : (i) présente ou a l’intention de présenter une offre publique d’achat en bonne et due forme ou propose ou a l’intention de proposer une restructuration, un regroupement, une fusion, un arrangement ou un autre regroupement d’entreprises semblable touchant un émetteur assujetti si cette opération faisait en sorte que les investisseurs institutionnels admissibles aient le contrôle effectif de l’émetteur; ou (ii) sollicite des procurations auprès des porteurs de titres dans certaines circonstances particulières. L’interdiction d’utiliser le RDM pour solliciter des procurations ne s’applique pas lorsque l’investisseur institutionnel admissible « a l’intention de solliciter » des procurations. Par conséquent, les investisseurs militants peuvent être en mesure d’utiliser le RDM dans le cadre d’une stratégie d’accumulation des richesses avant le commencement de la course aux procurations.

En plus de déposer des déclarations aux termes du système d’alerte et du RDM, les porteurs qui ont la propriété véritable de titres comportant droit de vote représentant plus de 10 % des droits de vote rattachés aux titres comportant droit de vote en circulation, ou qui exercent un contrôle ou une emprise sur de tels titres, doivent déposer les déclarations requises aux termes du régime de déclarations d’initiés (le Système électronique de déclaration des initiés, ou SEDI). La déclaration initiale doit être effectuée dans un délai de 10 jours par tout initié assujetti à compter de la date à laquelle il devient « initié assujetti » et toute opération subséquente doit être déclarée dans les cinq jours de l’opération. Le régime de déclarations d’initiés peut également s’appliquer aux dirigeants désignés d’un actionnaire important, notamment au chef de la direction, au chef des finances et au chef de l’exploitation. Les actionnaires effectuant leurs déclarations aux termes du RDM sont susceptibles de se prévaloir de dispenses des obligations de déclarations d’initiés selon lesquelles l’initié n’est tenu de déposer une déclaration qu’une fois par mois. En plus de déclarer sa participation dans les titres de l’émetteur assujetti, l’initié assujetti doit également déclarer les instruments financiers connexes, notamment les contrats dont la valeur ou le prix sur le marché est fonction de la valeur ou du cours d’un titre de l’émetteur assujetti.

Acquérir une participation restreinte

Une fois qu’un initiateur a annoncé publiquement son intention de faire une offre publique d’achat, l’acquéreur ne peut plus acheter d’actions de la société cible autrement que dans le cadre de l’offre publique d’achat jusqu’à ce que l’offre ait été lancée et, une fois qu’elle est lancée, il peut uniquement acquérir jusqu’à 5 % des actions dans certaines circonstances déterminées. Par conséquent, il est courant pour les acquéreurs d’envisager d’accumuler les actions d’une société cible avant de lancer une offre ou avant d’annoncer son intention de lancer une offre afin d’obtenir une participation restreinte dans la société. Les initiateurs éventuels acquièrent habituellement une participation restreinte en effectuant des achats sur le marché libre ou aux termes de contrats de gré à gré. Les avantages et les inconvénients liés à l’acquisition d’une participation restreinte doivent être évalués avec soin.

Le tableau suivant met en évidence certains des principaux avantages et inconvénients de l’acquisition d’une participation restreinte.

Principaux avantages et inconvénients d’une participation restreinte

Le nombre d’actions accumulées sera généralement limité par la liquidité des actions, par les règles relatives aux offres publiques d’achat applicables en ce qui a trait à l’intégration des achats de titres et par les obligations imposées aux termes du système d’alerte.

Avantages d’une participation restreinteInconvénients d’une participation restreinte
  • Si elle est suffisamment importante, la participation restreinte est susceptible de permettre à l’initiateur d’influencer la direction de la société cible.

  • Offre l’occasion d’acquérir des actions sans payer une prime importante, réalisant ainsi des économies qui peuvent servir à financer un prix plus élevé dans le cadre d’une offre en bonne et due forme et, en fin de compte, à réduire le coût moyen de l’acquisition si l’offre publique d’achat est réalisée.

  • L’achat initial peut soit dissuader d’autres initiateurs potentiels, soit augmenter la possibilité de récupérer les coûts de l’opération dans l’éventualité où une offre concurrente est supérieure à l’offre de l’initiateur.

  • Les achats initiaux peuvent permettre à l’initiateur de se prévaloir des droits accordés aux actionnaires en vertu des lois sur les sociétés par actions, y compris celui de demander la tenue d’une assemblée des actionnaires.
  • L’achat d’actions auprès de la société cible peut augmenter les coûts et le risque de pertes de l’initiateur si l’opération n’est pas réalisée.

  • De tels achats peuvent augmenter la probabilité d’une divulgation prématurée des intentions de l’initiateur.

  • Le mouvement du marché pourrait entraîner une augmentation du prix des actions de la société cible, ce qui aurait comme conséquence de diminuer la prime apparente offerte.

  • De tels achats sont susceptibles d’avoir une incidence sur l’application des exigences des règles d’intégration et de celles applicables à une offre publique d’achat par un initié.

  • Les achats effectués avant la date de l’offre risquent de rendre plus difficile la satisfaction de l’exigence de dépôt minimal, puisque les actions dont l’initiateur et ses alliés sont propriétaires ne sont pas prises en compte dans le calcul.

Un acquéreur doit être prudent avant d’engager des discussions avec d’autres actionnaires de la société cible au moment d’acquérir une participation restreinte, puisque si l’on juge qu’il a agi conjointement ou de concert avec d’autres, cela pourrait déclencher l’application des obligations aux termes du système d’alerte, une offre publique d’achat ou un régime de droits des actionnaires. La question de savoir si une personne a agi conjointement ou de concert avec l’acquéreur est une question de fait. Cependant, si l’acquéreur a conclu un contrat, un accord ou un engagement avec un autre actionnaire dans le but d’acquérir ou d’offrir d’acquérir des actions de la société cible, l’acquéreur est réputé agir conjointement ou de concert avec cet autre actionnaire.

Un actionnaire n’est pas réputé agir conjointement ou de concert avec l’acquéreur s’il a seulement conclu une convention de dépôt selon laquelle il manifeste son intention de céder ses actions en réponse à l’offre de l’acquéreur, comme il est expliqué plus en détail ci-après. En revanche, un actionnaire est présumé agir conjointement ou de concert avec un acquéreur s’il a conclu un contrat, un accord ou un engagement avec ce dernier aux termes duquel il prévoit exercer ses droits de vote conjointement avec lui. Si l’acquéreur a l’intention de lancer une course aux procurations dans le cadre de l’acquisition proposée, la simple expression que l’actionnaire a l’intention d’exercer les droits de vote rattachés à ses actions en faveur de la proposition de l’acquéreur ne signifie pas à elle seule qu’ils ont agi conjointement.

Par ailleurs, le moment de l’acquisition de la participation restreinte doit être planifié avec prudence si l’acquéreur envisage d’engager des discussions avec la société cible. Après que les discussions avec la société cible sont entamées, il est possible que l’acquéreur ait accès à de l’information importante non divulguée à propos de la société cible, ce qui l’empêcherait d’acquérir des actions supplémentaires sur le marché libre. De même, une entente de confidentialité conclue avec la société cible peut comporter un moratoire qui empêcherait l’acquéreur d’acheter des actions.

Acquisition « amicale »

La nécessité ou le désir de coopérer avec le conseil d’administration de la société cible constitue un facteur clé à prendre en considération au moment d’établir la structure d’une opération de fusion et acquisition de sociétés ouvertes. Le fait de réaliser l’opération avec le soutien du conseil d’administration de la société cible (par l’entremise d’une offre, d’un arrangement ou autrement) offre à l’acquéreur divers avantages :

  • un raccourcissement éventuel important de la période de 105 jours autrement obligatoire dans le cadre d’une offre publique d’achat hostile, puisque le conseil d’administration de la société cible peut accepter de réduire le délai minimal de dépôt à aussi peu que 35 jours dans le cas d’une offre, et que l’approbation des actionnaires à l’égard d’un arrangement peut généralement être obtenue dans les 45 à 60 jours qui suivent l’annonce d’une convention d’arrangement;
  • l’accès à la procédure d’arrangement, à condition que le conseil donne son approbation à cet égard;
  • l’accès à des renseignements confidentiels (normalement aux termes d’une entente de confidentialité et de moratoire liant l’acquéreur) et la possibilité d’effectuer une vérification diligente et un examen approfondis plutôt que limités aux documents d’information publics;
  • la négociation de clauses de protection (comme celles relatives aux indemnités de rupture, au remboursement de dépenses, aux droits d’exclusivité et au droit d’égaler une offre supérieure) destinées à assurer la réalisation de l’acquisition proposée;
  • une maximisation des économies et des avantages fiscaux grâce à une opération structurée par les deux parties;
  • une participation à la résolution des questions de réglementation, particulièrement lorsque la société cible est une entreprise dont les activités sont réglementées ou concentrées dans certains segments du marché, ou encore si l’on doit tenir compte de considérations touchant l’examen d’investissements étrangers ou la sécurité nationale;
  • une capacité accrue de maintenir en poste l’équipe de direction et les employés clés, lesquels pourraient être plus enclins à quitter l’entreprise dans un contexte d’offre publique d’achat hostile;
  • l’atténuation du risque que le conseil de la société cible adopte des mesures défensives et cherche à maximiser la valeur de l’entreprise – si la société cible agissait ainsi, la complexité de la réalisation de l’offre non sollicitée et les coûts afférents seraient accrus;
  • la structuration de l’opération de manière à atténuer le plus possible le risque qu’un intrus se manifeste et le fait de gagner du temps;
  • l’obtention par le conseil d’administration de la société cible d’une recommandation favorable susceptible de favoriser la satisfaction de l’exigence de dépôt minimal (dans le cas où l’opération est structurée à la manière d’une offre publique d’achat) ou l’obtention de l’approbation des porteurs de titres (dans le cas où l’opération est structurée à la manière d’un arrangement).
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En savoir plus

Offre publique d’achat « hostile »

Dans certains cas, il est préférable qu’un acquéreur s’engage dans une opération « hostile » ou « non sollicitée ». Par exemple :

  • les démarches amicales n’ont pas abouti à une opération d’acquisition;
  • l’acquéreur a établi son prix et ne s’attend pas à ce que des intrus se manifestent, de sorte qu’il ne veut pas s’engager dans des négociations avec le conseil d’administration de la société cible qui risquent de faire grimper le prix en échange d’une recommandation favorable du conseil;
  • l’acquéreur a conclu des conventions de dépôt irrévocable avec des actionnaires importants;
  • l’objectif de l’acquéreur n’est pas d’avoir la mainmise sur la société cible, mais de provoquer un changement ou d’exercer une influence sur le conseil d’administration;
  • l’écart entre l’évaluation de l’acquéreur et celle du conseil de la société cible est si grand que l’acquéreur n’a pas d’autre choix que de présenter une offre directement aux actionnaires de la société cible.

Comme le soutien du conseil d’administration de la société cible n’est pas requis pour mener à terme une offre publique d’achat, cette structure est la seule qui permette de réaliser une acquisition non sollicitée ou hostile.

Conventions de dépôt

L’acquéreur peut choisir de conclure une convention de dépôt avec un ou plusieurs actionnaires principaux de la société cible pour accroître les chances de réussite de l’opération. Par la convention de dépôt, les actionnaires s’engagent à céder leurs actions en réponse à l’offre publique d’achat ou, dans le cas d’une opération assujettie au vote, de se prononcer pour la réalisation de l’opération. La convention peut être « irrévocable » et, dans ce cas, les titres déposés en réponse à l’offre peuvent être cédés à l’acquéreur ou les voix rattachées à ces titres doivent être exprimées de manière à voter pour la réalisation de l’opération, même si une offre supérieure soutenue par le conseil de la société cible était présentée, ou « souple » et, dans ce cas, l’actionnaire aurait le droit de résilier la convention de dépôt et de déposer ses titres en réponse à l’offre plus élevée ou de voter pour la réalisation de l’offre plus élevée. L’interdiction d’acquérir la propriété véritable d’actions autrement que dans le cadre de l’offre publique d’achat à compter de la date de l’annonce par l’acquéreur de son intention de faire une offre publique d’achat n’empêche pas la conclusion de conventions de dépôt, et la conclusion de telles conventions ne déclenche pas, à elle seule, l’application des obligations en vertu du système d’alerte ni n’établit que l’acquéreur et l’actionnaire partie à la convention de dépôt agissent conjointement. Cependant, certains régimes de droits des actionnaires peuvent être déclenchés lorsque des actionnaires concluent des conventions de dépôt irrévocable.

Approbation des actionnaires de l’acquéreur

Dans une opération action-pour-action où l’acquéreur se propose d’émettre de ses actions aux actionnaires de la société cible, il est essentiel de déterminer si l’approbation des actionnaires de l’acquéreur est requise ou non. Les règles de la Bourse de Toronto prescrivent que l’émetteur inscrit doit obtenir l’approbation de ses actionnaires si l’acquisition que se propose de faire la société ouverte entraînait l’émission d’un nombre d’actions correspondant à plus de 25 % de ses actions en circulation avant dilution. Le calcul du nombre d’actions émises en paiement du prix de l’acquisition doit tenir compte de toutes les actions émises ou devant être émises aux termes d’un placement privé d’actions qui représente une condition de l’acquisition ou est autrement lié à celle-ci.


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