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Ce n’est pas tous les jours que la Cour supérieure rend une décision au mérite dans un dossier d’action collective. Or, non seulement c’est le cas dans l’affaire Charland c. Hydro-Québec, mais la Cour supérieure y va de reproches cinglants à l’égard de la partie demanderesse.
Le 29 mai dernier, le juge Steve J. Reimnitz a rejeté l’action collective, par laquelle la demanderesse réclamait de la défenderesse, Hydro-Québec, le remboursement de « frais d’administration » qu’elle qualifiait « d’intérêts », payés en sus du taux de 5 % prévu à la Loi sur l’intérêt « LSI ». Au soutien de ses prétentions, la demanderesse a présenté de nombreux arguments à la cour, mais sans succès.
Pour ce qui est de la nature des « frais d’administration », la Cour a tranché en faveur de la défenderesse en édictant que ces frais ne pouvaient être considérés comme des intérêts. Notamment, le législateur a adopté cette loi protégeant les consommateurs afin d’obliger le prêteur à révéler le taux annuel auquel l’emprunteur contracte. Nous ne sommes pas dans une situation d’emprunteur/prêteur et la demanderesse ne peut se retrouver dans cette situation puisque sa relation avec Hydro‑Québec est réglementée. Le juge a bien pris soin de préciser que l’interprétation suggérée par la demanderesse n’a rien à voir avec l’intention du législateur lors de l’adoption de la LSI. En effet, cette interprétation ne tient aucunement compte du contexte particulier qu’impose un contrat réglementé à caractère obligatoire applicable à la défenderesse. Pour cette seule raison, la Cour a rejeté l’action collective.
Le juge, en obiter, a également tranché tous les autres arguments soulevés par la demanderesse et y est allé de multiples critiques à son égard. Par exemple, alors que la demanderesse soulevait le défaut d’information de la part d’Hydro-Québec, vu la difficulté d’obtenir la réelle information sur le taux de « frais d’administration » payés, le juge a noté l’absence de préjudice et le non-respect de l’obligation de se renseigner. En particulier, les frais d’administration facturés par Hydro-Québec étaient inférieurs au taux autorisé par la Régie de l’énergie. Le juge a également reproché à la demanderesse d’être l’artisane de son propre malheur. En effet, la demanderesse a volontairement omis de payer ses factures afin de se faire facturer des frais d’administration, « de manière à causer artificiellement un préjudice qu’elle allègue avoir subi, et ce, dans le but de fabriquer le recours collectif soumis au tribunal ».
Cette dernière remarque devrait inciter nos cours à scruter plus attentivement certaines actions collectives qui montrent, dès l’autorisation, un caractère artificiel et concocté.